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samedi 29 décembre 2012

Homélie de la solennité de sainte Marie, Mère de Dieu - 1er janvier 2013


En ce premier jour de l’année, la liturgie fait résonner dans toute l’Église l’antique bénédiction sacerdotale, que nous avons écoutée dans la première lecture : « Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il se penche vers toi ! Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! » (Nb 6, 24-26). Triple vœu plein de lumière, qui provient de la répétition du nom de Dieu, le Seigneur, et de l’image de son visage. En effet, pour être bénis, il faut demeurer en présence de Dieu, recevoir sur soi son Nom et rester dans sa lumière.

C’est aussi l’expérience qu’ont fait les bergers de Bethléem, qui apparaissent encore dans l’évangile d’aujourd’hui. Ils ont fait l’expérience de demeurer en présence de Dieu, de sa bénédiction, non pas dans la salle d’un palais majestueux, devant un grand souverain, mais dans une étable, devant un « nouveau-né couché dans une mangeoire » (Lc 2, 16). C’est justement de cet enfant que rayonne une lumière nouvelle, qui resplendit dans l’obscurité de la nuit, comme nous pouvons le voir sur de nombreux tableaux qui représentent la Nativité du Christ. C’est de lui, désormais, que vient la bénédiction : de son nom – Jésus, qui signifie « Dieu sauve » – et de son visage humain, en qui Dieu, le tout-puissant Seigneur du ciel et de la terre, a voulu s’incarner, cacher sa gloire sous le voile de notre chair, pour nous révéler pleinement sa bonté (cf. Tt 3, 4).

La première à être comblée de cette bénédiction a été Marie, la vierge, épouse de Joseph, que Dieu a choisie dès le premier instant de son existence pour être la mère de son Fils fait homme. Elle est « bénie entre toutes les femmes » (Lc 1, 42) – comme la salue sainte Élisabeth. Toute sa vie est dans la lumière du Seigneur, dans le rayon d’action du nom et du visage de Dieu incarné en Jésus, le « fruit béni de son sein ». La Mère de Dieu est la première qui est bénie et elle est celle qui porte la bénédiction ; c’est la femme qui a accueilli Jésus en elle et qui lui a donné le jour pour toute la famille humaine. Marie est mère et modèle de l’Église qui accueille dans la foi la Parole divine et s’offre à Dieu comme « bonne terre » en qui Il peut continuer à accomplir son mystère de salut. Comme Marie, l’Église est médiatrice de la bénédiction de Dieu pour le monde : elle la reçoit en accueillant Jésus et la transmet en portant Jésus. Il est lui la miséricorde et la paix que le monde ne peut se donner de lui-même et dont il a besoin toujours, comme et plus que du pain.

Nous avons déjà, ou nous le ferons encore dans les heures et les jours à venir, échangé des vœux. C’est là une coutume, à laquelle toutes et tous doivent de plier, de bonne ou mauvaise grâce. Je ne vous cache pas que ces vœux me paraissent personnellement un peu stupides. Ils ne trouvent grâce à mes yeux que dans l’attention portée à l’autre et à un avenir que je lui souhaite riche de bonheur. Je vous invite aujourd’hui, en regard de ce que la liturgie nous invite à célébrer dans la lumière de Noël et de la Parole de Dieu que nous entendions, à transformer votre vœu en une bénédiction. Le vœu, expression louable d’un sentiment personnel – ce que je souhaite, moi, pour l’autre –, est appelé à devenir bénédiction, ou plutôt à se recevoir de la bénédiction. Ainsi, je ne suis plus moi-même à la manœuvre ; ce n’est pas moi qui, me ou vous, souhaite tel ou tel bonheur, tel ou tel bienfait, mais je me place moi-même, et vous place avec moi, sous le regard de Dieu. J’aspire à rester en Dieu et à me recevoir de ce qu’Il me donnera, au cœur des joies que je vivrai ou des peines que j’endurerai. Puissions-nous nous souvenir de cela en échangeant nos « vœux », comme on les appelle. Puissions-nous donc plutôt appeler les uns sur les autres la bénédiction de Dieu. Cette manière de faire montrera que nous faisons toute sa place au Seigneur, le Verbe fait chair, Dieu-avec-nous, bénédiction de Dieu pour nous, jusque dans la manière d’envisager cette année nouvelle.

Michel STEINMETZ †

Homélie des premières vêpres de la solennité de sainte Marie, Mère de Dieu - 31 décembre 2012

Premières vêpres de la solennité de sainte Marie, Mère de Dieu
Action de grâce pour l'année écoulée

Ce soir, une année s’achève alors que nous en attendons une nouvelle : avec l’anxiété, les désirs et les attentes de toujours. Si on pense à l’expérience de la vie, on demeure étonnés de ce qu’elle est brève et fugace. Quel sens pouvons-nous donner à nos jours ? Quel sens, en particulier, pouvons-nous donner aux jours de difficulté et de souffrance ? C’est une question qui traverse l’histoire et que chacun se pose à un moment ou un autre. Mais à cette question il y a une réponse : elle est écrite sur le visage d’un Enfant qui, il y a deux mille ans, est né à Bethléem et qui aujourd’hui est le Vivant, ressuscité de la mort pour toujours. Dans le tissu de l’humanité déchirée par les injustices et les méchancetés que nous aurons vécues nous-mêmes ou que les médias nous auront relayées durant l’année, fait irruption de manière surprenante la nouveauté joyeuse et libératrice du Christ Sauveur. Dans le mystère de son Incarnation et de sa naissance, Il nous fait contempler la bonté et la tendresse de Dieu. Dieu éternel est entré dans notre histoire et demeure présent de façon unique dans la personne de Jésus, son Fils fait homme, notre Sauveur, venu sur la terre pour renouveler radicalement l’humanité et la libérer du péché et de la mort, pour élever l’homme à la dignité de fils de Dieu. Noël ne rappelle pas seulement la réalisation historique de cette vérité qui nous concerne directement, mais, de façon mystérieuse et réelle, nous la donne de nouveau.

