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Progressivement seront mis en ligne ici des articles de fond et d'investigation essentiellement en liturgie, mais aussi en d'autres domaines de la vaste et passionnante discipline qu'est la théologie !

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samedi 17 novembre 2018

Homélie du 33ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 18 novembre 2018

Quand Jésus parle de la venue du Fils de l’Homme, il rejoint des prophéties anciennes dont nous avons entendu quelques extraits dans le livre de Daniel. Il rejoint surtout l’attente profonde et l’espérance d’Israël qui aspire à la délivrance qu’apportera cette venue du Fils de l’Homme. Jésus évoque des bouleversements dans l’histoire des hommes et dans l’équilibre de l’univers : les étoiles tomberont du ciel, le soleil s’obscurcira… Tous ces phénomènes étaient associés habituellement à la fin du monde et au temps du jugement. Mais le Christ n’évoque pas son retour glorieux pour satisfaire la curiosité récurrente qui cherche à connaître le moment de la fin des temps. Il nous prévient que nul ne connaît le jour et l’heure de son retour « pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils mais seulement le Père » (Mc 13, 32). Pour être tout à fait honnête, il faut reconnaître que derrière cette question de l’avenir du monde que nous portons plus ou moins confusément mais qui ne nous empêche pas de dormir, il y a celle de notre avenir personnel qui lui nous intéresse vivement ! Quel sera mon avenir ? Comment s’achèvera ma vie ? Le monde dans lequel je suis, celui je connais et auquel je suis accoutumé a-t-il un avenir ou bien sera-t-il détruit, dispersé et réduit à néant à un moment que nous ne prévoyons pas ?
 
La révélation biblique et évangélique n’essaye pas d’apporter une réponse à cette question, mais elle nous permet de nous préparer à cet événement, non pas en le rejetant dans un avenir indéterminé mais en le plaçant dans l’aujourd’hui de nos existences. Quand Jésus dit : « En vérité je vous le dis cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive » (Mc 13, 30), il ne cherche pas à nous dire que la fin des temps est pour aujourd’hui ou pour demain, mais il veut nous aider à entrer dans une manière d’appréhender le temps qui ne nous est pas familière. En effet, nous comprenons le temps et l’histoire comme une succession d’époques qui viennent après d’autres époques. Mais Dieu n’est pas dans le temps. Il vit les choses dans un éternel présent qui saisit l’ensemble du temps depuis la création du monde jusqu’au retour du Fils. On peut dire que nous nous représentons l’histoire comme une ligne tandis que Dieu la voit comme un point. Dès lors, dans notre approche du temps nous pensons toujours passé, présent et avenir, tandis que Dieu réalise tout dans un même présent. Si bien que le retour du Christ à la fin des temps qui marquera la clôture de l’histoire humaine - la fin de la ligne, comme la création en avait marqué le début-, est dans l’aujourd’hui de Dieu. Le Christ peut dire en réalité : « cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive » (Mc 13, 30), non pas parce que nous aurions atteint l’extrémité finale de la ligne du temps mais parce que par l’irruption du Christ dans l’histoire des hommes, nous entrons d’une certaine façon dans cet éternel présent. La venue du Fils dans le monde n’est pas circonscrite à des moments particuliers. Elle s’accomplit dans la totalité de l’histoire. Aujourd’hui déjà, maintenant, Jésus est présent, vivant et agissant pour nous.
 
L’Ecriture nous parle de signes extraordinaires qui annonceront le retour du Christ : une terrible détresse, le soleil qui s’obscurcit, la lune qui perd son éclat, etc. Nous n’avons pas besoin de chercher beaucoup pour trouver dans l’histoire humaine des bouleversements comparables, qu’il s’agisse de phénomènes naturels ou d’évènements historiques liés aux peuples et aux hommes. Oui, les signes du retour du Christ nous sont donnés, mais encore faut-il les voir et ne pas les ignorer, pour les comprendre, les interpréter, et en tirer profit. Puisque les événements que nous vivons marquent déjà les signes du retour du Christ, notre génération est invitée à comprendre que nous devrons rendre compte non pas de ce qui se passera à la fin des temps, mais de ce qui se passe aujourd’hui. Comment vivons-nous ? Comment agissons-nous dans le moment présent ? Quel sens donnons-nous aux événements ? Comment les lisons-nous à la lumière de la foi et de l’Ecriture ? Accueillons-nous ces événements comme les signes avant-coureurs de la rencontre ultime avec notre Créateur ou bien les vivons-nous simplement comme des péripéties accidentelles de l’histoire ? Sont-ils pour nous un appel à la conversion ou simplement un motif pour se cacher et pour attendre ?
 
