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vendredi 14 mars 2014

Homélie du 2ème dimanche de Carême (A) - 16 mars 2014

Il y a en nous un désir profond. Il dépasse celui, futile au premier abord, de changer de « look » comme on dit, ou d’acquérir une nouvelle personnalité. Avoir un nouveau visage, devenir vraiment ce que l’on n’a pas réussi à être, guérir de ses laideurs, être clair avec soi, se revêtir de gloire : est-il possible d’être un être rayonnant ? Jésus l’a été, un soir, sur la montagne.
Ce rayonnement ne s’acquiert pas, il n’est pas le résultat d’efforts de maîtrise de soi ni d’une montée mystique - ni encore moins, évidemment, l’effet de maquillages et de cosmétiques. C’est l’éclat de l’être de Jésus, l’épiphanie de son mystère ! Cette transfiguration n’advient pas devant la foule, ni même devant l’ensemble des disciples : seuls trois d’entre eux sont admis au seuil du mystère. On ne peut exiger cette faveur. Elle n’est pas permanente : pur moment de grâce qui rend tellement heureux que l’on voudrait qu’il se prolonge (« Dressons trois tentes »...). Mais pourquoi arrive-t-elle à cet endroit, à ce moment ? La question est capitale et seul l’Evangile en donne la clef - que malheureusement la lecture liturgique a omise. L’évangile commençait par ces mots : « Après 6 jours, Jésus prend avec lui Pierre, Jaques et Jean, son frère... ». Un des rarissimes endroits où l’on note l’intervalle entre deux faits de la vie de Jésus : six jours après quoi ? Nous sommes à Césarée de Philippe, près des sources du Jourdain et l’évangéliste Matthieu raconte : « A partir de ce moment, Jésus commença à montrer à ses disciples qu’il lui fallait s’en aller à Jérusalem, souffrir beaucoup de la part des anciens, des grands prêtres et des scribes, être mis à mort et, le troisième jour, ressusciter ».
Voilà donc pourquoi Dieu, à ce moment -ci, offre à son Fils cet éclair de bonheur. Déjà la Pâque se laisse entrevoir. Un court instant, le Fils de Dieu apparaît déjà glorifié. C’est parce que Jésus vient d’accepter d’entrer dans l’ultime étape de sa vie : en obéissant à son Père, aller plus loin encore sur le chemin de l’amour. Après le temps des beaux discours et des guérisons spectaculaires, voici venu le temps d’affronter ses ennemis et, pour l’honneur de son Père, d’offrir sa vie pour pardonner à l’humanité endurcie dans la nuit du mal. Le Père qui naguère avait offert sa vocation à Jésus lors de son baptême, aujourd’hui reprend les mêmes paroles à l’intention, cette fois, des disciples : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ! ». Et la voix remplace la lumière ; l’écoute remplace la vision ;  le charme de l’extase débouche dans l’obéissance pénible. Ecoutez ce message stupéfiant, inacceptable : le Messie ne vous entraîne pas au triomphe à Jérusalem, il va à la rencontre de ses pires adversaires. Echouant à les convertir, il va au contraire attiser leur haine : unanimes ils se dresseront contre lui pour le supprimer.
 Au Jardin des Oliviers, devant l’échéance de la croix, Jésus sera défiguré par l’épouvante. Parce que, à Césarée, il accepte d’entrer sur ce chemin, ce jour, sur la montagne, la Vérité qu’il accepte de vivre transfigure sa face. Il nous faudra nous souvenir aux heures d’angoisse avec lui de ce que nous avons vu aujourd’hui sur la montagne avec Pierre, Jacques et Jean. Il est comme le Buisson ardent où Moise jadis avait entrevu la Présence d’un Dieu qui lui révélait son dessein : « J’ai vu le malheur de mon peuple : fais-le sortir d’Egypte ». Aujourd’hui Jésus, irradié par la Lumière divine, monte à Jérusalem pour accomplir sa mission : libérer les hommes prisonniers du péché, leur rendre leurs visages d’enfants de Dieu.
Il n'est pas l’heure de dresser des tentes, de vouloir arrêter le temps. Il faut retrouver l’homme Jésus ordinaire et se décider à le suivre. Au bout de la route, il n’y aura pas la victoire facile sur le mal mais la Pâque, le passage - terrifiant mais nécessaire - à travers la mort pour déboucher dans la lumière de la Transfiguration définitive. Alors nous ne serons plus des hommes qui font « de la figuration », mais une humanité à tout jamais transfigurée et glorieuse. La deuxième étape de carême nous offre sur le Visage de Jésus un reflet de cette Gloire qui nous attend si, aujourd’hui, nous acceptons d’ « écouter » le Fils et de le suivre sur la route.
AMEN.
 Michel Steinmetz    

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