Il est suggestif, au crépuscule d’une année, d’écouter à nouveau l’annonce joyeuse que l’Apôtre Paul adressait aux Chrétiens de Galatie : « Lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils ; il est né d’une femme, il a été sous la domination de la loi de Moïse pour racheter ceux qui étaient sous la domination de la Loi et pour faire de nous des fils » (Ga 4, 4-5). Ces paroles rejoignent le cœur de l’histoire de tous et l’illuminent, ou mieux la sauvent, car depuis le jour de la Nativité du Seigneur la plénitude des temps est venue à nous. Donc il n’y a plus de place pour l’angoisse face au temps qui s’écoule et ne revient pas ; il y a maintenant la place pour une confiance illimitée en Dieu, dont nous savons être aimés, pour qui nous vivons et vers qui notre vie est orientée dans l’attente de son retour définitif. Depuis que le Sauveur est descendu du ciel, l’homme n’est plus esclave d’un temps qui passe sans un pourquoi, ou qui est marqué par la difficulté, la tristesse, la souffrance. L’homme est fils d’un Dieu qui est entré dans le temps pour racheter le temps du non-sens ou de la négativité et qui a racheté l’humanité tout entière, lui donnant comme nouvelle perspective de vie l’amour qui est éternel.

L’Église vit et professe cette vérité et entend la proclamer aujourd’hui encore avec une vigueur spirituelle renouvelée. Dans cette célébration nous avons des raisons spéciales de louer Dieu pour son mystère de salut, œuvrant dans le monde par le ministère ecclésial.

« Te Deum laudamus ! ». Nous te louons, Dieu ! L’Église nous suggère de ne pas finir l’année sans adresser au Seigneur notre remerciement pour tous ses bienfaits. C’est en Dieu que doit prendre fin notre dernière heure, la dernière heure du temps et de l’histoire. Oublier cette fin de notre vie signifierait tomber dans le vide, vivre sans aucun sens. C’est pourquoi l’Église met sur nos lèvres l’hymne antique du Te Deum. C’est une hymne pleine de la sagesse de nombreuses générations chrétiennes qui sentent le besoin d’orienter leur cœur vers le haut, conscientes que nous sommes tous entre les mains pleines de miséricorde du Seigneur.

« Te Deum laudamus ! ». C’est aussi ce que chante l’Église pour les merveilles que Dieu a opérées et opère en elle. Le cœur rempli de gratitude, nous nous disposons à franchir le seuil de 2013, nous rappelant que le Seigneur veille sur nous et nous protège. C’est à lui que nous voulons confier, ce soir, le monde entier. Remettons entre ses mains les drames de notre monde et offrons-lui aussi nos espérances pour un avenir meilleur. Déposons ces vœux dans les mains de Marie, la sainte Mère de Dieu.

Amen.

Michel STEINMETZ †

D’après l’homélie du pape Benoît XVI, 31 décembre 2011.

Homélie de la fête de la Sainte-Famille - 30 décembre 2012

A Noël, nous étions conviés à contempler l’Enfant de la crèche. Voici que nous retrouvons, quelques jours plus tard, l’adolescent, peut-être un peu impertinent, dans le faste du Temple de Jérusalem. Les choses vont vite… Et pourtant, il n’y a à voir là qu’un unique mystère de Noël. C’est au sein de sa famille humaine que Jésus se révèle en premier comme l’Envoyé du Père. « Comment se fait-il que vous m’ayez cherché ? Ne le saviez-vous pas ? C’est chez mon Père que je dois être ! », répond Jésus à ses parents angoissés au bout de trois jours de recherche. Jésus conçoit déjà, et expose, la place qu’il lui semble devoir tenir. Il est à sa place au Temple lorsqu’il interroge les docteurs de la Loi et converse avec eux. « Mon âme s’épuise à désirer les parvis du Seigneur ; mon cœur et ma chair sont un cri vers le Dieu vivant », chantait le psaume.
Il y a beaucoup à apprendre de Dieu dans l’humble famille de Nazareth. Le Pape Paul VI proposait de retenir de Nazareth trois leçons, parmi tant d’autres. Une leçon de silence, une leçon de vie familiale, une leçon de travail.

I.- Une leçon de silence.

