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mercredi 11 avril 2012

Homélie du Saint Jour de Pâques - 8 avril 2012

Lorsqu’en l’année 64, un gigantesque incendie ravagea une grande partie de la ville de Rome, l’empereur Néron, soupçonné d’en être l’auteur, fit porter l’accusation sur des gens que l’on appelait « chrétiens ». L’historien Tacite raconte : « Ce nom leur vient de Christ qui, sous l’empereur Tibère, avait été livré au supplice par le procurateur Ponce-Pilate». Ces prisonniers furent soumis aux supplices les plus cruels : certains attachés à des croix et enduits de matière inflammable brûlaient comme des torches au point que la foule en était émue de compassion. Il n’y avait alors que 34 ans qu’un certain Jésus de Nazareth avait été exécuté sur une croix à Jérusalem. Personne ne l’avait défendu. Lors de son arrestation, ses disciples s’étaient enfuis comme des lâches. Les soldats avaient constaté sa mort, on avait descendu le corps que l’on avait déposé dans un tombeau. L’affaire Jésus était close. Le pouvoir et les intérêts du grand-prêtre étaient saufs. Les festivités de la Pâque pouvaient commencer au temple de Jérusalem.

Or, quelques jours plus tard, les disciples qui avaient disparu reviennent sur la place publique et se mettent à propager l’incroyable nouvelle : « Ce Jésus que vous avez tué, il nous est apparu ! Il est vivant ! Pas réanimé mais ressuscité ! Il est bien le Messie que les Ecritures annonçaient ! Il nous a offert le pardon de toutes nos fautes ! Il est le Seigneur ! ». Bien évidemment ces affirmations suscitèrent une avalanche de rires et de sarcasmes : « Comment croire à de telles balivernes ? Ces imbéciles ont eu une hallucination ! Ils sont fous ! ». Néanmoins des gens crurent : vraiment ces hommes n’avaient pas l’air de divaguer. Tout en avouant leur récente lâcheté, ils faisaient montre d’un courage exceptionnel puisque, arrêtés et traduits au tribunal devant les mêmes juges qui avaient condamné leur Maître, ils proclamaient leur message au risque d’être jetés en prison et à leur tour exécutés. Comment rendre compte d’une telle transformation ?
«Convertissez-vous... Rejoignez-nous, vous serez baptisés, vous recevrez le pardon de vos péchés et vous serez remplis de l’Esprit, de la Force de Dieu » : Pierre, Jean, Barthélemy et les autres circulaient partout, tout joyeux d’annoncer la Bonne Nouvelle. En quelques années, en dépit de l’hostilité de beaucoup, l’Evangile se répandit dans les plus grandes villes de l’Empire : Ephèse, Alexandrie, Corinthe, Rome...En 157, le philosophe Justin était arrêté et condamné à mort pour sa foi. En 258, à Carthage, devant le juge qui le condamnait à être décapité, le grand avocat Cyprien se mettait à chanter : « Deo gratias : Rendons grâce à Dieu». Aucun historien de l’antiquité n’a mis en doute l’existence de Jésus et sa crucifixion par Pilate. On peut certes demeurer sceptique devant l’affirmation de la résurrection : il est difficile de l’expliquer par la fabulation de quelques paysans qui auraient monté pareille supercherie, sachant que désormais ils allaient souvent le payer de leur vie. Le sang des martyrs fut la semence des futurs chrétiens.

Tout change.
Car dorénavant, avec Pâques, la vie est foi, confiance. Il n’y a plus place pour la méfiance, la peur, le scrupule. Car comment craindre un Dieu qui a donné sa vie pour pardonner à ses amis qui l’avaient abandonné ? Comment être rongé par le désespoir, se laisser écraser par les fautes du passé lorsqu’on entend Jésus parler au voleur Zachée, à la pécheresse Madeleine, au larron crucifié ?
La vie est espérance. Si la mort est ce mur contre lequel nous nous écrasons les uns après les autres après avoir joué une pièce qui toujours finira mal, je peux sans doute me résigner à cette échéance mais comment accepter jamais que la Mort soit ce tyran qui anéantit à jamais ceux et celles que nous aimons ? Si Jésus est ressuscité, il ne nous suffit plus de lutter pour un allongement de l’espérance de vie : notre désir n’est pas de longévité mais d’Eternité. « Le Seigneur Jésus transfigurera notre corps humilié pour le rendre semblable à son corps de gloire » ( Phil 3, 21).
Et la vie est amour. Amour vrai. Pas boursouflure de l’ego jamais satisfait de posséder. Pas étourdissement dans les jouissances toujours recommencées. Pas sympathie à l’intérieur d’un cercle choisi. Mais don de soi, oblation sans frontière, charité patiente et serviable. A l’exemple de Jésus lavant les pieds de ses disciples.
Cet équilibre d’une vie basée sur la confiance, l’espérance et l’amour se rétablit, se ressource en permanence dans l’eucharistie. Comme les premiers apôtres, et depuis vingt siècles, et dans tous les pays, les chrétiens (qui ne prétendent pas être sans défaut) se réunissent pour faire mémoire de la mort et célébrer la résurrection de leur Seigneur Jésus. C’est en retrouvant la Tête (le Christ) que le Corps (l’Eglise) se reconstitue : la Résurrection de Jésus se prouve dans l’apparition d’une communauté qui vit d’une vie nouvelle, d’une joie inexprimable, d’un amour infini qui la transporte dans l’action de grâce. Sans arrêt, par la force de l’Eucharistie, l’Eglise du Ressuscité remet debout une humanité écrasée qui assume ses responsabilités, combat le fatalisme. Je n’ai pas vu le Ressuscité : je Le vois à l’œuvre aujourd’hui encore.

Que sa Joie, la joie de Pâques, vous bouleverse, vous aussi, qu’elle vous fasse passer (car Pâques veut dire «passage») de la morosité à l’allégresse, de l’avarice au partage, de l’isolement à la communauté.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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