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vendredi 23 octobre 2020

Homélie du 30ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 25 octobre 2020

Sans doute avez-vous déjà entendu parler dans nos cercles catholiques d’option préférentielle pour les pauvres. Parfois politiquement ou idéologiquement connotée, en raison de son exploitation dans ce qu’on a appelé la « théologie de la libération », l’expression a pu engendrer chez certains une prudente méfiance. D’origine latino-américaine, l’option préférentielle pour les pauvres a pourtant été intégrée officiellement à l’enseignement social de l’Eglise par Jean Paul II. Elle plonge ses racines au cœur même de la foi au Christ et concerne tous les croyants. Elle ne se traduit pas par une exclusivité mais par une priorité accordée aux pauvres. Elle est inséparablement l’expression de la justice et de la charité au sein des relations personnelles et sociétales. Déjà avant l’ouverture du concile Vatican II, Jean XXIII avait déclaré le 11 septembre 1962 : « L’Église se présente telle qu’elle est et veut être : l’Église de tous et particulièrement l’Église des pauvres. » Aujourd’hui, en préambule à la liturgie de la Parole, le livre de l’Exode nous rappelle que Dieu se place toujours et d’abord du côté de ceux qui souffrent, d’une manière ou d’une autre. S’il faut chercher Dieu, c’est là qu’il faut commencer.


Cela nous amène inévitablement à nous interroger : qui sont les pauvres ? Dans le langage de l’Ancien Testament, le pauvre est l’indigent. C’est-à-dire celui qui viendrait à manquer du nécessaire vital. La première lecture rejette ainsi sévèrement les comportements qui briment les immigrés, les veuves, les orphelins. Comme au temps des Hébreux maltraités en Egypte, les démunis de toutes sortes qui peuplent nos villes et crient vers Dieu sont ses interlocuteurs privilégiés. On ne les exploite pas. Dieu tient à ses limites. Quiconque les respecte n’a pas besoin d’en parler. Il rejoint la cohorte des croyants solidaires, centrés sur le service des autres, laissant de côté idoles pour « servir le Dieu vivant et véritable ». Ceux-là accomplissent la Loi dans son entièreté ; ils suivent la Loi nouvelle de l’Evangile. 


Les pauvres, cependant, ne sont-ils que les autres ? Ne suis-je pas à moi-même « mon pauvre » ? D’ailleurs nous disons volontiers de quelqu’un : « mon pauvre ! », mais cela vaut aussi pour nous. Le pauvre est bien celui qui manque de quelque chose de vital. Il y a bien sûr les denrées indispensables à la subsistance, le fait de profiter d’un toit. Nous savons cependant que la liste des pauvretés ne s’arrête malheureusement pas là : pauvretés humaines, psychologiques, spirituelles. Il me semble que ce n’est qu’en acceptant nos propres pauvretés que nous pourrons venir en aide à notre prochain. Sinon nous courons le risque de toujours nous croire supérieurs, dans une posture de charité mondaine qui consisterait à enfiler les bonnes actions, comme on le fait avec les perles.


A la question pernicieuse posée par ses détracteurs, Jésus nous indique l’articulation majeure de la Torah et nous invite à la saisir par l’endroit où il la saisit lui-même. Articulation exacte de la Torah, son point d’équilibre, faite non seulement par Jésus, mais en Jésus lui-même. Quand l’évangile dit : « De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes », il faut entendre : « A ces deux commandements est suspendue toute la Loi, ainsi que les Prophètes ». C’ets le même terme qui désignera Jésus lui-même, suspendu au bois de la croix. Le corps de la Torah est suspendu à l’articulation, à la croisée de l’amour de Dieu et l’amour du prochain, comme le corps de Jésus le sera aux deux montants de la croix, en son corps sous-tendu par le double commandement de l’amour jusqu’à l’infini du don de soi.


Vous vous demandez comment vivre en chrétien ? Commencez par vous regarder en vérité : vous vous découvrirez pauvres, et donc libres d’aimer. Faites ensuite comme Jésus : imitez-le. Alors vous pourrez consentir à vous laisser suspendre à l’amour de Dieu pour vous et vous vivrez en retour l’amour du prochain. 


AMEN.


Michel STEINMETZ †


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