Que le silence fait aujourd’hui défaut à notre monde ! Pouvons-nous encore rester en silence sans avoir l’impression d’un vide, d’un espace à combler ? Partout où nous allons, il y a du bruit, de la musique, au point même que nous n’écoutons plus rien. Nous ne faisons plus qu’entendre… Pourtant c’est du silence que naît la vie : silence avant la création du monde, silence de la nuit de Noël dans lequel ne retentit que mieux le chant des anges, silence du matin de Pâques qui laisse jaillir l’Alléluia de la victoire… Qu’il serait bon de redécouvrir le silence et de l’estimer, même au cœur de nos liturgies ! Dans nos familles, faire une place au silence ne veut pas dire qu’il faille taire les tensions ou les désaccords, qu’il faille les refouler. Le silence de Nazareth est un silence de recueillement, d’intériorité, « de disposition à écouter les bonnes inspirations et les paroles des vrais maîtres » (Paul VI). Ce silence est celui de certains couples dont un regard suffit à se faire comprendre de l’autre ; ce silence est celui qui préfère la paix aux conflits ; ce silence est celui de l’amour partagé… Il laisse advenir la Bonne Nouvelle de l’Evangile parce qu’il est d’abord attitude d’écoute, attitude spirituelle.

II.- Une leçon de vie familiale

« Que Nazareth nous enseigne ce qu’est la famille, sa communion d’amour, son austère et simple beauté, son caractère sacré et inviolable ; apprenons de Nazareth comment la formation qu’on y reçoit est douce et irremplaçable ; apprenons quel est son rôle, primordial sur le plan social », disait Paul VI. Nous pourrions aujourd’hui nous interroger sur le rôle essentiel de la famille au sein de notre société : quelle actualité pour ce discours, à l’heure où de plus en plus de familles sont éclatées, recomposés ? A l’heure encore où on projette de bafouer allègrement l’institution du mariage de manière législative. Bafouer le mariage, ce n’est pas seulement s’attaquer à une institution, c’est de manière pernicieuse nier la distinction fondamentale entre l’homme et la femme. Je me reçois comme un homme ou une femme, et je ne décide pas d’être homme ou femme.
La sainte famille de Jésus, Joseph et Marie demeurent à nos yeux comme un modèle et un exemple. Que le Fils de Dieu soit venu sur terre en grandissant « en sagesse et en taille sous le regard de Dieu et des hommes » au sein d’une famille n’est pas un hasard. La famille enfin, « lieu de rencontre de plusieurs générations qui s’aident mutuellement à acquérir une sagesse plus étendue et à harmoniser les droits des personnes avec les autres exigences de la vie sociale » constitue « le fondement de la société » ; je cite Vatican II, cette fois dans la Constitution Gaudium et Spes (N°52).

III.- Une leçon de travail.

Le foyer de Nazareth nous invite, dans un troisième et dernier temps, à considérer la noblesse et la dignité du travail humain. Il fait partie du lot de l’homme sur la terre. Faut-il le rappeler ? Faut-il rappeler, aussi, pour mémoire, le livre de la Genèse et l’injonction de Dieu à Adam ? Croire que l’on peut vivre sans travailler, même si cela fait de plus en plus partie des rêves, voire des fantasmes de certains, est un leurre. Cela se saurait. Et on comprend de tels rêves si le travail est uniquement considéré sous l’angle de l’obligation et du fardeau. Et s’il était parfois un lieu d’épanouissement personnel, un lieu où l’on veut vivre en chrétien, où l’on témoigne de sa foi dans l’attention aux autres et la défense des droits des personnes ?
La maison du charpentier nous demande de ne pas considérer letravail simplement comme un gagne-pain ou comme un lieu d’enrichissement. Il nous faut, comme chrétiens, rappeler avec force que « le travail ne peut avoir une fin en lui-même, mais que sa liberté et sa noblesse lui viennent, en plus de sa valeur économique, des valeurs qui le finalisent » (Paul VI), à la suite de Jésus, « le prophète des justes causes ».

Joseph et Marie n’ont eu de cesse de chercher Jésus, jusqu’à ce qu’ils le retrouvent. Puissions-nous être animés, en cette fête de la Sainte Famille, du même zèle afin de toujours chercher et promouvoir le respect de la famille. Cela passera, évidemment, par notre discours, par notre mobilisation dans les jours à venir, mais plus encore par notre présence chrétienne, donc aimante, à ceux qui souffrent et à ceux qui peinent sur ce chemin de vie.
Vous qui, aujourd’hui, cherchez Jésus avec angoisse et inquiétude, cherchez-le là où il réside : dans le Temple de l’Eglise, notre sainte famille, ou dans ce temple intérieur qu’est votre âme. C’est là que le Maître intérieur vous enseigne, subjuguant les petits maîtres de vos passions et de vos pensées confuses. Le troisième jour, sa voix de Ressuscité vous ouvrira une jeunesse nouvelle.

AMEN

Michel STEINMETZ †

dimanche 23 décembre 2012

Homélie de la messe du jour de la Nativité du Seigneur - 25 décembre 2012

Aujourd’hui nous célébrons la naissance d’un enfant il y a plus de deux mille ans. Quand nous célébrons notre propre anniversaire, nous nous rappelons que nous devenons plus vieux. Chaque année, inexorablement. Mais, à Noël, il ne viendrait à l’idée de personne de penser que Jésus est vieux. Nous nous réjouissons de ce que Dieu vient dans nos vies comme un enfant, un enfant tout juste né, à l’aube de sa vie. L’image traditionnelle de Dieu est celle d’un vieil homme aux cheveux blancs. Mais à Noël nous nous rappelons l’éternelle jeunesse de Dieu. « Un enfant nous est né, un Fils nous a été donné. »
Dieu est irrépressiblement jeune. Saint Augustin a écrit que c’est nous qui vieillissons mais que Dieu est toujours plus jeune que nous. Et la joie de Noël c’est que nous sommes invités, nous aussi, à partager la jeunesse de Dieu. « À tous ceux qui l’ont accueilli, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu ». Noël est bien la fête de notre rajeunissement.

