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lundi 24 septembre 2012

Homélie du 21ème idmanche du Temps ordinaire (B) - 26 août 2012

« Soyez soumis les uns aux autres... pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’Eglise, le Christ est la tête. »

Le monde de la Bible n’est pas le nôtre. Les cultures ne sont pas les mêmes ; nous ne pouvons pas lire la Bible comme si elle avait été écrite il y a deux ans. Les images employées ne sont pas immédiatement transposables ; il faut avouer que, aujourd’hui, certains passages de la Bible sont difficiles à entendre. Ils le sont d’autan plus dans un monde qui se complait volontiers dans la polémique. Ce passage de Paul est du pain béni pour les défenseurs d’un féminisme acharné ou pour les ténors récents d’une prétendue liberté qui veulent défendre l’union de deux hommes ou de deux femmes dans le mariage. Nous lisons cependant la Bible dans l’Eglise d’aujourd’hui, parce que nous croyons que, à travers et au delà des différences et des difficultés, ces textes anciens nous parlent de Dieu. Plus encore, par delà les contingences de l’Histoire, nous voulons y trouver quelle est la volonté de Dieu, une volonté qui dépasse et transcende les modes d’un monde qui passe.

Il en est ainsi pour la deuxième lecture d’aujourd’hui, où Paul nous parle du mariage et de l’amour de Dieu. « Par respect pour le Christ », dit-il « soyez soumis les uns aux autres. » C’est très bien, mais il continue : « ... les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus ; car, pour la femme, le mari est la tête, tout comme, pour l’église, le Christ est la tête. » Paul écrit dans et pour une autre culture où la supériorité de l’homme et la soumission de la femme allaient de soi, où on croyait que cette hiérarchie était de l’ordre de la nature. Il ne faudrait pas faire dire à l’Apôtre ce qu’il n’a pas voulu dire. Dans le monde d’aujourd’hui, en Occident du moins, un sentiment pareil est devenu quasiment inacceptable. Plus personne ne veut devoir dépendre d’un autre. Et nous constatons les limites d’une telle prétention dans la sécularisation de la société qui s’arroge le droit de se passer de Dieu et même de la chasser. Pour nous – et heureusement – il est acquis qu’il y a une égalité fondamentale entre homme et femme. Cette égalité n’est pas synonyme de confusion. L’homme n’est pas la femme, mais tous deux sont complémentaires, tel que nous le décrit déjà le Livre de la Genèse.

L’Apôtre aborde certes le mariage, mais le découpage du texte pour la lecture liturgique nous fait peut-être perdre le contexte de la Lettre aux Ephésiens. Paul parle du mariage pour nous instruire sur le mystère de l’Eglise ; il invite les chrétiens d’Ephèse à bâtir le corps du Christ dans l’unité. Notons d’abord que, si Paul croit que la femme doit être soumise à son mari, ce n’est pas pour que le mari en profite en dominant la femme. Au contraire : « Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’église, il s’est livré pour elle. » Chaque époux doit aimer son épouse jusqu’au point d’être prêt à mourir pour elle, comme le Christ était prêt à mourir pour nous tous. Même si le monde de Paul est un monde hiérarchique, c’est une hiérarchie qui doit être animée uniquement par l’amour, l’amour du Christ : la femme doit être soumise par amour du Christ, le mari doit se donner à sa femme comme le Christ s’est donné à nous. C’est l’amour divin qui doit régner dans le mariage, ce même amour qui nous a conduits à rejeter, à l’époque moderne, cette hiérarchie qui est presque omniprésent dans le monde antique. Ainsi, pour Paul, toute institution, quelle qu’elle soit, doit être animée et sous-tendue par l’amour du Christ, cet « amour qui ne passera jamais ». Sans l’amour nous ne sommes rien.

Mais il faut aller encore plus loin. Si Paul parle du mariage, il parle plus fondamentalement de Dieu. Pour lui, le mariage n’est finalement qu’un symbole, une image de l’amour que Dieu porte pour nous. Il cite le livre de la Genèse, le récit de la création d’Adam et Ève : « à cause de cela, l’homme quitte son père et sa mère, il s’attache à sa femme, et tous deux ne font plus qu’un. » La Genèse parle de l’origine du mariage, mais Paul change totalement le sens du texte : « Ce mystère est grand, » dit-il, « je le dis en pensant au Christ et à l’Eglise. » Pour lui, le vrai mariage, le vrai mystère d’amour, c’est l’amour du Christ ; c’est lui, l’homme qui quitte le sein de son Père pour s’attacher par amour à l’humanité. Le premier amour, le grand amour, c’est l’amour du Christ pour nous. Le vrai mariage, c’est l’unité entre le divin et l’humain que crée cet amour. Le mariage humain n’est qu’un reflet, une image, de cet amour divin ; il doit nous rappeler cet amour, nous diriger vers lui.

Le mariage n’est donc qu’un exemple. Il y a d’autres reflets, d’autres images de l’amour de Dieu : l’amour d’un parent pour son enfant, l’amour d’un ami pour son ami. Chaque vrai amour humain parle au fond de l’amour divin et nous dirige vers Dieu. C’est pourquoi l’amour de charité, non celui qui se résume à la passion amoureuse ou à une noble amitié, mais l’amour qui est Celui même du Christ, est tellement important dans le christianisme. Il est important au plan humain, bien sûr, mais il est une sorte de sacrement ou de prédication ; il nous montre Dieu, il nous parle de Dieu. C’est en voyant et en vivant un vrai amour humain empreint de l’amour de charité que nous commençons à comprendre Dieu.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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