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mercredi 18 janvier 2017

Homélie du 3ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 22 janvier 2017

L’hiver vous donne peut-être des envies de soleil. Les journées bien grises que nous venons de passer depuis un mois éveille en nous un appétit de lumière et de clarté. Des amis proches sont partis sur un coup de tête fêter la nouvelle année sous les cocotiers et, je dois bien l’avouer, cela a éveillé un moi une pointe de jalousie. Chercher le soleil : certains en font même leur raison de vivre. Travailler quasiment cinquante semaines dans l’année pour pouvoir s’offrir ces instants. Et nous connaissons les quelques migrations annuelles qui encombrent les routes, les gares et les aéroports. Telle est l’importance du soleil. Nous sommes des tournesols, nous cherchons le soleil, nous nous tournons vers la lumière, nous la suivons.
 
Le monde naturel est un symbole du spirituel. Si nous cherchons le soleil, source de lumière, de chaleur, de vie, nous avons aussi une vie spirituelle et nous cherchons une lumière spirituelle. Il ya bien des années maintenant, il y avait une chanson populaire « You are the sunshine of my life », « Tu es le soleil de ma vie ». Elle était composée par Stevie Wonder et reprise, rappelez-vous, par Sacha Distel. Plus récemment, elle a même servie à agrémenter une publicité. Stevie Wonder, lui, était aveugle, incapable de voir la lumière naturelle, mais il comprenait très bien qu’il avait besoin, comme nous tous, d’une lumière plus spirituelle, une lumière qui éclaire le sens de sa vie et qui l’aide à trouver, dans la vie, son propre chemin. Il croyait l’avoir trouvée dans la personne qu’il aimait et pour laquelle a écrit cette chanson ; c’est l’amour qui lui a ouvert les yeux et qui a permis à l’autre de le remplir de sa lumière. Il y a 2700 ans, le prophète Isaïe a compris, lui aussi, la nécessité de cette lumière spirituelle. Selon sa prophétie, que nous avons entendue dans la première lecture, cette lumière paraîtrait en Galilée.
Si, en Galilée, Pierre et André courent après Jésus, ce n’est pas parce qu’ils trouvent trop ennuyeuse leur vie de pêcheur ; si Jean et Jacques se tournent vers lui, quittent leur père pour le suivre, ce n’est pas parce qu’ils détestent leur père ; c’est parce qu’ils voient, tous les quatre, en lui le soleil spirituel, la lumière de vie. A la lumière de Jésus, ils voient les choses autrement. Il y avait dans leur vie une obscurité, dont ils n’étaient peut-être pas conscients ; maintenant, en voyant Jésus, ils voient plus clair, et ils le savent. En la personne de Jésus et en son enseignement, les quatre croient voir les choses telles qu’elles sont ; Jésus les éclaire, et ils croient arriver à une compréhension du monde et de leur vie dans le monde. Jésus est le « sunshine », le rayon de soleil de leur vie. Il éclaire d’une manière nouvelle leur être intérieur.
Voilà ce qu’ils croient. Mais est-ce qu’ils ont raison ? Ne se trompent-ils pas ? Il est très dangereux de suivre un homme, les hommes déçoivent, on peut tout perdre en les suivant. Notre siècle en est témoin. Des dictateurs, dont Hitler, ont attiré à eux des foules considérables par leurs discours enflammés. C’était une fausse lumière ; ils les ont fourvoyés. Leur amour a abouti très vite à une catastrophe totale, leur lumière s’est révélée obscurité.
Jésus, par contre, n’a pas fourvoyé les quatre premiers disciples. Ils n’ont pas été déçus. Oui, ils ont eu leurs difficultés, le moment de la passion de Jésus était un moment de ténèbres, il a semblé mettre fin à tout leur espoir. Mais, finalement, la résurrection et leur vie de disciple leur a montré que la lumière de Jésus n’était pas fausse, Jésus ne les avait pas trompés, leur amour n’était pas déçu. Jésus restait, comme ce premier jour-là en Galilée, le sunshine de leur vie. C’est pourquoi ils ont fait de leur mieux pour transmettre leur expérience, leur amour, aux autres, pour que les autres voient à leur tour cette lumière. Ils ont réussi, beaucoup d’autres ont pu voir en la personne de Jésus la lumière qu’ils cherchaient. Ce n’était pas une affaire de quelques années. La lumière de Jésus s’est révélée une vraie lumière, durable, éclairante, une lumière qui donne la vie, qui permet à chacun de suivre son propre chemin. Cette lumière est toujours là, Jésus peut être, si nous le voulons, le sunshine de notre vie.
 
AMEN.
 