Qu’est-ce que cela signifie ? Certes, à Noël, notre regard est toujours rajeuni par celui des plus jeunes, des enfants. Leur émerveillement appelle le nôtre en retour.
o Nous n’avons pu pour autant à devenir infantiles, au sens où nous nous réfugierions dans la religion comme pour échapper à la maturité adulte. Certains chrétiens donnent l’impression que nous n’avons pas à penser nous-mêmes parce que l’Église nous dira ce qu’il faut faire.
o Notre société cherche souvent une autre forme de rajeunissement, en refusant d’affronter les signes de l’âge. La chirurgie esthétique peut enlever les rides de notre visage. Nous pouvons chercher une jeunesse artificielle et terrible parce que nous avons peur de mourir. Mais cela non plus n’est pas un vrai rajeunissement.

Être un enfant de Dieu c’est être ouvert aux infinies possibilités de l’avenir. Le monde d’un enfant n’est pas fixé, ni figé. Être un enfant de Dieu, c’est avoir l’espoir d’un avenir qui se cache derrière nos rêves. « Absolument rien au monde ne tient, si ce n’est à cause de la petite fille Espérance ; à cause d’elle qui sans cesse commence, qui toujours promet, qui garantit tout, qui assure demain à aujourd’hui, cet après-midi à ce matin, la vie à la vie et même l’éternité au temps », écrit le poète Péguy. Être jeune, c’est espérer un avenir.

Aujourd’hui, quand nous célébrons la naissance de l’Enfant Jésus, nous nous réjouissons parce que, avec lui, chacun de nous a un avenir. Quand bien même les signes de notre vieillissement apparaissent, quand bien même cette vie semble passer, quand bien même, aux yeux du monde, les horizons sont bouchés, Dieu demeure éternellement  jeune pour nous ouvrir un avenir en Lui. Prenons garde quand le monde autour de nous tend à vieillir, non par son âge, mais dans son cœur et son intelligence. Ce monde, alors, pour certains volontairement débarrassé de Dieu, pour d’autres seulement en quête d'un Dieu que ces mêmes n’arrivent pas à nommer, ce monde croit trouver en lui-même les forces de son renouveau. Il s’érige en maître, en norme et en loi. Croyant promouvoir la liberté du sujet, il en fait un objet, captif des modes, des idéologies, des désirs désordonnés. Puisse le Christ-enfant, à travers nous, et les prises de position que nous aurons le courage d’avoir, rajeunir ce monde de son éternelle jeunesse et lui montrer sa proximité.

Noël nous rend jeunes si nous accueillons non seulement l’Enfant Jésus mais tous les enfants. Les enfants vont nous déranger. Ils vont faire du bruit quand nous voulons dormir, ils vont poser des questions auxquelles nous ne pouvons pas répondre, ils vont changer ce que nous sommes. Mais ils sont la promesse de l’avenir de Dieu. Nous devons laisser nos enfants être des jeunes et non pas de petits adultes, être des enfants profitant de la grâce d’un père et d’une mère. Laissons-les être jeunes !
Pour nous dont l’espérance repose sur un Nouveau-né dans une étable, que cet Enfant rende nos cœurs de nouveau jeunes et capables d’accueillir Dieu-tout-proche dans la grandeur de son mystère !

AMEN.

Michel STEINMETZ †

Homélie de la messe de la nuit de la Nativité du Seigneur - 25 décembre 2012

« Tu ne veux pas de ça, toi, un Dieu qui aime ? Tu préfères un Dieu qui gronde, les sourcils vengeurs, le front plissé, la foudre entre les mains ? Vous préférez tous ça, les hommes, un Père terrible, au lieu d’un Père qui aime... Et pourquoi vous aurais-je fait si ce n’était par amour ? Mais vous n’en voulez pas, de la tendresse de Dieu, vous ne voulez pas d’un Dieu qui pleure, qui souffre. Oh, oui, tu voudrais un Dieu devant qui on se prosterne mais pas un Dieu qui s’agenouille. »(1) C’est peut-être, désolé, le reproche que Dieu pourrait nous faire. Il arrive, c’est vrai, que lorsque nous sommes confrontés à l’expérience de la souffrance, de la maladie et de l’injustice, nous souhaitons retrouver un Dieu tout-puissant qui puisse agir et changer en un coup de baguette magique le cours des événements. Noël est là pour nous rappeler qu’il en va tout autrement.

