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Progressivement seront mis en ligne ici des articles de fond et d'investigation essentiellement en liturgie, mais aussi en d'autres domaines de la vaste et passionnante discipline qu'est la théologie !

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samedi 19 septembre 2009

Homélie du 25ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 20 septembre 2009

Homélie prononcée en l'Abbaye Notre-Dame d'Altbronn

L’écoute de cette page d’évangile nous atteint certes, mais, pour ne pas nous sentir trop concernés, nous prenons avec humour et condescendance l’attitude carriériste des apôtres, nous voyons avec étonnement ou tendresse cet enfant érigé là en modèle. C’est vrai… ce que dit Jésus est vrai. Mais, nous, Seigneur, nous n’en sommes plus là ! Et pourtant…
Jésus, encore, annonce sa mort et sa résurrection. Nous recevons cette annonce comme un évènement extérieur, historique, comme quelque chose qui s’est passé un jour, il y a très longtemps.
Prenez garde ! Jésus ne dit pas : « Le Fils de l’Homme sera livré », mais bel et bien : « Le Fils de l’Homme est livré ». Des neuf annonces de la Passion dans les Evangiles, c’est la seule qui soit au présent de l’indicatif. Vertigineux présent, n’est-ce pas ? Concerne-t-il seulement le présent de Jésus et des apôtres, ce jour-là, ou concerne-t-il aussi le nôtre ?
Oui, frères et sœurs, à cette question toujours actuelle et à nous toujours adressée : « De quoi discutiez-vous en chemin ? », il nous faut nous souvenir de ce présent de l’évangile, il nous faut, enfin, toujours mieux nous disposer à accueillir le Christ.

I.- Le Fils de l’Homme est livré aujourd’hui.

Il n’en va pas d’un effet d’annonce, d’un effet de rhétorique, comme on sait en faire. Quand nous recevons la Parole de Dieu comme telle, quand elle nous rejoint dans la célébration liturgique, elle est pour nous présence du Christ vivant. Nous n’entendons pas un texte ; nous écoutons une Parole, celle vivante d’un Dieu à nos côtés. Quand Jésus parle dans l’évangile, c’est aujourd’hui que cette Parole nous rejoint. Ainsi quand il dit : « Le Fils de l’Homme est livré aux mains des hommes », c’est ici et maintenant que cela s’accomplit.
Christ en agonie jusqu’à la fin du monde, disait le philosophe Pascal. Aujourd’hui, toujours, continûment, le Christ est livré. Le Christ est livré au sarcasme quand on tue l’innocent. Le Christ est livré au massacre quand on tue l’innocent. Le Christ est livré à l’abandon quand on n’accueille pas l’enfant…
Est-il nécessaire de donner des exemples ? Pensez aux guerres fratricide, aux souffrances infligées de par le monde à des croyants à cause de leur foi… Il ne nous est pas difficile de croire que les souffrances de la Passion se prolongent, que la vie, la vie de Dieu, est en butte à la barbarie humaine, aux forces du mal et de la mort. Mais aujourd’hui, le Christ se remet en nos mains ; si les grâces de sa Résurrection nous sont acquises, il nous faut toujours œuvrer au cœur du monde, là où Dieu nous place, pour que son Règne d’amour et de paix progresse.

II.- « De quoi discutiez-vous en chemin ? »

L’annonce de la Passion de Jésus bouleverse certes les Apôtres mais ouvre pour eux une perspective d’avenir. S’il n’est plus là, qui prendra la place ? Qui est le plus grand, le plus digne, le plus capable ? Et tant qu’il est encore là, n’est-il pas temps d’asseoir son pouvoir de manière légitime vis-à-vis du reste de la bande ? Quel réflexe humain… Allez ! Avouons-le. Ils ne sont pas bien différents de nous.
Ne vous êtes-vous jamais pris à ce jeu malsain, que ce soit dans vos engagements religieux, communautaires, familiaux, professionnelles, associatifs, paroissiaux ? A quel moment dois-je me faire voir ? Quand dois-je crier le plus fort ? Comment consolider mon influence ? Et si j’avais encore un peu plus de pouvoir, de gloriole à mon actif ?
Sans aller jusque là, ne croyez-vous pas qu’on perde un temps fou, une énergie démesurée à se battre pour des détails, à créer ou entretenir des structures, à négocier des futilités, quand autour de nous règne la violence, la foi est attaquée, quand nous sommes confrontés à de vraies et profondes questions, comme celle du témoignage que nous pouvons donner autour de nous ? Saint Jacques nous le rappelle : « D’où viennent les guerres, d’où viennent les conflits entre vous ? N’est-ce pas justement de tous les instincts qui mènent leur combat en vous-mêmes ? […] Vous n’obtenez rien parce que vous ne priez pas. »

III.- Ce qui compte c’est d’accueillir le Christ.

