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samedi 8 mai 2010

Homélie du 3ème dimanche de Carême (C) - 3 mars 2010

« Cessez de récriminer contre Dieu…». 1 Corinthiens 10.

Où donc est Dieu quand nous souffrons ? C’est la question qui vient spontanément aux lèvres de beaucoup d’entre nous dans les heures difficiles. Parfois même on entend dire : « S’il y avait un bon Dieu, ces choses-là n’arriveraient pas ! ». Entendez par là : Dieu n’est pas si bon que cela… Ces choses-là, c’est-à-dire toute cette souffrance, toutes ces horreurs, tout ce malheur, toute cette douleur qui nous étreint, nous submergent par moments. C’est un fait que nous ne pouvons passer sous silence, comme le sentiment de l’absence de Dieu, alors que, du fond du cœur, nous en appelons à Lui, nous implorons son aide. Reste-t-il sourd à notre plainte ?
« Cessez de récriminez contre Dieu », dit saint Paul. Acceptons, par delà le malheur qui peut-être nous atteint, de relire, comme les Anciens, les signes de la présence de Dieu. Confrontons-les ensuite au réel auquel nous avons à faire face. Tirons-en une leçon pour aujourd’hui.

I.- Relire les signes de la présence de Dieu.

On sait comment Moïse fut contraint de s’exiler dans le désert du Sinaï pour échapper aux représailles du Pharaon. Emu par les mauvais traitements infligés aux Hébreux, il avait tué un Egyptien, mais ses frères de race ne lui reconnaissent pour autant aucun droit à se mêler de leurs affaires. Le voilà donc berger dans le désert, mais cette disgrâce momentanée devait être pour lui l’occasion de sa rencontre décisive avec Dieu dans un étrange buisson en feu. Moïse s’approche, s’étonne. Pourquoi le buisson brûle-t-il sans se consumer ? Alors Dieu se révèle. « J’ai vu la misère de mon peuple en Egypte et je l’ai entendu crier sous les coups de ses chefs de corvée. Oui, je connais ses souffrances. Je suis descendu pour le délivrer… »
La première découverte que fait Moïse au Sinaï, c’est donc cette présence intense de Dieu au cœur de la détresse des hommes. Il est le compatissant, le miséricordieux, c’est-à-dire, littéralement, « cœur ouvert à nos misères », cœur qui prend parti pour ceux qui sont dans la misère. Moïse, dont le premier réflexe était de se voiler la face par crainte, comprend alors qu’il n’y a pas lieu d’avoir peur. Bien au contraire, il aura retenu pour toujours cette révélation surprenante, inattendue, et c’est là qu’il a puisé l’incroyable énergie qui a fait de lui, l’exilé, le rejeté de tous, le meneur infatigable de son peuple et son libérateur. Le secret de sa force ? Il sait au plus profond de Lui que Dieu mène l’entreprise. Il l’a vu à l’œuvre. Il ne s’est plus voilé la face devant cette Présence offerte à ceux qui croient en Dieu.

II.- Le réel auquel nous avons à faire face.

Si nous pouvons être assurés de cette miséricorde de Dieu, de son intérêt pour nos cris de détresse, nos questions n’en sont pas pour autant réglées. Si le mal ne nous atteint pas directement, nous en sommes les spectateurs quotidiens et désabusés. Comme les gens qui viennent trouver Jésus, nous nous émouvons des difficultés de tel couple, de la maladie de tel proche, de l’injustice de telle catastrophe qui frappe des innocents. Notre désabusement se transforme en colère. Pourquoi ? Pourquoi Dieu permet-il donc cela, alors que nous l’invoquons comme « tout-puissant » et « plein d’amour » ?
Je n’aurai pas la prétention d’apporter quelque réponse que ce soit à ce que je désigne volontiers comme le mystère de la vie, le mystère de ce monde, et je me garderai bien même de toute ébauche de réponse forcément simpliste.
Je reprendrai bien plus volontiers les paroles de Paul, un peu agacé mais toujours déterminé : « Cessez de récriminez contre Dieu ! ». Sous-entendu, faites plutôt confiance à celui qui vous aime infiniment. Faites-lui confiance aveuglément puisque, pour un temps, vos yeux embrumés ne sont pas capables de voir clairement se déployer les trésors de son amour pour vous ! Car notre ignorance, aussi insupportable soit-elle, ne nous donne pas le droit de contester. Comme les disciples, devant le drame de la tour de Siloé, si nous réclamons des explications, nous n’en trouverons pas. Mais pour nous se trace le chemin de la confiance. Dieu nous accompagne, quoi qu’il arrive.

III.- Une leçon pour aujourd’hui.

Ne pas récriminer, certes. Mais les paroles de Jésus dans l’évangile prêtent néanmoins à confusion, tant elles sont abruptes. Les Galiléens victimes du massacre perpétrés alors qu’ils offraient un sacrifice, les victimes de l’effondrement de la tour de Siloé n’avaient pas plus péché que d’autres. Pourtant, brutalement et sans justification possible si ce n’est le hasard ou la volonté explicite de Dieu, ils sont morts. Jésus sait bien ce que pensent ses interlocuteurs et nous le savons aussi parce que nous réagissons de la même manière.
Alors Jésus entend tirer la leçon de ces deux évènements tragiques. Suivant la conception courante de la rétribution temporelle, ses auditeurs y voient des châtiments divins sur des pécheurs ; et le fait qu’ils ont été épargnés eux-mêmes les rassure sur leur propre justice. Rappelons-nous à ce propose que, pour un contemporain de Jésus encore, une vie longue est le signe d’une vie juste et bénie de Dieu. Jésus rejette cette vue simpliste ; il montre dans ces malheurs, qu’il ne prétend pas expliquer, un avertissement adressé à tous : tous sont pécheurs, tous ont à se convertir pour être prêts quand l’heure viendra.

Cessez de récriminez contre Dieu ! Dépensez plutôt votre énergie à discerner sa présence, à vous en nourrir, à vous en réjouir ! Dépensez plutôt votre énergie à mettre votre cœur en harmonie avec le cœur de Dieu ! Quand le fardeau vous fait ployer sur le chemin de votre existence, souvenez-vous de cette histoire qui pourrait sortir tout droit d’un psaume : un homme n’en pouvait plus des difficultés qu’il lui fallait porter, alors il s’en prit violemment à Dieu. « Où es-tu alors que j’ai besoin de toi, que je crie vers toi ? ». Et Dieu l’invita à se retourner sur ses pas. L’homme, ne voyant dans le sable que les traces de pas d’un seul homme, renchérit : « Tu vois bien : j’étais seul ! ». Et Dieu répondit : « N’as-tu jamais pensé qu’à ce moment-là, je te portais ? Ces traces ne sont pas les tiennes mais les miennes »…

AMEN.

Michel Steinmetz †

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