Par l’événement de l’Incarnation, Dieu a choisi de s’agenouiller auprès de son humanité, de descendre tout bas au point de se lier à nous. Il souhaite pouvoir venir s’agenouiller auprès de nous pour nous prendre par la main. Il est avec nous. Mieux encore, il est en nous. Dieu s’est fait homme, non seulement « pour que l’homme devienne Dieu », écrivait au deuxième siècle saint Irénée de Lyon, mais aussi pour que le Père puisse se mettre à notre niveau. Malgré nos travers, Dieu aime profondément sa Création. Et comme le souligne depuis des siècles la théologie, Dieu n’avait pas besoin du péché de l’homme pour s’incarner. Il voulait montrer le chemin qui conduit à la vie. Dieu vient s’agenouiller auprès de nous. Il change tout ce que nous sommes par sa présence. Imaginez un instant que vous vous préparez une tisane. Que faites-vous ? Vous plongez dans l’eau de votre tasse ou de votre théière un sachet rempli d’herbes aromatiques. Que se passe-t-il ? L’eau, quasi instantanément, va changer. Ce qui était contenu dans le sachet va se diffuser et colorer votre eau. Plus vous laisserez ces herbes à infuser, plus votre eau en sera colorée et parfumée. Voilà le miracle de la nuit de Noël ! Dieu vient infuser en nous. Sa présence à nos côtés – si nous sommes hommes de bonne volonté pour l’accueillir – transforme radicalement notre existence. Telle l’eau ne pourra plus jamais redevenir ce qu’elle était auparavant, telle est notre humanité marquée à jamais de cette divine Présence.

Ce lien est la caractéristique de la vie humaine. Tout homme est être de relation, de liens à tisser, parce que Dieu lui-même ne l’abandonne pas mais fait alliance en point de se faire homme. « Le refus du lien humain, qui se répand toujours plus à cause d’une compréhension erronée de la liberté et de l’auto-réalisation […] signifie que l’homme demeure fermé sur lui-même et, en dernière analyse, conserve son propre moi pour lui-même, et ne le dépasse pas vraiment. Avec le refus de ce lien disparaissent aussi les figures fondamentales de l’existence humaine : le père, la mère, l’enfant, qui des dimensions essentielles de l’expérience du fait d’être une personne humaine tombent. » Voilà ce que rappelait le pape Benoît XVI, il y a quelques jours, lors de ses vœux à la Curie romaine.

Vivre Noël, c’est ne pas faire comme si Dieu n’était pas venu nous visiter, comme si ce monde pouvait tenir sans Lui. Il est seul capable de nous rendre libre. « Là où la liberté du faire devient la liberté de se faire soi-même, on parvient nécessairement à nier le Créateur... Et l’homme même, comme créature de Dieu, comme image de Dieu, est dégradé dans l’essence de son être », poursuivait le pape. Ce soir, osons ne pas nier Dieu. En regardant l’Enfant de la crèche, avec l’émerveillement qu’Il nous inspire, ne prétendons pas, avec orgueil, que notre monde peut se passer de Dieu.

« Lorsqu’un homme songe à son passé, il baisse les yeux vers la terre et, lorsqu’il songe à son avenir, il les lève vers le ciel », a dit le philosophe Aristote. Par l’événement de Noël, Dieu regarde la terre. Lui ne regarde pas vers un passé dépourvu d’avenir, il insuffle à l’homme la capacité de lever les yeux au ciel. Baissons les yeux, adorons l’Enfant de Bethléem ; levons les yeux, réjouissons-nous de l’espérance qu’Il met à portée de main.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

(1) E.-E. Schmitt, Le Visiteur, Paris : Actes-Sud, 1994, p. 53-54.

Voeux

samedi 22 décembre 2012

Homélie du 4ème dimanche de l'Avent (C) - 23 décembre 2012

C’est dans ce style affectueux et familier que nous pouvons découvrir l’épisode de la Visitation que Luc nous présente dans son évangile de l’enfance. Mais le récit est aussi porteur d’une réalité bien plus profonde. Dans cet épisode de la rencontre entre ces deux femmes, l’évangile s’efforce de dire la foi en Jésus, Messie promis et attendu depuis des siècles et Fils de Dieu dès le premier instant de sa conception ! Il est donc une « profession de foi » des premières communautés chrétiennes en la filiation divine de Jésus.

Dans les Litanies de la Sainte Vierge, récitées souvent à la suite du chapelet, dans cette série impressionnante de vocables par lesquels nous nous adressons à Marie, il y en a un qui nous fait dire : « Arche d’Alliance ». Que peut signifier ce titre éminemment poétique ? En regardant de plus près, on constate que le récit de la visitation est tissé d’allusions au transfert de l’Arche à Jérusalem par le roi David. L’Arche était ce coffret de bois précieux, muni de barres dorées pour le transporter, et qui contenait les tables de la Loi. Dieu lui-même avait donné ses commandements à Moïse qui les avait gravés sur des tables de pierre. Par le don de ces préceptes, Dieu faisait alliance avec son peuple. L’Arche contenait le témoignage de l’Alliance sacrée entre Dieu et Israël. Sur le couvercle de ce coffre, il y avait deux chérubins, sorte d’anges avec des ailes, entre lesquels reposait l’Esprit de Dieu, sa présence en cet espace.

