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dimanche 4 janvier 2009

Notice à paraître in "Caecilia" N°2/2009 sur la prière du Rosaire

La prière du rosaire demeure populaire et bien vivante de nos jours, bien souvent aux mois de mai et d’octobre dédiés par la dévotion populaire à la Vierge Marie, mais aussi là où des chrétiens se réunissent en l’absence de prêtre. Dans le mouvement du Jubilé de l’An 2000, l’année 2003 lui avait été consacrée par le pape Jean-Paul II qui consacrait aussi à cette prière une Lettre apostolique. Au premier millénaire, le "Psautier du Christ" était une prière chrétienne consistant à réciter 150 Notre Père, en référence aux 150 psaumes de la Bible. Pour ne pas perdre le compte, les fidèles utilisaient un collier de 150 grains, nommé patenôtre, instrument de piété qui est à l'origine des chapelets actuels. Vers le XIème siècle, par analogie, le "Psautier de la Vierge" se développa, consistant en une série de 150 Ave. La dévotion du rosaire était déjà en usage chez les Cisterciens depuis le XIIème siècle et s'est développée au XIIIème siècle sous l'influence des dominicains. C'est pourquoi de nombreux tableaux de la Vierge du Rosaire présentent celle-ci offrant une rose ou un chapelet à saint Dominique.

Il n’est pas étonnant que le pape Jean-Paul II, ayant placé son pontificat sous la protection de la Vierge Marie dans la devise « Totuts tuus », ait consacré une Lettre apostolique au Rosaire[1]. Il entend y faire redécouvrir cette pratique de prière comme un moyen très valable pour favoriser chez les fidèles l'engagement de contemplation du mystère chrétien. Habilement, le pape commence son propos par les objections communément faites au Rosaire.
a. Certains pensent que le caractère central de la liturgie, souligné par le Concile Vatican II, a eu comme conséquence nécessaire une diminution de l'importance du Rosaire. En réalité, comme le précisait Paul VI, cette prière non seulement ne s'oppose pas à la liturgie, mais en constitue un support, puisqu'elle l'introduit bien et s'en fait l'écho, invitant à la vivre avec une véritable participation intérieure, afin d'en recueillir des fruits pour la vie quotidienne.
b. D'autres craignent peut-être que le Rosaire puisse apparaître peu œcuménique en raison de son caractère nettement marial. En réalité, elle se situe dans la plus pure perspective d'un culte à la Mère de Dieu, comme le Concile Vatican II l'a défini : un culte orienté vers le centre christologique de la foi chrétienne, de sorte que, « à travers l'honneur rendu à sa Mère, le Fils [...] soit connu, aimé, glorifié ».[2]
Ces objections dépassées, nous pouvons maintenant retenir trois pistes de réflexion en faveur d’une juste articulation avec la liturgie de l’Eglise : l’orientation christologique du Rosaire, son unique enracinement biblique, la manière de le prier.

I. – L’orientation christologique du Rosaire

Le rosaire se fonde dans l’acte de contemplation :
« Fixer les yeux sur le visage du Christ, en reconnaître le mystère dans le chemin ordinaire et douloureux de son humanité, jusqu'à en percevoir la splendeur divine définitivement manifestée dans le Ressuscité glorifié à la droite du Père, tel est le devoir de tout disciple du Christ; c'est donc aussi notre devoir. » [3]
Le chrétien, contemplant le visage transfiguré du Christ, est appelé à se laisser transfigurer à son image et à refléter sa gloire. Dans cette contemplation du Christ, Marie se présente comme un modèle indépassable : son regard ne se détournait plus du Christ et chacune de ses paroles s’inscrivait dans son cœur (Lc 2, 19). Ce sont ces souvenirs qui, en un sens, ont constitué le “rosaire” qu'elle a constamment récité au long des jours de sa vie terrestre. Le pape Jean-Paul II affirme :
« Lorsqu'elle récite le Rosaire, la communauté chrétienne se met en syntonie avec le souvenir et avec le regard de Marie. »[4]
Sans la contemplation, en effet, le Rosaire est vidé de son sens et il ne devient qu’une répétition mécanique de formules agissant à l’encontre de l’ordre de Jésus : « Quand vous priez, ne rabâchez pas comme les païens; ils s'imaginent qu'en parlant beaucoup, ils se feront mieux écouter » (Mt 6, 7). Toute la dynamique biblique, depuis l’Ancienne Alliance, invite à se souvenir des promesses de Dieu pour en vivre dans l’aujourd’hui de notre existence. C’est pourquoi, même si la liturgie est « le sommet vers lequel tend l'action de l'Église et en même temps la source d'où découle toute sa force »[5], elle n’entend pas enfermer la prière chrétienne qui, pour le croyant, demeure une nécessité spirituelle aussi hors du cadre strictement liturgique. La récitation du Rosaire propose de méditer des moments particulièrement marquants de la vie du Christ, moments regroupés de manière thématique en mystère joyeux, douloureux, glorieux, et, depuis Jean-Paul II, aussi lumineux. Il s’agit donc bel et bien, avec Marie, de mieux connaître le Christ, à mieux se conformer à lui, à mieux le supplier, à mieux l’annoncer.
Ainsi, quand nous prions le Rosaire ou le proposons, quelle est la place réelle (et première) que nous accordons au Christ par la présence d’un Croix ou d’une icône du Christ dans l’espace dévolu à la prière, par le recours à des chants qui acclament le Christ ?

