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dimanche 23 décembre 2012

Homélie de la messe de la nuit de la Nativité du Seigneur - 25 décembre 2012

« Tu ne veux pas de ça, toi, un Dieu qui aime ? Tu préfères un Dieu qui gronde, les sourcils vengeurs, le front plissé, la foudre entre les mains ? Vous préférez tous ça, les hommes, un Père terrible, au lieu d’un Père qui aime... Et pourquoi vous aurais-je fait si ce n’était par amour ? Mais vous n’en voulez pas, de la tendresse de Dieu, vous ne voulez pas d’un Dieu qui pleure, qui souffre. Oh, oui, tu voudrais un Dieu devant qui on se prosterne mais pas un Dieu qui s’agenouille. »(1) C’est peut-être, désolé, le reproche que Dieu pourrait nous faire. Il arrive, c’est vrai, que lorsque nous sommes confrontés à l’expérience de la souffrance, de la maladie et de l’injustice, nous souhaitons retrouver un Dieu tout-puissant qui puisse agir et changer en un coup de baguette magique le cours des événements. Noël est là pour nous rappeler qu’il en va tout autrement.

Par l’événement de l’Incarnation, Dieu a choisi de s’agenouiller auprès de son humanité, de descendre tout bas au point de se lier à nous. Il souhaite pouvoir venir s’agenouiller auprès de nous pour nous prendre par la main. Il est avec nous. Mieux encore, il est en nous. Dieu s’est fait homme, non seulement « pour que l’homme devienne Dieu », écrivait au deuxième siècle saint Irénée de Lyon, mais aussi pour que le Père puisse se mettre à notre niveau. Malgré nos travers, Dieu aime profondément sa Création. Et comme le souligne depuis des siècles la théologie, Dieu n’avait pas besoin du péché de l’homme pour s’incarner. Il voulait montrer le chemin qui conduit à la vie. Dieu vient s’agenouiller auprès de nous. Il change tout ce que nous sommes par sa présence. Imaginez un instant que vous vous préparez une tisane. Que faites-vous ? Vous plongez dans l’eau de votre tasse ou de votre théière un sachet rempli d’herbes aromatiques. Que se passe-t-il ? L’eau, quasi instantanément, va changer. Ce qui était contenu dans le sachet va se diffuser et colorer votre eau. Plus vous laisserez ces herbes à infuser, plus votre eau en sera colorée et parfumée. Voilà le miracle de la nuit de Noël ! Dieu vient infuser en nous. Sa présence à nos côtés – si nous sommes hommes de bonne volonté pour l’accueillir – transforme radicalement notre existence. Telle l’eau ne pourra plus jamais redevenir ce qu’elle était auparavant, telle est notre humanité marquée à jamais de cette divine Présence.

Ce lien est la caractéristique de la vie humaine. Tout homme est être de relation, de liens à tisser, parce que Dieu lui-même ne l’abandonne pas mais fait alliance en point de se faire homme. « Le refus du lien humain, qui se répand toujours plus à cause d’une compréhension erronée de la liberté et de l’auto-réalisation […] signifie que l’homme demeure fermé sur lui-même et, en dernière analyse, conserve son propre moi pour lui-même, et ne le dépasse pas vraiment. Avec le refus de ce lien disparaissent aussi les figures fondamentales de l’existence humaine : le père, la mère, l’enfant, qui des dimensions essentielles de l’expérience du fait d’être une personne humaine tombent. » Voilà ce que rappelait le pape Benoît XVI, il y a quelques jours, lors de ses vœux à la Curie romaine.

Vivre Noël, c’est ne pas faire comme si Dieu n’était pas venu nous visiter, comme si ce monde pouvait tenir sans Lui. Il est seul capable de nous rendre libre. « Là où la liberté du faire devient la liberté de se faire soi-même, on parvient nécessairement à nier le Créateur... Et l’homme même, comme créature de Dieu, comme image de Dieu, est dégradé dans l’essence de son être », poursuivait le pape. Ce soir, osons ne pas nier Dieu. En regardant l’Enfant de la crèche, avec l’émerveillement qu’Il nous inspire, ne prétendons pas, avec orgueil, que notre monde peut se passer de Dieu.

« Lorsqu’un homme songe à son passé, il baisse les yeux vers la terre et, lorsqu’il songe à son avenir, il les lève vers le ciel », a dit le philosophe Aristote. Par l’événement de Noël, Dieu regarde la terre. Lui ne regarde pas vers un passé dépourvu d’avenir, il insuffle à l’homme la capacité de lever les yeux au ciel. Baissons les yeux, adorons l’Enfant de Bethléem ; levons les yeux, réjouissons-nous de l’espérance qu’Il met à portée de main.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

(1) E.-E. Schmitt, Le Visiteur, Paris : Actes-Sud, 1994, p. 53-54.

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