Pendant longtemps, l’Arche séjourna à Silo sous une tente, comme c’était le cas dans le désert après la rencontre avec Dieu au Sinaï. David résolut de la ramener à Jérusalem pour la placer sur la colline de Sion. Au second livre de Samuel, on nous raconte que « David se leva et partit pour Baala en Juda pour en faire monter l’Arche de Dieu ». Dans la visitation, nous avons vu que « Marie se leva et partit dans la montagne vers une ville de Juda ». En peu plus loin, l’Arche monte en procession vers Jérusalem et on s’arrête à Edom dans la maison d’Aved. Celui-ci s’écrie : « Comment l’arche du Seigneur entre chez moi ? ». Dans la visitation, c’est Elisabeth qui s’étonne : « Comment ai-je cet honneur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » Ajoutons encore un autre rapprochement : la joie du peuple hébreu et celle de David dansant devant l’arche mise en parallèle avec celle d’Elisabeth et de Jean-Baptiste à l’approche de Marie. Notons également que l’Arche, montant à Jérusalem, s’arrête dans la maison d’Aved à Edom et y reste trois mois, comme Marie entre dans la maison de Zacharie et y reste trois mois.

L’auteur de la visitation a sans doute voulu marquer la continuité qui existe entre l’ancienne alliance et celle que le Messie Jésus va inaugurer. Ainsi la montée vers Jérusalem de l’Arche qui contenait les paroles de la Loi, trouve la plénitude de sa signification lorsque Marie, nouvelle Arche, portant en elle le Verbe fait chair, va vers la Judée dans la maison du prêtre Zacharie, celui qui officia dans le Temple. L’aboutissement s’accomplira parfaitement lorsque Jésus montera vers Jérusalem pour y être « élevé », sa mère se trouvant alors au pied de la croix.

Nous pouvons encore aller plus loin dans ce parallèle entre l’ancienne et la nouvelle Alliance. Marie qui porte le Christ est aussi figure de l’Eglise, porteuse de la Bonne Nouvelle de Dieu ! Or, comment Marie est-elle Arche d’Alliance ? Comment est-elle porteuse du Seigneur de l’univers ? Elisabeth nous en donne la réponse : « Heureuse celle qui a cru en l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur ! ». De la même manière, c’est la foi en l’accomplissement des promesses qui fait de l’Eglise le peuple porteur de la Parole d’Alliance nouvelle. Nous qui sommes l’Eglise aujourd’hui, ne sommes-nous pas par notre foi porteurs du message d’amour et d’alliance de notre Dieu pour notre monde ? Elisabeth, Marie : l’ancienne Alliance rencontre la nouvelle. Jean-Baptiste et Jésus : l’ancienne Alliance rend louange à la nouvelle. « Comment ai-je ce bonheur ? », s’écrie Elisabeth. Ce bonheur peut toujours être le nôtre en ce dimanche de l’Avent où nous nous éveillons à ce qui vient, à la venue prochaine d’un enfant, le Fils de Dieu !

AMEN.

Michel STEINMETZ †



samedi 15 décembre 2012

Homélie du 3ème dimanche de l'Avent (C) Gaudete - 16 décembre 2012

L’invitation à la joie chez Sophonie éclate dans un ciel bien sombre. Le prophète écrit dans le courant du VIIème siècle avant notre ère à une époque où l’Assyrie dominait toute la région d’une main « de bronze ». Cette domination militaire était doublée d’une domination culturelle : l’Assyrie était parvenue à réintroduire du polythéisme en Juda et en Israël. Beaucoup de Judéens, par réalisme, s’étaient rangés sous le modèle assyrien. Le livre de Sophonie se présente comme une suite d’imprécations, de condamnations, d’oracles contre les puissances étrangères, certes, mais aussi contre les collaborateurs de l’intérieur. L’extrait que nous venons d’entendre vient tout à la fin et est en rupture totale avec le reste du livret. Il s’adresse en fait au « reste d’Israël », le petit reste humble et fidèle, pauvre et faible. Il est une promesse, une vision.

Pour le christianisme, cette promesse est réalisée en Jésus-Christ, par sa naissance même. C’est pourquoi l’Eglise nous invite à nous réjouir de cette naissance que Sophonie appelait de ses vœux. Mais pour vivre cette joie, nous devons prendre conscience du renversement radical, de la rupture qu’introduit la présence de ce Seigneur Dieu, roi d’Israël, par rapport aux habitudes du « monde ». Les habitudes du « monde » du temps de Sophonie sont stigmatisées par lui-même dans son livret. Quelles sont ces « habitudes du monde » à notre époque, en contradiction avec le Royaume de Dieu ? Chaque génération doit refaire ce travail d’analyse et chaque chrétien doit le refaire pour lui-même. Nous ne pouvons pas nous laisser-aller, adopter le modèle ambiant de la société ni les modes idéologiques « pour être dans le vent ». Il nous est demandé « d’être en Jésus- Christ », comme le dit St Paul. Si nous gardons notre cœur et notre intelligence en Jésus-Christ, nous nous rendrons compte de la rupture et nous connaîtrons cette joie qu’entrevoyait Sophonie.

