"Mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger ». Tellement plus facile à
dire qu’à vivre surtout lorsque nous avons l’impression que tout nous tombe
dessus, un peu « comme si le ciel nous tombait sur la tête » pour
reprendre l’expression de la tribu d’Astérix et Obélix. Mais nous n’avons pas
la chance de ces derniers : boire de la potion magique pour vaincre nos peurs,
sauf pour Obélix qui comme vous le savez, était tombé dedans quand il était
petit. Non, nous n’avons pas de potion, nous avons plus que cela : une foi, une
confiance en ce Dieu qui se révèle en Jésus Christ et qui nous affirme : « mon
joug est facile à porter et mon fardeau léger ».
Pourtant,
dans l’évangile, Jésus semble poser une condition. Cette expérience n’est
possible que pour celle et celui qui consent à l’attitude du petit et du simple.
Bien souvent, on a pu présenter le christianisme comme une spiritualité qui affectionne
la dépréciation de soi. C’est profondément faux, car il ne s’agit pas de se
dévaloriser. Se faire tout-petit ne s’oppose pas plus à la science, mais exige
une disposition du cœur qui reconnaît que tout vient de Dieu, tout est par Lui
et tout est pour Lui. De cette humilité, les contradicteurs de Jésus en
manquent au point qu’ils ont enfermé Dieu dans leurs certitudes abscondes au
lieu de jeter dans son infini leurs quêtes, voire même leurs doutes. Enfermés
sur eux-mêmes, ils en deviennent hermétiques à la grâce. Les irréductibles
Gaulois du village d’Astérix, eux, savent qu’ils ne sont rien sans leur potion
magique. Et si nous en faisions de même, en acceptant que, sans le Christ, nous
ne pouvons rien ?
Ainsi,
pourquoi Jésus dit-il qu’avec lui notre fardeau peut être allégé ? Très
simplement parce qu’avec Lui, c’est nous qui nous nous laissons porter. Je
pourrai utiliser deux images. Ou bien imaginez que vous portez quelque chose de
très lourd et que le Christ vient vous aider à porter cette charge : du
coup vous continuez certes de la porter, mais elle devient supportable. Ou
bien, et il faut aller jusque-là, vous vous imaginez maintenant que non
seulement le Christ vient porter le poids avec vous, mais qu’en plus, Il vous
charge, vous et ce fardeau, sur ses épaules à Lui et vous porte tout entier. Parce
que le Dieu que nous révèle Jésus et qui se révèle en lui ne reste sur la
touche du stade de nos luttes humaines. Le Christ s’engage aux côtés de chacun
de nous. Il ne reste pas extérieur, mais il se fait intime à nous-mêmes plus
que nous-même et plus que n’importe qui ne peut le faire. Et voilà pourquoi il
peut prendre sur lui nos fardeaux et nous aider à les porter. Voilà pourquoi il
est celui que nous devons invoquer et supplier, sans jamais désespérer. Ce que
personne d’autre n’est capable de faire, Lui peut le faire. Il le fait au point
de prendre sur lui nos souffrances, nos misères, notre trop-plein de cette vie.
Jésus est celui qui suggère de jeter en Dieu nos soucis : non pas les nier,
faire comme s’ils n’existaient pas, mais les jeter en lui, perdre l’illusion
que nous seuls pouvons sauver le monde et nous sauver avec. Jésus nous convie aussi
à la solidarité, il nous invite à porter nos fardeaux les uns des autres et
nous rendre participants de son œuvre.
En ce dimanche tout particulièrement, et comme un baume sur notre cœur, le Christ
nous redit qu’il prend soin de nous. Par sa Parole, il nous guérit ; par
son Pain, il nous nourrit ; par son Esprit, il nous vivifie. Alors, nous
appartenons au Christ et nous sommes enfin, comme l’exprime Paul,
« libérés de l’emprise de la chair (Rm 8, 9), c’est-à-dire ce qui s’oppose
à Dieu et conduit à la mort. Que repos pour nous, après l’accablement d’un
combat trop inégal pour notre faiblesse ! La force nous vient d’un roi
humble, pacifique, la victoire appartient à cet étonnant guerrier, sans arme et
sans armure, qu’évoquait le prophète Zacharie dans la première lecture.
Savourons donc dans la joie et la simplicité maintenant le repos qui nous offert dans le
Fils. C’est une véritable « recréation » en profondeur pour notre
cœur que nous sommes appelés à vivre en ces semaines d’été. Trouver en Christ
le repos : que nous soyons déjà en vacances ou pas, cette promesse du
Christ est la bienvenue en nos vies toujours surchargées.
AMEN.
Michel Steinmetz †