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lundi 1 février 2010

Homélie de la solennité de l'Epiphanie - 3 janvier 2010

Nous fêtons aujourd’hui, frères et sœurs, l’épiphanie du Seigneur. Epiphanie, un mot qui pourrait nous sembler barbare mais qui, en fait, provient du grec et signifie : manifestation, apparition. Ce qui était caché, invisible devient donc visible, manifeste.
Il ne suffisait pas que le Messie vînt au monde. Il fallait aussi qu’il soit connu de lui. Et avant même qu’il eût commencé à prêcher, la création le manifestait dans l’apparition de cet astre, que relate l’Evangile. Voilà, en tout cas, le sens de la fête qui nous réunit.
A ce sens, vient se rajouter une question que cette célébration nous pose : qui donc est cet enfant ? Pourquoi faut-il que des savants étrangers le recherchent, et qu’Hérode et sa cour s’en inquiètent ? Oui, qui donc est cet enfant ?
La question qui traverse tout l’Evangile et toute vie croyante est déjà posée à la crèche. Dès les premiers moments de la vie de Jésus, sa vie, pourtant faible et fragile d’enfant, est placée sous le signe de la contradiction et de la violence.
Plusieurs comportements se font jour avec la visite des mages. Celui d’Hérode tout d’abord, le prince despotique et sanguinaire ; celui des savants juifs, chefs des prêtres et scribes sans distinction ; celui, enfin, des mages.

I.- Le comportement d’Hérode, tout d’abord.

Hérode le Grand naît vers 73 avant Jésus-Christ. Il est le fils du majordome de Jean Hyrcan II. Il est nommé en 47 stratège de Galilée, en 41 tétrarque de Judée, puis roi de Judée en 40 par le Sénat romain. Hérode est donc ce que nous appellerions un « collabo ». Son accession au pouvoir est douteuse, mais, fin politique, il a su se concilier l’amitié des Pharisiens sur lesquels, ensuite, il a pu s’appuyer pour asseoir son autorité.
Toujours est-il que, face à la venue des mages et à leur question certes naïve : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? », Hérode se sent menacé. Il n’a pas la conscience tranquille. Il calcule déjà comment il pourrait se débarrasser de l’imposteur. Car Dieu gêne quand il intervient concrètement dans l’Histoire. Et les puissants, ceux qui exercent leur pouvoir pour eux-mêmes et pour leur propre gloriole, ont à juste titre peur d’être renversés de leurs trônes (Lc 1,52). C’est ce que chante Marie dans son Magnificat.
Hérode, dans sa bassesse et sa médiocrité, fait néanmoins preuve d’un habile sens politique : « Quand vous aurez trouvé l’enfant, avertissez-moi pour que, moi aussi, j’aille lui rendre hommage ! ». Les mages, quant à eux, n’en seront pas dupes.

II.- Le comportement des savants juifs, ensuite.

Hérode rassemble autour de lui les responsables officiels de la vie religieuse du peuple ; les grands prêtres sont les membres des grands familles sacerdotales de Jérusalem ; les scribes sont les interprètes attitrés et autorisés de la Loi. Ces deux groupes, d’ailleurs – rappelons-le pour mémoire -, seront réunis contre Jésus lorsqu’il chassera de sa propre autorité les marchands du Temple.
Les savants juifs qui entourent Hérode connaissent les Ecritures ; ils sont instruits des choses de Dieu. Mais que font-ils de cette science ? Elle leur est un trésor inutile, car elle ne nourrit aucune espérance, elle n’inspire aucun désir. Ils ont beau scruter l’Ecriture pour livrer à Hérode l’importance déterminante de Bethléem dans la venue du Messie : leur savoir reste livresque…
Ils ont toutes les cartes en main, et plus que personne, pour discerner la présence tant attendue de l’Envoyé de Dieu au sein de son peuple. Ils ne voient rien et sont aveuglés par leur suffisance. En somme, ils ne recherchent et n’attendent rien.

III.- Le comportement des mages, enfin.

Contrairement aux Juifs, et bien que marchant à la clarté d’une étoile, les mages ne sont pas aveuglés. Ils se laissent conduire par la lumière de l’astre vers « la Lumière qui luit dans les ténèbres » (Jn 1), le Christ.
D’où viennent-ils ? Probablement ces mages sont-ils des astrologues de Mésopotamie et peut-être même sont-ils entrés en contact avec le messianisme juif. Les présents qu’ils apportent sont, eux, des richesses et des parfums traditionnels de l’Arabie.
Qui sont-ils ? Le terme grec (encore !) magos revêt des significations diverses : il peut désigner soit des prêtres perses, soit des magiciens ou des savants, voire même des charlatans… Tout laisse présumer que ce sont des personnages importants même si l’Evangile, notons-le bien, ne parle pas de rois à leur sujet. Seule la lecture d’Isaïe, que nous entendions, évoque, dans sa prophétie, que, ce jour-là, « les nations marcheront vers la lumière de Jérusalem et les rois vers la clarté de [son] aurore ».
Quelques soient les interrogations qui demeurent, ces mages font une longue route pour rendre hommage à ce mystérieux roi des Juifs et lui apporter des cadeaux précieux. Ils ne connaissent pas les Ecritures mais Dieu utilise, pour les guider, le langage qui leur est familier, celui des astres. Ils sont, sans le savoir, les premiers disciples du Christ.
Leurs présents ont valeur de confession de foi. L’or est le présent habituellement offert au roi : ainsi, en Jésus, reconnaissent-ils un personnage puissant, le roi des Juifs attendu par le peuple opprimé. L’encens honore la divinité : ainsi se prosternent-ils devant le Fils de Dieu, l’Envoyé du Père, celui qui concrétise l’espérance d’Israël et les promesses divines. La myrrhe accompagne le mort dans son embaumement : ainsi, annoncent-ils déjà que cet Enfant sera le Crucifié du Golgotha. Si l’ombre de la Croix plane au-dessus de la crèche, la gloire du Ressuscité n’en est pas moins absente.

Et nous, à qui ressemblons-nous ?
A Hérode qui craint pour son pouvoir, à ce prince sanguinaire torturé par l’angoisse de perdre son trône ?
Aux savants juifs, qui ont toutes les données en leur possession pour reconnaître le Messie mais que leur suffisance étouffe ?
Aux mages, qui arrivent devant le Fils de Dieu parce qu’ils se sont laissés mettre en route, qui par leurs présents font un véritable acte de foi ? A qui ressemblons-nous ?
Et qu’offrirons-nous, en ce jour, à l’Enfant de la crèche ?

AMEN.

Michel Steinmetz †

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