«
Dieu n’a pas fait la mort » : cette phrase toute simple, il nous est bon de la
réentendre avec force et espérance. « Dieu n’a pas fait la mort ». Dieu ne
prend aucun plaisir à vous finir ce qu’il a lui-même créé pour être comme lui :
éternel. Dieu ne prend aucun plaisir à voir les hommes s’entretuer, voire pire
encore à donner la mort en osant le faire en son nom. Tout cela nous permet de
constater simplement ceci : c’est, quand on aime Dieu au point de haïr son
frère, on peut être sûr que ce n’est pas Dieu qu’on aime. Quand on aime Dieu au
point de haïr son frère, c’est que l’on cherche le pouvoir, qu’on veut le
dominer, l’écraser, le détruire. C’est l’instinct de domination qui nous
emporte, et pas le désir de l’aimer comme enfant de Dieu.
Et
c’est cette conception révolutionnaire de Dieu que l’auteur du livre de la
Sagesse a voulu offrir à ses contemporains. C’est un des derniers livres de
l’Ancien Testament. La preuve, c’est qu’il écrit non pas en hébreu, mais en
grec. Son auteur est probablement un riche juif d’Alexandrie. Dans cette grande
ville portuaire du nord de l’Egypte, par où passe tout le grain récolté le long
du Nil, une haute bourgeoise commerçante s’est développée. On y parle grec, on
y lit les philosophes, on y discute de la vie et de la mort. Et voilà que ce
juif vient dire que la mort n’est pas une création divine. Cela a dû étonner
ses contemporains car, pour les Grecs comme pour les Romains, la vie est un
accident. C’est par hasard que la vie a surgi sur terre. C’est par malheur que
les hommes ont un corps et une existence terrestre car, au départ, il y avait
des étincelles divines, des étincelles intellectuelles, et ces étincelles sont
tombées dans le corps humain, dans la matière condamnée à pourrir et à périr.
Bien
plus, l’auteur du livre de la Sagesse s’adresse à des commerçants qui
pratiquent une concurrence féroce. Pour eux, comme pour beaucoup d’entre nous,
il faut grandir ou mourir, il faut se développer encore et toujours, ou bien
sombrer dans la faillite. Le monde antique ne connaît pas la pitié. Il ne
connaît que le succès. Il faut manger pour ne pas être dévoré, il faut détruire
pour survivre. Et c’est là que se pose toute la question de ce que nous avons
reçu. La vie que nous avons reçue, nous pouvons plus facilement la détruire que
la préserver. La santé que nous avons reçue, nous pouvons plus facilement la
détruire que la préserver. L’amour que nous avons reçu, nous pouvons plus
facilement le détruire que le faire grandir. Et c’est là toute l’horreur de
l’histoire de l’humanité. Les êtres humains ont broyé dans leurs mains les
cadeaux que Dieu leur a donnés. Comme un enfant gâté et jamais content,
l’humanité a souvent préféré inventer des engins de mort que des paroles de
vie. et c’est là tout le problème qui se pose à chacun d’entre nous : est-ce
que nous semons des paroles de vie ou des paroles de mort ? Est-ce que nous
apportons des paroles de résurrection ou des paroles de destruction ?
Et
c’est là qu’apparaît alors dans toute sa splendeur l’amour de Dieu pour chacun
d’entre nous. Non seulement il nous a apporté la vie, mais il nous a aussi
donné l’amour. Il n’a pas voulu nous laisser seuls dans un monde dur et
agressif. Il nous a apporté son Fils qui nous donne, qui nous redonne la vie.
Car cette pauvre femme qui perd son sang depuis tant d’années, n’est-elle pas
l’image de toutes nos illusions qui s’enfuient peu à peu au fil des ans et des
déceptions ? Et cette fillette qui meurt si jeune, n’est-elle pas l’image de
notre innocence pervertie par la cruauté de la vie professionnelle ? Et c’est
la surprise : Jésus sent qu’on l’a touché. Il est là, dans ces ruelles étroites
d’une petite ville, où tout le monde se bouscule et essaie d’avancer. Et Il
sent que quelqu’un l’a touché. Dieu est sensible aux belles prières, aux
prières pures qui s’approchent de lui avec une confiance tout enfantine. Et
Jésus se retourne et Jésus sauve.
Nous
aussi, nous pouvons nous approcher de Lui et Lui confier nos demandes, sans
craindre et sans trembler. Jésus attend de nous que nous ayons foi en Lui, c’est-à-dire
que sans hésitation mais du plus profonde notre cœur, nous croyons qu’Il peut
quelque chose pour nous. Alors Il se retournera vers nous et nous sauvera.
AMEN.
Michel Steinmetz †