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dimanche 23 septembre 2012

Homélie de la solennité de l'Assomption de la Vierge Marie - 15 août 2012

« Mon âme exalte le Seigneur ; Exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur. Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles : saint est son Nom. » (Lc 1, 46-55)

Nous aurions tort de comprendre ces mots qui nous sont si familiers comme une sorte d’improvisation où la Vierge Marie ferait des confidences sur son état d’esprit. Si vous regardiez attentivement votre bible, vous verriez dans la marge une colonne entière de références de citations de l’Ancien Testament. Le langage du Magnificat est totalement biblique. Et si vous en aviez le temps, il vaudrait la peine de relire dans la Bible ces différents passages et de découvrir pourquoi la Vierge Marie a retenu ces mots qui ne sont pas d’elle mais qui ont nourri sa prière.

C’est elle qui parle d’une manière très personnelle et pourtant c’est la Parole de Dieu qui est sa parole. Nous sommes à l’opposé de l’entreprise poétique quand nous cherchons à dire les choses et à traduire nos sentiments avec une expression neuve et originale. Marie représente le destin le plus singulier dans toute l’histoire de l’humanité, au centre de l’œuvre du salut. Or son langage est celui que Dieu lui-même a mis sur ses lèvres au jour unique de la Visitation et qu’il ne cesse de mettre sur les lèvres des croyants. Le « je » du Magnificat est celui de Marie. Et par le « je » de Marie, c’est toute l’histoire d’Israël qui nous est rappelée. Le « je » de Marie c’est le « je » de tous les croyants qui l’ont précédée. Mais, le « je » de Marie, c’est aussi le nôtre. Par sa bouche, c’est l’Eglise entière qui parle, l’Eglise concrète constituée « d’âge en âge », de « génération en génération » par ces hommes et ces femmes qui se sont succédés dans l’histoire et dont nous faisons partie. Quel bel idéal, quel noble objectif que d’aspirer à ce que nos paroles, celles que nous prononçons jour après jour, soient empreintes de la Parole de Dieu ! Quelle allégresse si nous arrivions à connaître assez profondément la Bible, parce que nous l’aurions assez lue et méditée, de sorte que nos paroles soient les paroles que Dieu lui-même met sur nos lèvres !

Qui a chanté ce chant du Magnificat ? Marie, une fois ou plusieurs fois, nous n’en savons rien. Mais combien plus, des milliards de fois plus, les générations successives de chrétiens qui ont pris ces mots, en ont reçu une lumière et ont trouvé le sens de leur vie dans ce mystère donné à chacun de nous en Marie. Le Magnificat, loin d’être une projection sur Marie toute seule, nous prend, avec Marie, dans le faisceau lumineux de l’histoire du salut et nous fait entrer dans notre vocation, alors même que nous rendons grâce à Dieu pour l’appel qu’elle a reçu et la grâce qui lui est faite, à elle, pour nous. Quand, à notre tour, nous reprenons donc ce cantique d’action de grâce, nous ne nous focalisons pas sur Marie. Bien au contraire, à travers elle, comme un spectre, comme si elle était des lunettes pour bien voir la foi, nous contemplons ce que Dieu ne cesse de faire en faveur de son peuple. Plus encore que de rester de simples spectateurs d’un si grand mystère, nous unissons notre pauvre voix à celle de tous qui « d’âge en âge » ont repris le Magnificat, de tous ceux qui l’ont vécu.

Enfin, lorsque Marie prononce ces paroles, elle porte Jésus en son sein. Le récit de la Visitation est cet extraordinaire dialogue sans paroles des deux enfants dans le sein de leur mère, enfants-prophètes qui tressaillent de joie l’un à l’égard de l’autre. Les merveilles que chante Marie, elles lui sont d’abord données, en sa chair et son cœur. Si Mari tressaille de joie, c’est parce que le Christ a fait sa demeure en elle. Elle le porte en son sein. Plus profondément encore, Marie vibre, consonne au Verbe fait chair. Sa parole devient celle de Dieu lui-même, à la fois parole humaine d’une mère dans l’attente joyeuse de son enfant à naître, et parole divine d’une croyante tout entière donnée à la volonté de Dieu. Le Magnificat propose à notre méditation et à notre adoration le plus extrême réalisme de l’Incarnation dans sa condition la plus secrète et la plus fragile. Il nous place devant la réalité charnelle, humaine du Verbe de Dieu fait homme : Dieu lui-même veut se rendre présent parmi nous en celle qui, en ce moment précis de l’histoire du salut, est « la Demeure de Dieu parmi les hommes » (Ap 21,3), figure de l’Eglise. Le « je » de Marie, c’est à la fois elle, Marie ; c’est la Parole de Dieu, l’histoire d’Israël, toute l’Eglise. Les merveilles que Dieu fait pour elle sont les merveilles qu’il fait pour nous et pour toute l’humanité appelée à la sainteté. Et ce « je » de Marie est totalement centré sur Dieu. Le sujet du verbe, c’est le Seigneur (« il fit », « il s’est penché »).

« Le Puissant fit pour moi des merveilles : saint est son Nom. »

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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