Cette joie n’est pas une affaire de ripailles, de flots de boisson. Cette joie est sérénité. Mais pas seulement une joie intérieure, privée, mais une sérénité qui puisse être connue par tous les hommes. D’où nous viendrait cette sérénité ? Alors que dans notre monde - comme à l’époque de Sophonie - tout est là pour nous agresser physiquement, moralement et spirituellement, il convient de « ne pas craindre », nous dit Sophonie, relayé par Paul. Dans leur bouche, il ne s’agit pas d’un pieux conseil d’autosuggestion psychologique. Il s’agit de se soustraire à certains mécanismes du monde pour qu’ils n’aient plus prise sur nous, qu’ils ne puissent plus être moyen de chantage, de nous faire faire ce à quoi une conscience chrétienne répugnerait. D’autres passages de la Bible nous parlent de la nécessaire crainte de Dieu, ce qui pourrait nous sembler contradictoire. Mais « craindre Dieu », ce n’est pas trembler toute la journée devant son crucifix, c’est, dans la ligne du texte de Sophonie, ne pas craindre ce qui n’est pas Dieu et se libérer donc de toutes les craintes du monde.

« Que devons-nous faire ? », la seule vrai question pratique posée au Précurseur par ceux qui viennent à lui pour recevoir le baptême. A chaque cas, Jean donne un conseil approprié. Cela est une première leçon pour nous : Jean le Baptiste ne propose pas de grands slogans ; il propose des conseils que chacun pourra mettre en œuvre. La teneur même de ces conseils est une autre leçon : les directives n’ont rien d’extraordinaire ni d’impossible. Jean ne propose pas quelque chose ; il indique Quelqu’un « de plus puissant », mieux à même de nous aider à lutter contre les puissances de ce monde. Car la vie éthique suivant la voie de Dieu est, - que nous le voulions ou pas - un combat : tout n’est pas égal ; il y a du bien, il y a du mal ; et il faut choisir ! Et pour faire ces choix difficiles, il faut être solide. Nous le serons si nous nous adossons à « plus puissant que nous ». Ayant trouvé nous-mêmes la sérénité et la joie dans la présence de Dieu, nous devrons encore apporter cette sérénité, cette « paix qui dépasse toute imagination » à tout notre entourage, à ce monde inquiet et tourmenté.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

samedi 8 décembre 2012

Homélie du 2ème dimanche de l'Avent (C) - 9 décembre 2012

« Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route ! ». Nous réentendons ces paroles familières de l’évangile et leur vigueur vient peut-être à se perdre par l’image que nous avons de celui qui les prononce. Jean-Baptiste, en effet, nous l’imaginons hirsute, révolutionnaire, en complet décalage avec son temps. Son aspect, son style de vie susciteraient la curiosité et expliqueraient sa popularité.

Pourtant l’évangéliste Luc reste sobre dans la description qu’il en fait. La voix de Jean résonne dans le temps des hommes, venant du désert, avec toute sa force.
Les paroles du Précurseur, reprenant les paroles anciennes d’Isaïe, résonnent finalement à chaque fois avec une étonnante actualité : « Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route » (Lc 3, 4). Il y dans les paroles de Jean une étonnante radicalité prophétique, une fraîcheur bousculant notre torpeur, une vivacité qui touche juste dans les faux-semblants. Elles sont appel à la conversion incessante pour ne pas se perdre en route ! Pour cela il faut aplanir la route et préparer le chemin du Seigneur.

Aplanir la route

Si provocantes qu’elles soient, les paroles de Jean ne sont pas surhumaines ou inhumaines. Voilà bien pourquoi Luc prend le soin de les situer dans l’histoire des hommes à grand renfort d’autorités : l’empereur Tibère, le gouverneur Ponce Pilate, le prince Hérode, les grands prêtres Anne et Caïphe…. Ces paroles sont ajustées à notre propre attente. Sans cesse Dieu travaille notre humanité pour nous faire accueillir le Christ. De manière imagée qu’il reprend lui-même au prophète Isaïe, Jean demande d’aplanir la route. Ce qu’il insigne comme tâche à accomplir, tâche ô combien difficile – il faut imaginer son auditeur au cœur du désert de Palestine –, de ravins à combler, de montagnes et de collines à abaisser, de routes à redessiner dans le sable, le prophète Baruc nous apprenait que c’est le propre de Dieu, que c’est là sa volonté. « Dieu a décidé que les hautes montages et les collines éternelles seront abaissées, et que les vallées seraient comblées ». Ce que nous pensions être de notre ressort, ce que nous pensions relever de notre propre moyen, nous comprenons qu’en fait c’est Dieu lui-même qui est à la manœuvre, c’est Lui qui permet à cette œuvre gigantesque de se réaliser.
Aplanissez la route, ou plutôt laissez Dieu vous conduire pour aplanir la route, pour sortir de vos impasses, pour abattre les murailles que vous construisez entre vous.

Préparer le chemin

Quel est ce chemin qu’annoncent à la fois Jean-Baptiste et Isaïe ? Dieu veut ouvrir un chemin de conversion. Il a l’initiative ; sans cesse il veut nous ramener à lui, et, pour cela, il est prêt à tout ! Notre attente ne peut et ne doit être passive, parce qu’à l’initiative, au don, à la grâce, notre réponse est de mise. Elle se révèle comme le chemin que Dieu trace dans nos vies pour nous faire marcher « sans trébucher vers le jour du Christ » (Ph 1, 10). Là encore, nous n’avons pas à inventer un chemin, comme certains aujourd’hui nous invitent au « développement personnel ». Il ne s’agit pas de partir de nous, comme si nous étions à la fois le point de départ et d’arrivée, enfermés dans nos suffisances et nos convoitises bassement humaines. Le chemin qu’il nous fait préparer, c’est le chemin de Dieu.
Or Jésus se présente lui-même comme « le chemin, la vérité et la vie ». Préparer son chemin, c’est faire en sorte que notre chemin rejoigne le sien. Hors de lui, pas de voie salutaire. Hors de lui, le désert de nos vies ne sera pas le lieu où retentira son appel, mais le lieu de notre mort parce que nous n’aurons pas choisi la route qui mène à Dieu en son Fils. Vous ne savez quel chemin prendre, ne vous perdez pas en tergiversations : suiviez l’unique chemin qui est le Christ.

