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vendredi 30 octobre 2020

Homélie de la solennité de Tous les Saints - 1er novembre 2020

« Les petits, devant ! » Frères et sœurs, qui n’a pas déjà entendu cela, au moins une fois dans sa vie ? Chaque fois qu’on fait – enfin, faisait… dans le monde d’avant, sans distanciations sociales ! – une photo de classe ou de famille pour marquer un moment particulièrement heureux, il s’agit pour les grands de s’effacer au profit des petits mis au premier plan. Il arrive même parfois que des grands consentent à se faire petit en se mettant à genoux. « Les petits, devant ! » : et si nous faisions de ce mot d’ordre du photographe, notre devise. Et si c’était finalement cela, l’esprit des Béatitudes ? Car il avant tout celui de Jésus qui consent à se faire petit et serviteur de tous. Il se fait modèle pour chacun qui veut le suivre et il n’y a aucune autre voie possible. A ceux qui rêvent de grandeur, de première place, y compris parmi les apôtres, il répète inlassablement : « Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera l’esclave de tous » (Mc 10, 43-44). Voilà le renversement des Béatitudes. Avouons-le, il est toujours un peu douloureux. Qui que nous soyons, et quoi que nous fassions, nous aimons être reconnus à notre juste valeur, être considérés pour les efforts que nous déployons. N’apprend-on pas aux enfants à dire, dès leur plus jeune âge, « merci » ?


L’orgueil est dénoncé depuis les origines de la Révélation biblique. A commencer par le récit de la chute d’Adam et Eve. Ils se sont pris pour Dieu en prétextant connaître ce qui est réellement bon à leurs yeux. A la tour de Babel, les hommes ont cru arriver par la force de leurs mains et par leur génie à la hauteur de Dieu. Voilà que nous continuons de rêver : nous voulons être grands, d’une manière ou d’une autre, comme si cela était inscrit dans nos gênes. Les Béatitudes, elles, viennent nous bouleverser et renverser les perspectives. Là où nous persistons à regarder avec les yeux du monde, le Christ sur la montagne nous invite à regarder comme Dieu. Il n’est plus dès lors question d’apparence, de prestige, de vanité. Il s’agit de regarder le cœur en priorité. Dieu voit dans notre cœur, tout le reste n’a pour lui guère d’importance. Que fais-je de ma vie ? Qu’est-ce qui en est le moteur, le dynamisme premier ? Le fait d’être grand, reconnu, aimé ? De briller, d’être admiré ou adulé ? Ou au contraire la joie de l’humble serviteur de la paix, de la miséricorde, de la justice ? 


De manière tragique, avec l’attentat de Nice, nous avons vu comment Dieu peut être relégué à la dernière place. Car la folie des hommes, la barbarie et l’idéologie ne conduisent qu’aux idoles. La revendication d’un Dieu puissant est en fait une trahison de Dieu. Nous le croyons, et viscéralement nous ne changerons pas de cap : le Dieu que nous professons, chrétiens, est celui des Béatitudes qui fait mettre les petits devant. Il est celui non qui fait pleurer, mais qui console ; non qui persécute, mais qui prend soin ; celui qui n’apporte pas la terreur, mais la paix ; qui ne prend pas plaisir à l’iniquité, mais à la justice. Ce Dieu nous est devenu proche : en Jésus il nous est révélé et nous révèle que cela n’est pas au-dessus de nos forces. Ce germe de Béatitudes est présent dans l’humanité.


Celles et ceux que l’Eglise honore en ce jour, et auxquels nous pouvons demander d’intercéder afin notre colère se change en charité, que notre vengeance se fasse pardon, ceux-là et la « foule immense que nul ne pouvait dénombrer » nous enseigne que le chemin de la sainteté n’est pas une illusion. Des hommes et des femmes comme nous ont vécu dans leur vie les Béatitudes et ont trouvé leur joie à se faire petits. Certains ont versé leur sang pour les autres, ou pour demeurer fidèles au Dieu d’amour ; d’autres ont accepté de transformer leur morne et banal quotidien en se convertissant. Tous n’ont pas cherché à être grands aux yeux du monde, mais seulement grands aux yeux de Dieu. Ils ont vécu leur existence avec simplicité, acceptant de se laisser aimer de Dieu et de devenir toujours plus semblables à Lui. Voilà le chemin du chrétien, du disciple du Christ. Toute autre voie serait le renier. 


AMEN.


Michel STEINMETZ †


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