La prière, en effet, quel plus beau moyen pour accueillir le Christ en vérité, c’est-à-dire en étant débarrassés de tous ces instincts qui nous entravent, qui nous paralysent. En priant, non en marchandant avec le bon Dieu, mais en nous ouvrant à sa volonté, nous nous mettons dans l’attitude de recevoir la sagesse qui vient de lui, elle qui est « droiture », « paix, tolérance, compréhension, pleine de miséricorde et féconde en bienfaits, sans partialité et sans hypocrisie ».
Et si nous devions avoir du mal à comprendre ce que cela signifie, Jésus appelle pour nous cet enfant, inconsidéré de la société juive d’alors, le met sous nos yeux et l’érige en modèle. Ne soyez pas comme cet enfant, ne restez pas enfant toute votre vie, mais comme lui, gardez cette innocence, cette spontanéité. N’ayez pas peur de vous en remettre à plus grand que vous pour exister ! Comme Jésus se reçoit du Père, et sait que tout pouvoir vient de lui en n’étant que service, il nous invite à l’accueillir, à ouvrir nos cœurs à cette Parole vivante qui ne cesse de s’accomplir ici et maintenant. Si nous arrivons à cette ouverture, à cette qualité d’accueil, alors, assurément, notre vie se focalisera plus sur l’essentiel que sur tous ces détails au demeurant bien contingents et futiles.

Puisse notre prière se purifier, puisse notre attention rester vive face aux grands enjeux de la foi, puisse notre vie servir, même modestement, aux progrès du Royaume ! Quand Jésus a annoncé qu’il lui faudrait mourir mais qu’au troisième jour il ressusciterait, les Apôtres ont eu peur de l’interroger parce qu’ils ne comprenaient pas, alors ils se sont rabattus sur de futiles plans de carrière ! N’ayons pas peur d’approfondir notre foi par tous les moyens mis à notre disposition. Plus on réfléchit sa foi, plus on la comprend, plus on l’estime, plus on en témoigne !

AMEN.

Michel Steinmetz †

samedi 12 septembre 2009

Homélie du 24ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 13 septembre 2009


Homélie prononcée en l'Abbaye Notre-Dame d'Altbronn, à Ergersheim



Depuis les premiers moments où des chrétiens se retrouvent pour la prière, ils utilisent des psaumes. Rien d’étonnant à cela puisque c’était là aussi la prière même de Jésus. Tout bon Juif connaît l’ensemble des 150 psaumes par cœur et sa prière en est ainsi tout naturellement enrichie. Il ne cherche pas ses mots, ne se demande pas comment prier Dieu : telle une langue maternelle les paroles de la Bible jaillissent spontanément. Nous savons aujourd’hui que dans les premiers siècles, il en était de même pour les chrétiens : ils connaissaient par cœur la totalité des psaumes, c’est du moins ce que nous rapporte Augustin. Ils y avaient recours dans les célébrations et, de la sorte, jaillissait unanime et spontané le chant de l’Eglise.
Les psaumes font appel à tous les sentiments humains : joie, peur, colère, confiance, doute, et que sais-je d’autres encore. Chacun peut s’y retrouver et retrouver son état d’âme du moment. Mais les psaumes sont aussi une prière : ce sont les mots que Dieu nous donne dans sa bonté pour pouvoir lui parler. Il nous rassure : rien de ce qui fait notre existence ne saurait être caché devant lui – même les moments où nous nous en prenons à lui ! –, rien de tout cela ne saurait être transformé par sa grâce.
Si, durant la célébration de l’eucharistie, nous pouvons chanter un psaume pendant la procession d’entrée ou celle de communion, il est un moment où le psaume est prévu par la liturgie : c’est en réponse à la première lecture. Quoi de plus beau que de pouvoir répondre à la Parole de Dieu avec nos mots, qui sont aussi les mots de Dieu ?

Je vous propose donc, brièvement, de méditer ensemble le beau psaume 114 de ce jour et d’y voir combien tout le message des lectures de la messe y trouve un écho.

J’aime le Seigneur :
il entend le cri de ma prière ;
il incline vers moi son oreille ;
toute ma vie, je l’invoquerai.


Si le psalmiste peut faire une telle déclaration d’amour, c’est bien parce qu’il a fait l’expérience de la proximité du Seigneur qui entend le cri de sa prière ; Isaïe aussi proclame : « Le Seigneur Dieu vient à mon secours… Il est proche celui qui me justifie ». Ce grand Dieu, comme dit l’Ancien Testament, est si bon au point de pencher l’oreille vers sa petite créature pour mieux l’entendre encore. Fort de cette confiance, le psalmiste n’hésite pas à dire qu’il passera sa vie à l’invoquer.

J’étais pris dans les filets de la mort,
j’éprouvais la tristesse et l’angoisse ;
j’ai invoqué le nom du Seigneur :
« Seigneur, je t’en prie, délivre-moi ! »


Nous sommes parfois enfermés dans des situations, pris dans des filets dont nous ne pouvons nous défaire. Pensez aux fauves qu’on capture ainsi. C’est le cas du Serviteur de Dieu dans la Livre d’Isaïe. Et ne croyez-vous pas que ce furent les sentiments et l’attitude de Jésus alors qu’il entrevoyait l’issue de sa mission comme sanctionnée par la mort ? Ne croyez-vous pas que ces paroles du psaume aient pu lui revenir au point d’en nourrir sa prière ? Assurément.