II.- Un unique enracinement biblique

Jena-Paul II qualifie le Rosaire de « résumé de l’Evangile ». En effet, il nous fait entrer dans le mystère du Christ en livrant à notre méditation priante les moments significatifs de sa vie terrestre. Les mystères joyeux[6], lumineux[7], douloureux[8], et glorieux[9] proposés par le Rosaire ne sont certes pas exhaustifs, mais ils rappellent l'essentiel, donnant à l'esprit le goût d'une connaissance du Christ qui puise continuellement à la source pure du texte évangélique.
Le rosaire peut se prier en intégralité durant la journée, mais dans la plupart des cas les mystères sont répartis entre les jours de la semaine : mystères joyeux les lundis et samedis, douloureux les mardis et vendredis, lumineux les jeudis, glorieux les mercredis et dimanche.
150 Ave composent le Rosaire, là encore, comment ne pas faire le lien avec l’Ecriture et plus particulièrement le psautier qui, lui-même, nous fait parcourir la diversité des sentiments humains et constituaient la prière du Christ ?
Quand nous prions le Rosaire, avons-nous à cœur de laisser une place à la méditation de l’Ecriture?

III.- Une manière de prier

Jean-Paul II lui-même proposait quelques points d’attention pour améliorer concrètement la récitation du Rosaire.
- En énonçant le mystère, il est bon de le faire suivre d’une brève parole biblique afin « de laisser parler Dieu »[10].
- Pourquoi ne pas faire suivre cette courte lecture par un temps de silence propice à orienter notre prière, avec Marie, vers le Christ ?
- Le Notre Père, au début du chapelet et en tête de chaque dizaine, rappelle le fondement de la prière en Christ. De même dans le « Je vous salue », c’est le nom de Jésus qui opère comme une charnière entre l’une et l’autre partie de la prière : il sera prononcé avec attention.
- Le « Gloire soit au Père… » conclut la dizaine en rappelant opportunément que toute prière chrétienne se fait toujours au Père par le Fils dans l’Esprit. Cette doxologie peut-être chantée.
- Le chapelet lui-même, qui est l’instrument utile de la prière du rosaire, est conçu comme une chaîne dont la croix constitue le début et la fin. On commencera et conclura toujours la prière par un digne signe de la croix.
- Il est d’un usage courant, et heureux, de commencer le Rosaire par le Credo, montrant ainsi que c’est avec toute l’Eglise, et dans sa foi, que l’on entend prier. On peut terminer le Rosaire par une antienne à la Vierge Marie ou par le chant des litanies.
- Enfin, rien n’empêche de rajouter d’autres chants qui pourront s’insérer par exemple après chaque dizaine. On veillera cependant à ce que leur texte soit le plus possible d’inspiration biblique et qu’ils n’accordent pas à Marie, dans une mièvrerie de mauvais aloi, la place et l’adoration qui reviennent au Christ et vers qui elle nous guide !

« S'il est ainsi vécu, le Rosaire devient vraiment un parcours spirituel, dans lequel Marie se fait mère, guide, maître, et elle soutient le fidèle par sa puissante intercession. »[11] Il introduira aussi avantageusement dans l’intelligence de la liturgie et participant à l’unique louange de l’Eglise à son Seigneur !

[1] Jean-Paul II, Lettre apostolique « Rosarium Virignis Mariae », Rome, 16 octobre 2002.
[2] Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Église, n.66.
[3] Lettre apostolique sur le Rosaire, N°9.
[4] Lettre apostolique sur le Rosaire, N°11.
[5] Vatican II, Constitution sur la liturgie, N°10.
[6] Annonciation, Visitation, Nativité, Présentation et recouvrement de Jésus au Temple
[7] Baptême du Christ, Noces de Cana, proclamation du Royaume, Transfiguration, Cène
[8] Agonie de Jésus à Getshémani, flagellation, couronnement d’épines, portement de la croix, crucifixion
[9] Résurrection, Ascension, Pentecôte, Assomption et couronnement de la Vierge
[10] Lettre apostolique, N°30.
[11] Lettre apostolique, N°37.

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