 
Michel Steinmetz

samedi 14 janvier 2017

Homélie du 2ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 15 janvier 2017

Dimanche dernier, nous célébrions l’Epiphanie, la manifestation du Seigneur dans la visite des Mages. L’Enfant-Dieu révélé aux nations comme Sauveur. Aujourd’hui, nous méditons une autre désignation : celle faite par Jean-Baptiste : « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde... C’est de lui que j’ai dit : ‘Derrière moi vient un homme qui a sa place devant moi car avant moi, il était"’ . Je ne le connaissais pas, mais si je suis venu baptiser dans l’eau, c’est pour qu’il soit manifesté au peuple d’Israël. »
Jean a beaucoup prêché, il a admonesté les gens, les a exhortés à avouer leurs péchés et à se laver dans les eaux du Jourdain. Mais il en a fait très vite l’expérience : nulle prédication, nulle ablution ne peuvent changer l’être humain ! La puissance du péché est telle qu’elle ne peut être enlevée par ces moyens dérisoires. Jean reconnaît son échec de prophète mais il a reçu une révélation : Jésus, lui, et le seul, pourra accomplir l’impossible : parce qu’il a reçu l’Esprit et qu’il en est comblé. Il est Celui qui enlève le péché du monde.  
 
Voici l’agneau des bergers
Il y a bien longtemps – peut-être déjà quinze siècles avant le Christ – les bergers du Proche-Orient célébraient une certaine fête. Pendant les deux mois d’hiver, les troupeaux étaient enfermés à l’abri des pluies et des températures plus basses. La nuit de la première lune de printemps, marquant l’entrée dans une nouvelle année, les bergers se réunissaient. On immolait un agneau nouveau-né et, de son sang, on marquait les linteaux des portes en vue de chasser les mauvais esprits ; ensuite, sur la broche, et sans en avoir brisé les os, on rôtissait l’agneau et on le consommait avec des pains sans levain. Après ce repas, les bergers se saluaient et, chacun emmenant son troupeau, ils se dispersaient à la recherche des nouveaux pâturages et des sources à nouveau alimentées. On se retrouverait à la fin de l’été. Cette fête de l’agneau s’appelait Pessah - en français : passage, pâque.
Voici l’agneau des esclaves
Or, précisément, une certaine année, lors de cette fête de Pessah, Moïse parvint à faire sortir d’Egypte ses frères hébreux qui y étaient esclaves depuis des siècles. Là, on le sait, se situe l’événement fondateur d’Israël. Ce peuple confesse qu’il est né parce que, en cette nuit de Pessah, Dieu est intervenu afin de le libérer sans qu’il soit nécessaire de combattre. Pessah est la célébration de la libération : elle proclame pour toujours que Dieu prend le parti des pauvres contre les tyrans totalitaires. Il était donc impérieux qu’Israël n’oublie jamais cette nuit : c’est pourquoi les fils d’Israël prirent l’habitude de célébrer chaque année cette fête, d’immoler et de partager un agneau dont le sang avait permis l’exode, la sortie de prison des ancêtres et, du coup, cette mémoire était en même temps promesse que Yavhé, en Son Jour, procurerait la délivrance définitive de son peuple.
 
Voici l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde
A la suite de Jean-Baptiste, Jésus a d’abord beaucoup prêché et appelé les foules à la conversion. En bon Juif, chaque année, il a célébré la Pâque de son peuple. Alors que l’hostilité de la part des Autorités atteint son paroxysme, il monte à Jérusalem pour y célébrer la Pâque - conscient que l’étau allait se refermer sur lui. Et cette nuit-là, tout à coup, à la grande stupéfaction de ses disciples attablés, il « transfigure » le rite : il prend le pain, le bénit, le rompt et le leur donne en disant : « Prenez et mangez : ceci est mon corps » et il fit de même avec la coupe de vin : « Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance... ». Jésus se substitue à l’agneau pascal: il interprète son exécution - qui, il le sait, va avoir lieu dans quelques heures - comme un don de lui-même. Aucun sacrifice d’animal ne peut sauver l’humanité : seul le sang de Jésus, Fils de Dieu, - donc porteur d’amour infini - est capable de nous libérer de l’esclavage du péché et de nous combler de la Vie de l’Esprit, cet Esprit dont Jésus est plein. A la fin de son évangile, rapportant la mort de Jésus en croix au Golgotha, Jean racontera un curieux incident : le soldat, de sa lance, perce le côté de Jésus, il en sort de l’eau et du sang et le témoin, d’un ton solennel, écrit : « En effet tout cela est arrivé pour que s’accomplisse l’Ecriture : ‘Pas un de ses os ne sera brisé’ ».Effectivement le rite de l’ancienne pâque stipulait qu’il ne fallait pas briser les os de l’agneau (Exode 12, 46).
 
Voici l’agneau dans l’eucharistie
Extraordinaire évolution du rite pascal ! Ce qui fut d’abord une fête pastorale, un rite de passage qui visait la protection et la fécondité des troupeaux, était devenu, en Israël, la grande célébration de la libération du peuple de pauvres. Et voici, qu’avec Jésus, le rite a pris sa forme définitive et des proportions inédites : Jésus est l’Agneau pascal qui s’offre, qui donne sa vie afin que ses disciples (enfermés dans la nuit du péché, esclaves de leur faiblesse et de leur trahison) soient libérés et entrent dans le Royaume de Lumière, guidés désormais par l’Agneau devenu leur Berger.
 
Désormais faites attention quand le prêtre tend l’hostie et répète la phrase de Jean-Baptiste : « Voici l’Agena de Dieu qui enlève le péché du monde ! ». Regardez et croyez, mangez et espérez ! Vous êtes libres, membres du peuple de Dieu en route vers les pâturages éternels.
 
AMEN.
 
Michel Steinmetz

samedi 7 janvier 2017

Homélie de la solennité de l'Epiphanie du Seigneur - 8 janvier 2016

Selon Matthieu et Luc, c’est à Bethléem en Judée que Jésus naquit. Bethléem, c’est la ville où David reçut l’onction royale et c’est dans la famille de David que devait naître le Messie. C’est ce qu’annonce l’Ecriture, nous l’entendions, et aussi ce que mentionne le Talmud de Jérusalem : le Roi-messie devait naître à Bethléem de Juda, la ville royale.
Hérode est placé sur le trône de Jérusalem par les Romains. Il arrive au pouvoir après de sombres tractations diplomatiques et de sanglants massacres. Il est le jouet de l’occupant. Pour consolider sa souveraineté, il retire le pouvoir politique aux prêtres qui dirigeaient la Judée depuis le début de l’époque du Second Temple. Pour écarter toute rivalité politique susceptible de menacer son pouvoir, il fait même assassiner son épouse Mariamne et plusieurs de ses enfants. Mais sa réputation de cruauté est surtout due à un passage de l’évangile de Matthieu (2, 16-18). Selon celui-ci, les grands prêtres et les scribes du peuple avaient annoncé la naissance à Bethléem du « roi des Juifs », et Hérode, craignant un futur rival temporel, l’avait fait rechercher pour le mettre à mort. Les Mages devaient servir ce macabre projet s’ils n’avaient pas d’emblée compris au sinistre personnage à qui ils avaient à faire. Ils s’en retournèrent « par un autre chemin ». N’ayant pas trouvé l’enfant, Hérode ordonna la mise à mort de tous les enfants mâles de la bourgade âgés de moins de deux ans, espérant qu’il serait du nombre.
Dans les années de la naissance du Christ, Hérode, très curieusement, fait frapper des monnaies sur lesquelles il fait figurer deux choses : le diadème royal et une forme ressemblant à une croix. C’est là le signe qui correspondait au geste de l’onction : celle qu’on faisait normalement au roi, mais aussi au grand-prêtre.  Hérode aspire à la totalité du pouvoir. Politique et religieux. Comment pourrait-il supporter que même un enfant soit non seulement appelé à devenir roi des Juifs, mais soit né dans la ville désignée comme celle dans laquelle devait naître le Messie ?
 
Aujourd’hui, en cette fête de l’Epiphanie, nous célébrons la manifestation de Dieu, la manière dont Il se révèle en son mystère. En venant dans le monde, en étant reconnu comme Fils de Dieu par les mages. La haine et la violence d’Hérode à son égard sont aussi, et très paradoxalement, une reconnaissance de son identité. Le monarque fantoche, avide de son pouvoir, jaloux de ses prérogatives, comprend que cet enfant est d’une autorité qui dépasse toutes celles de ce monde. Les mages vont se prosterner et déverser le riche contenu de leurs coffrets : de l’or, de l’encens et de la myrrhe, présents prophétiques récapitulant là tout le mystère du Sauveur. Hérode, lui, ne prendra pas la route de Bethléem. Il enverra ses hordes armées pour faire couler le sang.
 
Aujourd’hui, dans notre monde qui se veut si « moderne », si civilisé, la barbarie continue de sévir. On estime le nombre de chrétiens tués à cause de leur foi depuis le début du XXème siècle supérieur à celui des premiers siècles, dits pourtant des « grandes persécutions ». Cette barbarie jadis circonscrite dans les arènes en déborde pour mieux nous happer et semer une terreur diffuse. Les chrétiens sont ainsi pourchassés à cause de leur foi, tout simplement parce qu’ils sont reconnus comme les « disciples » de ce Christ, insupportables à ceux qui veulent tout dominer.
 
Pourtant, avec joie et confiance, nous resterons rangés du côté des mages pour continuer d’offrir à l’Enfant de la crèche nos présents. Ceux de nos vies parfois chancelantes, hésitantes, incertaines, mais qui aspirent à la liberté promise aux enfants de Dieu. Nous reconnaîtrons en Lui l’unique Sauveur. Nous continuerons de croire « que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Evangile ».  Et nous regarderons la haine du monde, droit dans les yeux, celle de tous les Hérode des temps nouveaux, comme, aussi, une reconnaissance du mystère de Dieu.
 
AMEN.
                                                                                                                                                                                                                      
Michel Steinmetz