Le Seigneur est tendresse et pitié,
notre Dieu est tendresse.Le Seigneur défend les petits :
j’étais faible, il m’a sauvé.

« Pour vous, qui suis-je ? », demande Jésus. « Le Messie », « le Saint de Dieu », pouvons-nous répondre avec de belles formules bien huilées de catéchisme. Bien sûr, toutes ces réponses sont vraies. Mais sont-elles habitées de notre foi ? Car, quand le psalmiste affirme avec force que le Seigneur est tendresse et pitié, qu’Il défend les petits, il confesse sa foi mais une foi sous-tendue par une expérience personnelle : « j’étais faible, il m’a sauvé ». Il habite ces paroles ou plutôt il permet à Dieu de les habiter parce qu’il lui a fait une place dans sa vie et sa détresse.

Il a sauvé mon âme de la mort,
gardé mes pieds du faux pas.

Je marcherai en présence du Seigneur
sur la terre des vivants.


Expérience pascale que fait là le psalmiste ! Son âme est sauvée de la mort et, désormais, son avenir se conjugue avec la présence du Seigneur sur la terre des vivants. Mais peut-on ainsi marcher « en présence du Seigneur » au milieu de ses frères et sœurs en humanité sans rayonner de cette présence, sans témoigner de l’expérience ainsi vécue ? Le vrai langage de la foi, c’est l’acte de foi. Tu dis : « J’ai la foi » ? Moi je te dis : « Montre-moi les œuvres de ta foi ! ». N’est-ce pas cela qui distingue fondamentalement la foi des croyances ? « Celui qui n’agit pas, dit l’apôtre Jacques, sa foi est bel et bien morte ».

Cette invitation, cette nécessité, que dis-je ?, ce défi nous rejoint toutes et tous aujourd’hui. « Pour toi, qui suis-je ?, dit le Seigneur. Toi, baptisé, que dis-tu de moi ? Qu’est-ce que ta vie, ta charité, ton engagement proclament de moi ? Qu’est-ce qu’un observateur extérieur apprendrait de moi en te regardant ? Vis-tu de telle manière que ta vie soit inexplicable si Jésus n’est pas le Christ, le Fils du Dieu vivant ? Oui, marche en ma présence sur la terre des vivants ! ».

AMEN.

Michel Steinmetz †

jeudi 3 septembre 2009

Message à l’intention des paroissiens de Schiltigheim

Chers amis,

Pour des raisons diverses et variées, dont de calendrier, il ne m’a pas paru opportun de consentir à l’idée d’une célébration d’adieu, heureux aussi de n’avoir été que le « serviteur quelconque », selon la parole du Christ dans la parabole évangélique.
Voici que je suis nommé curé, comme vous le savez, et avant mon installation officielle le 18 octobre prochain, je travaille d’ores et déjà avec ceux qui seront mes collaborateurs les plus proches et en profite pour rencontrer les chrétiens engagés dans la vie de l’Eglise. Depuis cet été aussi, j’ai commencé à découvrir plus encore le service diocésain de liturgie, musique sacrée et art sacré et sa mission au cœur de notre Eglise diocésaine.
Alors que j’ai eu l’occasion de croiser l’un ou l’autre parmi vous au cours des dernières semaines, je ne souhaitais pas vous quitter sans pouvoir au moins vous adresser un message.
Je tiens du fond du cœur à rendre grâce et à remercier ceux qui m’auront témoigné leur amitié sincère et véritable depuis six ans maintenant, ceux qui m’auront soutenu de manière indéfectible dans les bons et les mauvais jours. J’aurais appris parmi vous que rester attaché au Christ, que la radicalité évangélique a un prix, qu’on paye parfois, mais que la Vérité rend toujours plus libre, comme le rapporte saint Jean dans son évangile. Ces convictions fortes ont parfois été mal comprises. Pour ceux qui auraient pu s’en trouver heurté ou blessé, j’en demande pardon.
Néanmoins, je demeure persuadé que suivre le Christ nous fait rejeter toute compromission et toute tiédeur. Ce chemin, jamais hypocrite, n’est pas évident, nous l’empruntons souvent de manière chaotique, mais nous demeurons dans la joie de savoir que le Christ, Maître et Seigneur de nos vies, toujours nous relève.
Je souhaite à chacun d’entre vous et à la communauté de paroisses que désormais vous formez d’entrer toujours plus dans l’intelligence du grand et beau mystère de la foi, d’oser vous laisser remettre en question, de vous ouvrir à l’autre, à celui qui vient d’ailleurs et de ne pas oublier, enfin, que l’Eglise est Eglise du Christ quand elle garde la vive conscience de la nécessité du témoignage et de la mission !
Avec ma prière, vous confiant toutes et tous, et spécialement vos malades à la bénédiction du Dieu vivant !

Michel STEINMETZ †