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dimanche 19 juillet 2015

samedi 11 juillet 2015

mercredi 1 juillet 2015

Homlie de la messe de la Vigile des Sts Pierre et Paul - 28 juin 2015

Après le déjeuner sur le bord du lac s’engage un dialogue de sourd entre le Ressuscité et le chef des Apôtres. Jésus pose par trois fois cette question à Pierre : « M’aimes-tu ? » et, à chaque fois, Pierre y répond par l’affirmative. A se pencher sur le texte grec, on s’aperçoit que les deux, néanmoins, n’emploient pas les mêmes termes. Jésus parle d’ ̉αγαπή, l’amour chrétien de charité, l’amour dont Dieu nous aime, tandis que Pierre lui répond : φιλέω, « je t’aime » d’un amour courant, humain, faible et limité. Jésus pose la question une deuxième fois, pensant sans doute que Pierre comprendrait enfin. Rien n’y fait. Alors pour la troisième fois, Jésus repose la même question mais change de terme : il emploie le verbe que Pierre ne cesse d’utiliser. Jésus se met au niveau du chef des Apôtres, il le prend là où il en est. Car sans doute, n’est-il pas encore arrivé à ce stade de l’amour parfait, sans doute, n’a-t-il pas encore atteint ce degré de foi… Peu importe. Jésus n’appelle pas à sa suite un parfait : il choisit cet homme, celui-là même qui l’a renié, et qui, quelques jours plus tard, n’est pas encore en mesure de dire et de vivre cet amour du Christ mourant librement sur la Croix. On comprend mieux alors les paroles de Jésus sur la vieillesse de l’apôtre. Il arrivera un jour où on l’emmènera là où il ne souhaite pas aller…
Le premier des disciples n’a donc pas été choisi sur ses seules qualités. L’évangile ne cherche pas à masquer ses erreurs. Il en sera de même pour l’appel de Paul, ardent persécuteur des chrétiens, comme il le confesse lui-même. Les compétences, les prédispositions, les charismes personnels, pour importants qu’ils soient, ne font donc pas oublier les insuffisances. Des failles sont perceptibles. Autrement dit l’expérience passée de ses limites et celle du péché ne sont pas forcément un obstacle à l’appel du Christ. L’entretien d’embauche que Jésus fait subir à Pierre ne porte pas sur un bilan de ses qualités et de ses défauts, mais sur la plus essentielle des conditions : « m’aimes-tu ? »… Et de fait, on aurait beau avoir tous les atouts, la technique et l’astuce, le sens du discernement et l’efficacité, s’il manque cette amitié profonde, vraie et fidèle pour le Christ ressuscité, comment le disciple pourrait-il donner sa vie ?
 
C'est sur cette faiblesse de Pierre, faiblesse transcendée dans la force de l’amour du Christ, que s’édifie l’Eglise. Sainte Eglise de pauvres pécheurs, pour reprendre l’expression du Père Congar. Les Apôtres ont peiné toute la nuit sans rien prendre. On n’imagine sans trop de peine leur découragement. Et pour cause… Nous aussi, nous souffrons de voir les filets vides remonter à la surface, nous peinons à annoncer l’Evangile… Il faut peut-être alors garder en mémoire, la mémoire du cœur, l’épisode des Actes des Apôtres qui nous raconte la rencontre entre Pierre et l’infirme de naissance à la Belle-Porte du Temple. « De l’argent et de l’or, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus Christ le Nazaréen, lève-toi et marche. » Trop souvent, je crois, nous voulons donner ce que nous ne possédons pas, ce que nous ne sommes pas et nous en oublions de donner, d’annoncer le bien le plus précieux qui est le nôtre : l’amour du Christ pour le pécheur que nous sommes. « Au nom de Jésus-Christ », toi aussi, laisse-toi aimer, laisse-toi remettre debout, laisse-toi guérir.
 
Face à ce qui peut générer en nous doute et scepticisme, découragement et fatigue, lassitude et acédie, nous devons nous souvenir de la question de Jésus : « m’aimes-tu ? ». Es-tu prêt à me suivre jusqu’au bout dans le don sans réserve de ce que tu es ? Es-tu prêt à aller là où tu ne voudrais pas aller ? La réponse de Pierre est la seule qui vaille : une réponse généreuse, fondée dans l’assurance que le Seigneur ne nous abandonnera pas jusqu’au dernier instant. C’est encore cette réponse de notre part qui rendra témoignage à l’amour de Dieu. Elle sera insupportable pour certains, mais pour beaucoup elle ouvrira les cœurs, comme elle ne cesse de la faire depuis les temps apostoliques. Ne cessons pas dire, avec toute l’Eglise, et malgré notre lâcheté : « Oui, Seigneur, toi tu sais tout : tu sais bien que je t’aime ». Tout le reste est négligeable face à cela.
 
AMEN.
 
Michel Steinmetz