A tous les visiteurs de ce blog, bienvenue !


Vous y trouverez quelques informations sur ma recherche et sur mon actualité.
Progressivement seront mis en ligne ici des articles de fond et d'investigation essentiellement en liturgie, mais aussi en d'autres domaines de la vaste et passionnante discipline qu'est la théologie !

N'hésitez pas à me faire part de vos commentaires !

vendredi 2 octobre 2020

Homélie du 27ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 4 octobre 2020


Si vous avez prêté attention à la première lecture, vous avez peut-être été quelque peu désabusés, voire choqués, par l’attitude de Dieu envers sa vigne. On passe d’un chant d’amour, celui « du bien-aimé à sa vigne », à une scène de désolation. La vigne, pourtant si chérie, se trouve abandonnée. Elle qui avait l’objet de tous les soins – sa terre avait été retournée, les pierres retirées ; on y a mis un plan de qualité ; le terrain muni d’une tour et d’un pressoir, voilà qu’elle n’a rien donné. Des beaux fruits attendus, il n’y en a eu. Son propriétaire l’abandonne et elle est désormais ouverte, abandonnée. Comment comprendre une telle attitude ? Comment expliquer un tel retournement si c’est n’est pas dépit amoureux. Celui qui a tant aimé devient capable non seulement d’indifférence mais d’hostilité quand il découvre cet amour impossible ou trahi. Isaïe, s’il le fallait, explique que cette vigne, c’est l’Israël de Dieu, son peuple chéri, et que le propriétaire, c’est Dieu. 


Pourtant nous n’en sommes restés là. Dans l’évangile, Jésus reprend clairement le « chant de la vigne » rapporté par Isaïe (Is. 5) : parmi toutes les nations, Dieu a planté Israël, son peuple avec lequel il a fait alliance et qu’il a comblé de bienfaits et dont il attend de très bons fruits.  Elie, Amos, Osée, Isaïe, Jérémie, et tant d’autres jusque Jean-Baptiste ont été envoyés par Dieu pour rappeler l’Alliance et dénoncer les infidélités de son peuple. Mais hélas, la Bible rapporte leurs échecs successifs : non seulement on refusait de les écouter mais souvent ils suscitaient une telle furie que certains d’entre eux ont été mis à mort !  Voilà cependant que, tournant de l’histoire, Dieu ne se résout pas au dépit ; il envoie Jésus, son Fils bien-aimé. Devant sa bonté, sa tendresse, sa clarté, son amour, on s’attendrait qu’enfin les hommes admettent leurs errements et se convertissent à son enseignement. Pourtant, par trois fois, la haine s’exacerbe et on met à mort ce fils traité comme un blasphémateur impie et qui en effet sera exécuté hors de la ville, au Golgotha (He 13, 12). Et quels sont les auteurs qui ont manigancé cette exécution ? Ceux qui prétendent servir et défendre l’Alliance de Dieu avec son peuple. Jésus, alors, s’approprie le psaume 117 dans lequel un juste persécuté clame sa joie d’avoir été sauvé par son Dieu. Alors que les chefs du peuple le considéraient comme « un rebut », le rejetaient comme les maçons écartent une pierre impropre à la construction, voilà que Dieu va rechercher cette pierre méprisée et en fait la pierre d’angle de sa nouvelle construction, l’Eglise. Le Seigneur choisit un crucifié bafoué et déshonoré pour en faire le fondement de la Cité nouvelle qu’il construit !


Pourtant le signe de la vigne ne disparaît pas pour autant. Notre baptême nous constitue en nouveau peuple de Dieu. Et si nous savons que la tendresse du Père est infinie, nous savons que nous pouvons toujours demeurer des vignerons homicides quand nous trahissons l’Evangile et pervertissons l’Eglise. Le Christ éveille alors notre intelligence, notre sens critique, notre capacité d’indignation afin que la foi ne devienne un système qui s’atrophie quand il n’est plus « en sortie » vers les périphéries existentielles. C’est l’enseignement de cette attitude singulière du grand patron, maître de la vigne, Seigneur de l’histoire, père de Jésus, notre Dieu. Aucun responsable sérieux n’agirait comme il le fait. Personne, à sa place ne perdrait ainsi son temps et ses meilleurs éléments. Après le sacrifice des premiers envoyés, qui en enverrait d’autres, désarmés ? Et après ce nouveau massacre, qui enverrait son fils les mains nues ? Pourquoi cet immense gâchis de collaborateurs sacrifiés ? Alors que les interlocuteurs de Jésus qui parlent de la colère du propriétaire, Jésus, lui, ne dit rien de tel. La fondation du monde nouveau se fera sur les rebus, sur les exclus. La périphérie sera placée au cœur. Oui, tout va changer, tout change incessamment. Et Jésus nous appelle à anticiper !


Frères et sœurs, sommes-nous le peuple qui fait produire le fruit du Royaume qui vient ? Fruits concrets de justice, d’espérance, de réconciliation en ces temps si troublés ? Marquons-nous, en nos vies, cette possibilité radicale de changement ? Pas pour revenir au « monde d’avant » pour hâter le monde nouveau.


AMEN.


Michel STEINMETZ †


Aucun commentaire: