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vendredi 9 octobre 2020

Homélie du 28ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 11 octobre 2020


Je ne sais, à vrai dire, si le festin de noces qu’évoque Jésus est soumis à des restrictions sanitaires drastiques. Y a-t-il de la place pour plus de trente personnes ? Ont-elles le droit de se mettre à plus de dix par table ? En tout cas, à chaque fois que nous nous approchons de la table eucharistique du Seigneur, il nous est rappelé : « heureux les invités au festin des noces de l’Agneau ! ». Et d’emblée nous percevons que ce à quoi nous sommes conviés à prendre part n’est pas un repas anodin. Il n’est pas le pain partagé que des amis ou des militants partageraient en toute fraternité. Il n’est pas plus le repas qui nourrit notre corps. Il est, en même temps qu’il l’annonce, le repas du Ressuscité. C’est-à-dire ce temps anticipé où nous découvrons un avant-goût du Royaume de Dieu, ce moment béni où nous vivrons réellement en frères car, enfin, nous saurons vraiment ce que c’est que de vivre dans l’amour. 


Dans la parabole de l’évangile, nous retenons d’abord la profonde tristesse du roi. Alors qu’il célèbre les noces de son fils, et qu’il désire sans doute ce qu’il y a de meilleur, de plus beau et de plus réussi pour lui, il envoie ses serviteurs lancer les invitations. Après un premier et étonnant refus, le roi, loin de s’offusquer, retentent en affichant le menu alléchant qui leur sera servi : « ‘Voilà : j’ai préparé mon banquet, mes bœufs et mes bêtes grasses sont égorgés, tout est prêt : venez à la noce.’ ». Une fois de plus, personne ne répond : les uns préfèrent vaquer à leurs occupations et les autres, irrités d’être invités mettent à mort ces serviteurs. Là, sans doute au comble de la colère et du désespoir, le roi envoie ses troupes pour sévir. C’est décidé : tous ceux-là ne sont pas dignes. Pourtant les noces auront bien lieu. Alors, après cette profonde tristesse, le roi fait chercher ceux qu’on aurait jamais imaginé inviter : ceux qui traînent par là. Eux ne demandent rien, ne sont pas « bien-nés ». Eux répondront et viendront.


Il y a ensuite l’impolitesse manifeste d’un des convives qui se verra chasser manu militari. Tout le monde peut entrer, mais il y a une condition : porter le vêtement de noce. Selon l’usage en vigueur en Israël pendant la vie terrestre de Jésus, l’époux donne aux invités le « kittel », un vêtement spécial à porter pour son mariage. Il n’est ni mérité ni acheté. Saint Augustin, déjà, s’interroge sur la nature de ce vêtement : « Je ne puis donc penser que le baptême, j’entends le sacrement seul, soit le vêtement de noce, car je vois qu’il est porté par les méchants comme par les bons. […] La fréquentation de l’église ? Les méchants y vont aussi. » Dès lors, quel est ce vêtement de noce ? Et à saint Grégoire le Grand de lui répondre : « Chacun de vous, donc, qui dans l’Église a foi en Dieu a déjà participé au banquet de noce, mais il ne peut pas dire qu’il a le vêtement de noce si elle ne garde pas la grâce de la Charité » (Homélie 38,9 : PL 76,1287). Et ce vêtement est symboliquement ‘tissé’ de deux bois, l’un en haut et l’autre en bas : l’amour de Dieu et l’amour du prochain (cf. ibid., 10: PL 76, 1288). 


Il en coûte au Seigneur de nous voir bouder son invitation quand nous sommes repus de nous-mêmes et estimons que nous avons mieux à  faire que de nous réunir ensemble pour célébrer ce repas. Pourtant la messe dominicale devrait être pour nous une question de vie ou de mort. Là sous les pauvres signes d’un peu de pain et de vin, Il se donne en nourriture pour que nous grandissions à la mesure de sa charité. Le prophète Isaïe nous le laissait entrevoir : Dieu, le Seigneur de l’univers, prépare pour nous une fête qui ne s’arrêtera jamais et cette fête sera capable d’enlever de notre visage tous les motifs de notre tristesse. Vous avez sans doute déjà fait l’expérience d’un enfant qui chute : il suffit que son père le relève, lui prenne la main et essuie avec amour la larme qui coule le long de sa joue pour qu’il retrouve quasi-instantanément le sourire de se savoir aimé et protégé. Ainsi Dieu. 


Nous sommes tous invités à aller avec la foi à ce banquet, mais nous devons porter et garder le vêtement de noce : la charité qui est la mesure de notre foi. « Voici le vêtement de noce. Examinez-vous : si vous l’avez, vous prendrez place avec confiance au banquet du Seigneur. » (AUGUSTIN, Sermon 90, 1 5-6, PL 38, 559 561-56.)


AMEN.


Michel STEINMETZ †


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