A l’exemple de Paul, prions les uns pour les autres afin que « notre amour nous fasse progresser de plus en plus dans la connaissance vraie et la parfaite clairvoyance qui nous feront discerner ce qui est le plus important ».

AMEN.

Michel STEINMETZ †

samedi 1 décembre 2012

Homélie du 1er dimanche de l'Avent (C) - 2 décembre 2012

Nous sommes le premier dimanche de l’avent - le début de l’avent. Je pourrais prêcher pendant des heures sur l’histoire et la tradition de l’avent, la signification de Noël. Qu’est ce que cela va changer dans notre vie ? Mon homélie ne répondra jamais à la question : pourquoi la commémoration de la naissance de Jésus est importante pour vous personnellement ? Qu’est ce que la naissance de Jésus vous apporte personnellement ? Autrement dit, comment est-elle une bonne nouvelle pour vous ? Aucune homélie ne peut répondre à votre place, c’est trop personnel.

C’est vous qui donnez le sens à l’avent et à Noël, en analysant votre foi et votre relation avec Jésus, et pas moi. La vraie question pour chacun : suis-je chrétien à cause de ma culture, ou parce que dans la naissance de Jésus, dans sa vie et dans son enseignement je trouve quelque chose qui est essentiel pour moi et sans quoi je ne pourrais pas vivre ? C’est seulement après avoir répondu à cette question que je peux dire si la seconde venue du Christ, qu’on attend dans l’Eglise, a de l’importance pour moi. Il ne faut pas oublier que l’Eglise, en célébrant l’Avent, se préparer certes à célébrer Noël mais exprime surtout l’attente du Messie et aussi le désir ardent de sa deuxième venue. Mais si je ne sais pas pourquoi la naissance de Jésus est importante pour moi, son deuxième avènement n’a pas de sens.

Devant les perspectives d’avenir, aujourd’hui beaucoup de gens ont peur. Peur de perdre un emploi, de régresser dans l’échelle sociale, de disposer de moins de ressources pécuniaires. Peur d’aller au fond de soi-même et de découvrir la profondeur de nos attentes. Alors beaucoup se réfugient dans des déserts au silence assourdissant et au goût de paradis artificiel. Ils cherchent des petits bonheurs dans des à-côtés. La société de consommation invite d’ailleurs à acquérir toutes sortes de biens éphémères. Et le qu’en dira-t-on excite à suivre le mouvement afin de rester dans le vent. Et pourtant, elle se fait entendre aujourd’hui la voix de la promesse. Elle raisonne, claire comme le rire d’un enfant, lumineuse comme l’avenir dont il rêve : «Voici venir les jours où j’accomplirai la promesse de bonheur que j’ai adressée à la maison d’Israël et à la maison de Juda». Elle n’est pas facile à entendre surtout dans le tintamarre du monde, cette voix de l’espérance. Elle vient d’ailleurs, de l’au-delà de toute créature. C’est une Parole du Seigneur qui vient. Au moment où Jérémie la prononce, la situation de son pays est dramatique. Mais Dieu veut restaurer la confiance. Un monde, leur fait-il dire, s’en est allé, mais mon amour pour le peuple et mon pouvoir de créer sont intacts. Promesse de bonheur, adressée autrefois par le prophète à ceux qui étaient dans le malheur. Promesse de bonheur qui nous est adressée encore aujourd’hui par Dieu.

Si ces puissances du mal sont toujours présentes, elles ont déjà été définitivement ébranlées. Le jour du Seigneur, l’avènement du Fils de l’homme dont nous parle Luc dans l’évangile, c’est bien le matin lumineux de Pâques. C’est sa victoire sur toutes les forces de mort et du mal. C’est là le cœur de notre foi et le fondement de notre espérance. Nous attendons l’achèvement de ce qu’il a inauguré par sa résurrection. Aujourd’hui, il nous enseigne ce chemin qui nous prépare à sa venue, à son retour : « Restez éveillés et priez. Ainsi vous serez jugés dignes de paraître debout devant le Fils de l’homme. » La prière n’est pas un refuge pour les peureux ou pour les angoissés. Elle est une mise en présence confiante, une disposition d’un cœur prêt à écouter. Malgré les cris du monde, malgré ses paradoxes, malgré les voix de ceux qui semblent vous dire que tout est vain ou que tout se vaut, la Parole de Dieu ne cesse d’agir. Pour l’entendre, il vous faut vous arrêter, faire silence, écouter ce que Dieu vous dit.

Ce temps d’Avent nous est donné pour réfléchir et l’apôtre Paul nous invite à le faire dans la prière. Alors, je vous souhaite le désir de le faire.

AMEN.

Michel STEINMETZ †