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samedi 25 avril 2020

Homélie du 2ème dimanche de Pâques (A) - 19 avril 2020

« La vieillesse est un naufrage », disait le grand Charles. Pourtant la résurrection de Jésus garantit – et saint Paul le rappelait – un « héritage qui ne connaîtra ni corruption, ni souillure, ni flétrissure ». Y aurait-il duperie sur la marchandise ? Et pire encore, la résurrection de Jésus, sa sortie du tombeau, est bel et bien une libération, libération des entraves du péché, du mal, de la mort. Pour preuve : la pierre est roulée, et les bandelettes ainsi que le suaire sont bien disposés, à leur place. Mais Jésus n’y est plus. Et quand il se donne à voir aux siens, il le fait avec une aisance certaine, jusqu’à apparaître chemin faisant vers Emmaüs, ou se tenir au milieu des apôtres, ou encore les attendre au bord de la mer de Tibériade à leur retour de pêche. Et à disparaître avec la même aisance. Pourtant, les apôtres, eux, demeurent confinés et perclus de peur. La crainte des Juifs les saisit, plus encore que, pour nous, la peur du virus. Si la vieillesse est un naufrage, la résurrection serait-il un confinement ? Aurions-nous attendu et espéré, à nouveau pendant tout un Carême, une vraie libération pour nous voir, à nouveau, confinés et pour un moment encore ?
 
L’expérience des Apôtres n’est finalement pas différente. Alors qu’ils peinent encore à comprendre ce dont ils sont les témoins (leur cœur est lent à croire, quand bien même le Ressuscité parcourt avec eux toute l’Ecriture ou se fait reconnaître au geste désormais si familier et caractéristique de la fraction du pain…), c’est la peur qui les tenaille et les sclérose. L’heure du déconfinement, même partiel, n’est pas encore de mise. Pour la Pentecôte, et le bain de foule, il faudra encore attendre. N’y a-t-il pas précisément là une pédagogie de la part du Seigneur ? Malgré trois années intense de compagnonnage avec Lui, et malgré tous les signes qu’Il a posés comme autant de signes du Royaume déjà là, les disciples ne peuvent du jour au lendemain intégrer ce que signifie « ressuscité des morts ». Jésus, alors, prend le temps de les habituer à cette nouvelle modalité de sa présence à leurs côtés, présence transitoire avant qu’eux, revêtus de la force de l’Esprit, ne poursuivent son œuvre. Que fait-Il ? Il se rend présent au milieu d’eux sans passer par la porte qui est verrouillée, les salue en leur assurant la paix (cette paix dont manque leur cœur, balloté entre joie extravertie et crainte paralysante). Au huitième jour, c’est-à-dire aujourd’hui, Il veut rejoindre Thomas le mal-croyant. Lui ne peut se résoudre à ce que les autres lui ont raconté ! Il veut voir et surtout toucher. Qu’à cela ne tienne… Jésus lui permet de mettre son doigt dans la plaie de ses mains, et sa main dans son côté. Il n’est pas un fantôme. Il n’est pas une vision ou une hallucination collective de la part de personnes qui voudraient se convaincre ou donner du sens à leur deuil. La matérialité du Ressuscité existe. Au bord du lac, il prendra même un repas avec eux.
 
La résurrection de Jésus ne va pas de soi. Elle n’est pas un spectacle grandiose dont on se délecterait des effets, comme on apprécie un bon vin. Car le Christ ne ressuscite pas pour lui, mais d’abord pour nous. Pour que notre mort soit vaincue par la sienne, et pour que nous retrouvions la vie grâce à la sienne. Sa libération appelle notre libération. C’est-à-dire cette sainte liberté qui est une légèreté, une perméabilité aux choses qui voudraient nous retenir et nous oppresser. Paradoxalement, cette vie de Dieu en nous demande un entraînement, dont le Carême chaque année est pour nous une piqûre de rappel et dont l’eucharistie entretient en nous la forme des sauvés. Les disciples en font l’expérience : il faut consentir à faire une place au Ressuscité. Lui par contre ne dédaigne pas nos confinements. Il n’est pas bégueule. Libéré de son tombeau, Il se fait présent aux siens dans leur cénacle fermé à double tour, dans leurs angoisses inexprimables et handicapantes.
 
Vous éprouvez le besoin de vous évader ? Chaque jour, vous vous réjouissez de cocher la case de l’autorisation dérogatoire de sortie pour « un déplacement bref » d’une heure autour de chez vous. Et si vous preniez une heure aussi pour Dieu pour qu’Il vous habitue à devenir des ressuscités ? « Aussi vous exultez de joie, même s’il faut que vous soyez affligés, pour un peu de temps encore, par toutes sortes d’épreuves ; elles vérifieront la valeur de votre foi ».
 
AMEN.
 
Michel STEINMETZ †

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