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jeudi 9 avril 2009

Homélie de la célébration de la passion et de la mort du Christ - Vendredi-Saint 10 avril 2009

« Il était si défiguré qu’il ne ressemblait plus à un homme ».
C’est cet homme-là qui nous rassemble autour de lui, cet après-midi. A vrai dire, plus rien en lui ne fait penser à un homme, toute trace d’humanité a disparu, ou plutôt tout en lui crie l’humanité souffrante, défigurée par la faute même des hommes. En le contemplant, notre visage pourrait se détourner devant tant d’horreurs, devant un spectacle aussi insoutenable. Nous ne nous détournons pas cependant : nous fixons les yeux sur lui. Non en faisant montre d’un voyeurisme de mauvais aloi, mais en reconnaissant en lui les blessures et les injures qui nous atteignent et nous défigurent nous-mêmes, en reconnaissant en lui les mystérieuses injustices de la vie qui nous révoltent. Ce Serviteur souffrant du prophète Isaïe, c’est le Christ, comme la tradition a bien voulu le reconnaître depuis les premiers temps de l’Eglise. La similitude entre les paroles du prophète et le récit de la passion de Jésus est troublante. Ce jour-là à Jérusalem, aujourd’hui, comment ne pas voir en Christ « ce serviteur qui a poussé comme une plante chétive, enracinée dans une terre aride », terre de l’humanité qui est restée et reste encore sourde à l’annonce de l’Evangile ? Cet homme « qui n’était ni beau, ni brillant pour attirer nos regards », dont « l’extérieur n’avait rien pour nous plaire » a été « méprisé, abandonné de tous […] compté pour rien ».

« Nous pensions qu’il était châtié, frappé par Dieu, humilié ».
Pourtant, cet homme, le Fils de Dieu, n’était pas défiguré par ses fautes, ses péchés. Il n’avait rien fait de mal et ses souffrances n’étaient pas le salaire, même injuste, de ses méfaits ou de ses crimes. « C’était nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé ». Ne faisons pas l’erreur de croire que Dieu aurait pris plaisir à charger son Fils de tous ces maux pour en faire un bouc émissaire, qu’il l’y avait obligé. Non, il n’était pas puni et nous ne sommes pas punis avec lui ou en lui. Notre Dieu ne prend pas plaisir à la souffrance, il n’impose pas de réparation pour avoir le droit de revenir à lui. C’est même tout l’inverse ! Pour nous libérer du poids de nos fautes, il décide de les assumer lui-même, de passer en notre humanité et de l’éprouver en ce qu’elle a de plus douloureux et sordide. Sur la croix, Jésus n’est pas un homme comme un autre : c’est le Fils de Dieu, vrai homme et vrai Dieu, que nous contemplons. C’est la folie d’amour d’un Dieu décidé à en découdre avec les forces de la mort que nous adorons. Dans ce plan divin, Jésus, en toute liberté accepte d’aller au bout et de souffrir sa passion, non pour obéir au Père ou pour remplir les termes d’un contrat qui exigerait sa mort dans la souffrance, mais parce qu’il pousse à son terme la fidélité à Dieu. Il vit sa mort dans la ferme espérance que son Père ne décevra pas son attente. Le « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » est relayé à l’ultime instant par le « En tes mains, Seigneur, je remets mon esprit ! ».

« Par lui s’accomplira la volonté du Seigneur ! »
A ce stade d’une vie demeurée fidèle jusqu’à son terme (Jésus ne renie rien de ce qu’il a été, de ce qu’il a enseigné, dit ou fait au nom de Dieu), malgré les souffrances, l’angoisse, la détresse qui l’auraient à vue humaine et dans un sursaut de survie, amené à renoncer, Jésus accepte sa mort comme l’issue obligée de sa mission : si la mort peut et doit être détruite, alors c’est au cœur de la mort que Dieu doit pouvoir manifester sa puissance. C’est en passant lui-même par la mort que Jésus peut devenir pour un chacun le gage du salut. En acceptant ainsi la croix, il la transforme en arbre de vie : celui que nous contemplons, homme défiguré, est aussi, mystérieusement, celui en qui l’humanité est réconciliée avec elle-même, celui en qui rayonne au plus haut point la vie. Ne craignons pas, aujourd’hui, de déposer le fardeau de nos propres souffrances, des forces de mort qui se déchaînent, à la croix ! C’est bien parce qu’agissant ainsi et vivant nous-mêmes l’opacité, le mystère de notre vie dans l’abandon confiant à Dieu notre Père que nous pourrons espérer, avec Jésus et en Lui, passer de la mort à la vie de Dieu !

AMEN.

Michel Steinmetz †

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