« Quiconque s’élève sera abaissé ; et celui qui s’abaisse
sera élevé ». Lc 14,11
C’est à l’occasion d’un repas auquel il est
invité que Jésus fait cette remarque qui est aussi une règle de vie. On se
battait manifestement pour les places d’honneur. Nous connaissons cela en bien
des circonstances : qui doit s’asseoir au premier rang ? Qui est la
personnalité de marque ? Il y a toujours quelque chose de pénible et d’un
peu ridicule dans ces préséances. « Etre vu de tous », arriver de
manière à ce que tous les regards convergent sur vous !
Mais est-ce que cela fonctionne si on n’essaie
pas de passer un peu devant les autres ? Est-ce que la règle de Jésus peut
s’appliquer dans la vie ? SI tu t’assieds derrière dès le début, est-ce qu’on
ne finit pas par t’oublier ? L’enseignement de Jésus est important parce
qu’il concerne l’humilité. Ne fais pas l’important ! Ne te mets pas en
avant ! Reste modeste ! Peut-être que l’hôte viendra te dire : « Mon
ami, monte plus haut ». Il est certain que Jésus a raison : « Alors
il y aura pour toi l’honneur devant tous les autres convives ».
Est-ce ainsi dans la vie ? C’est mieux,
bien sûr, si on n’a pas à jouer des coudes pour faire carrière, réussir, ou
monter en grade. C’est bon signe d’être reconnu pour ses qualités et ses compétences
et, ainsi, de monter plus haut. Mais ne faut-il pas y mettre aussi du sien ?
N’a-t-on pas le droit de rechercher le succès et l’avancement ? Jésus
condamne-t-il toute ambition ?
Que désirent les bons parents pour leurs
enfants ? Qu’ils arrivent à quelque chose dans la vie, mais peuvent-ils y
parvenir si on leur a toujours appris à se mettre derrière ? D’ailleurs,
que veut dire « arriver à quelque chose » ? Est-ce gagner beaucoup
d’argent ? Devenir puissant ? Bien élever un enfant, c’est d’abord l’aider
à devenir quelqu’un de bon. Ce n’est pas le succès qui compte en premier lieu,
c’est la valeur, le savoir-faire, et plus encore le savoir-être. A quoi sert
une ascension rapide, si derrière il n’y a pas un bon caractère, une réelle
compétence ?
Jésus invite à la modestie, pas à l’incompétence.
Il ne dissuade pas d’avoir du succès, il conseille de ne pas faire l’important.
En tant qu’artisan menuisier, il savait bien que la clé de la réussite est le
bon travail, fait avec honnêteté. Ce qu’on apprécie à la longue n’est pas le paraitre,
mais la manière d’être, non pas ce que quelqu’un aimerait bien être, mais ce qu’il
est vraiment en tant qu’individu.
Il est vrai que ce qui compte à première vue, dans le monde, c’est l’éclat, la
considération. Mais peu à peu c’est la véritable qualité de cœur qui gagne l’approbation,
la réelle compétence, l’honnêteté de la personne. Et elle se manifeste aussi dans
une manière de situer qui apporte, parce qu’elle est vraie et sincère, plus de
joie que toutes les premières places.
Jésus va encore plus loin. Sa parole ne
rejoint pas que l’invité, mais aussi l’hôte, celui qui invite et offre l’hospitalité.
Ce dernier n’a pas à calculer qui il serait judicieux d’avoir à sa table pour
progresser socialement. Une personne célèbre, riche ou influente dont la
fréquentation rejaillira en bénéfices divers et variés. Jésus dit : si toi
aussi tu invites, que ton attention aille d’abord vers les pauvres et ceux qui
sont rejetés et exclus de tous, car ils sont les préférés de Dieu. Ici, nul
calcul pour servir une ambition personnelle. La seule ambition sera de faire
comme Dieu, avec Lui et pour Lui. Accueillir ceux dont personne ne veut pour
les faire « monter plus haut ». Cette parole de Jésus, je crois, nous
interpelle tous, nous bouleverse tous. Nous aimons nous mettre dans la peau de
celui à qui on pourrait faire un honneur. Nous oublions souvent de faire
honneur. « Heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour :
cela te sera rendu à la résurrection des justes ».
AMEN.