 
AMEN.
                                                                                                                                                                                                                      
Michel Steinmetz

samedi 10 novembre 2018

Homélie du 32ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 11 novembre 2018

Á mesure que nous approchons de la fin de l’année liturgique, l’évangile de saint Marc s’approche naturellement aussi de la fin du ministère public de Jésus. Dimanche dernier l’évangile évoquait la figure de ce scribe qui avait demandé à Jésus quel était le plus grand commandement. Nous comprenons à travers cette question comme à travers l’offrande de la veuve aujourd’hui, que l’évangile veut, d’une certaine façon, mettre en évidence ce qui constitue le cœur de la démarche du croyant.
 
L’essentiel est quelquefois plus facile à dire qu’à identifier et à mettre en œuvre ! L’épisode de l’offrande de la veuve au Temple est éclairé par la rencontre de la veuve de Sarepta qui faisait l’objet de la première lecture. Elie lui demande de sacrifier tout ce qu’elle a pour vivre. Il lui reste juste de quoi faire un pain en attendant de mourir. Elie le lui demande en promettant que Dieu l’assistera autant que nécessaire. Dans le passage d’évangile, la veuve dans le Temple vient apporter au trésor sa très modeste offrande. Il est probable qu’elle accomplit ce geste en présence d’un certain nombre de témoins et de scribes qui paradent devant les autres, en la jugeant de façon sévère, puisqu’elle n’apporte pas le dixième ou le centième de ce qu’eux-mêmes ont donné, alors que leurs richesses se constituent en dévorant le bien des veuves. Ou pour dire les choses autrement : l’accueil de la différence leur est insupportable car ils ne supportent que ce qui est à l’image de ce qu’ils ont érigé en normalité.
 
Cette présentation de l’offrande de la veuve dans le tronc du trésor concentre notre regard sur cette question : que sommes-nous appelés à donner ? Non pas d’abord de manière financière, mais personnelle. Donner de nous-même, de notre vie. Nous devons bien constater que très souvent notre réponse à l’appel de Dieu se situe dans ce que l’évangile appelle le superflu, ce qui relève, pourrions-nous dire aujourd’hui, de la culture du loisir. Dans notre vie, quand nous nous sommes occupés des choses « importantes » comme le travail, l’économie, la gestion de nos biens, la réussite de notre famille, l’aide que nous pouvons apporter aux uns ou aux autres, etc., quelle place reste-t-il à Dieu ?
 
Il y a un moyen très simple de repérer ce qui se passe dans notre vie : c’est de regarder la manière dont nous utilisons notre temps. Quel temps réservons-nous pour le Seigneur ? Vous qui êtes ici vous pouvez déjà dire que vous avez réservé pour Lui le temps de la messe du dimanche ! Mais il y a beaucoup de chrétiens qui n’ont pas cette possibilité ou bien parce que malheureusement ils ont du mal à avoir l’eucharistie, en raison de la pénurie des prêtres – Dieu merci, ce n’est pas notre cas ! –  ou bien parce qu’ils ont d’autres choses à faire beaucoup plus importantes, et donc cette activité considérée comme accessoire, ou « de loisir » passe après ! Comment peut-on dire que le Seigneur est le centre de notre vie alors qu’il est logé à la périphérie ? Quelle est notre capacité à préserver un temps honnête et juste pour entretenir notre relation avec Dieu ?
 
Si l’Église nous invite à prier chaque jour, matin et soir, c’est pour nous aider à exprimer d’une façon consciente le sens que nous voulons donner à tout ce que nous vivons. C’est à travers cet engagement du cœur que l’on donne tout à Dieu, que l’on donne le sens de notre communion à la volonté de Dieu dans nos activités quotidiennes. Ainsi, notre vie de chrétien, à travers les activités normales d’une existence humaine, va prendre le sens d’une offrande réelle, d’un sacrifice véritable offert à Dieu et en conséquence, nous les vivrons autrement.
 
La véritable foi, c’est de croire que c’est par Dieu que nous vivons, c’est pour Dieu que nous vivons, c’est grâce à Dieu que nous vivons, quoique nous fassions comme nous le dit saint Paul : « Tout ce que vous faites : manger, boire, ou n’importe quoi d’autre, faites-le pour la gloire de Dieu » (1 Co 10, 31). Amen.
 
AMEN.
 
 
Michel Steinmetz  

samedi 3 novembre 2018

Homélie du 31ème dimanche du Temps ordinaire (B) - 4 novembre 2018

Le Seigneur Jésus-Christ est entré à Jérusalem pour la dernière étape de son ministère public. Il enseigne dans le Temple et des scribes et des pharisiens viennent lui poser des questions. Certains souhaitent le mettre à l’épreuve, d’autres cherchent à approfondir ce qu’ils savent de son enseignement. L’Évangile de Marc ne nous dit pas dans laquelle de ces catégories se situe le scribe qui l’interroge, mais la manière dont il répond à Jésus et la conclusion du dialogue indiquent que sa remarque est judicieuse et qu’il n’est « pas loin du Royaume. »
 
Le scribe cherche ce qui est l’essentiel de la foi : le premier commandement. Certains courants du judaïsme contemporains de Jésus, pour être sûrs de leur justice, multipliaient les commandements à l’infini et finissaient par transformer la Loi donnée par Dieu comme signe de libération en un carcan insupportable, même pour leur propre conduite. Nous avons facilement tendance à condamner cet excès de légalisme. Même si nous oublions trop souvent que ce risque nous guette, nous aussi. La recherche continuelle de ce qui est imposé ou interdit, l’appel à des règles minutieuses, peuvent devenir le symptôme de notre crainte ou de notre incapacité à affronter le risque de la liberté. Un code de la route, même si on ne le respecte pas toujours, est moins exigeant pour notre liberté que la vertu de prudence qui nous incombe.
 
Bien souvent on nous pose une question analogue à celle du scribe : qu’est-ce que c’est d’être chrétien ? Or, comme le scribe, nos questionneurs ont déjà des éléments de réponse : être chrétien, c’est croire en Dieu et servir notre prochain. Nos difficultés commencent quand nous essayons d’exprimer les conséquences de ce double commandement que nous pressentons si exigeant. Le christianisme apparaît à certains comme un carcan trop lourd à porter, surtout dans une civilisation dominée par la satisfaction des désirs individuels. De quel droit Dieu viendrait-il se mêler de notre vie particulière ? Bien entendu, cette objection exprime en elle-même sa contradiction. Si Dieu est Dieu comment pourrait-on lui contester le droit de s’occuper de nous ? Mais notre difficulté principale ne vient pas de cette contradiction. Elle vient de notre répugnance à accepter qu’il y ait des règles de vie et que ces règles soient ordonnées au bien de l’homme. Nous adhérons avec une certaine satisfaction à une religion de l’amour, mais nous acceptons difficilement les conséquences d’un amour total, « jusqu’à l’extrême », pour reprendre l’expression de Jésus.
 
Notre tentation de nous satisfaire de bons sentiments sans en supporter le poids, n’est pas seulement un travers des chrétiens. Elle se retrouve chez tous les croyants et même chez les incroyants. Comment vivre en société sans reconnaître qu’il y a certaines règles de comportement qui dépassent les désirs individuels et qui s’imposent à tous, non par moralisme ou aveuglement, mais simplement par un exercice de notre jugement à la lumière de la sagesse humaine et de notre conscience ? Comment ériger en règle générale, voire absolue, ce que chacun désire ou expérimente et ce qu’il veut faire reconnaître comme une règle commune par tous ?
 
La grandeur de la liberté humaine nous appelle à maîtriser nos comportements en ne cédant pas à tous les désirs. Notre foi chrétienne ne fonde pas notre ambition sur nos capacités, mais sur l’amour absolu de Dieu qui nous a été révélé dans le Christ. Cette certitude nourrit notre conviction que les êtres humains sont capables de choisir ce qui est le meilleur, non pour satisfaire les souhaits de chacun, mais pour le bien de tous. Nous ne prenons pas notre parti de voir un conformisme social abolir les progrès de tant de siècles pour le respect des plus faibles. C’est ainsi que nous pouvons aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre force et notre prochain comme nous-mêmes. Que Dieu nous donne la force d’être fidèles à ces deux commandements dans tous les domaines de notre vie personnelle et de notre vie sociale.        
 
AMEN.
                                                                                                           
Michel Steinmetz