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samedi 27 octobre 2007

Homélie du 30ème dimanche du Temps ordinaire (C) - 28 octobre 2007


«… ceux qui méprisaient tous les autres». Luc 18, 9

« Dis-moi comment tu pries et je te dirai qui tu es »… C’est la formule qu’on pourrait appliquer, n’est-ce pas ?, à ce cher pharisien et à son compère publicain. Mais nous savons aussi que « l’habit ne fait pas le moine », et qu’il faut prendre garde à ne se fier qu’aux apparences. Dieu, de toute façon, connaît, lui, le secret de notre cœur. Dans la parabole, Jésus ne se contente pas de l’apparence, il n’en reste pas aux attitudes ou aux paroles prononcées. Il prend deux exemples, force peut-être même le trait car il fait œuvre de pédagogue. Il veut faire comprendre quelque chose de fondamental à qui veut être juste et à qui veut prier sincèrement, authentiquement. Alors il décrit deux attitudes contradictoires jusqu’au paradoxe.
En marche vers sa Passion Jésus enseigne ses disciples – ceux qui le suivent ou le suivront – sur les pièges spirituels qu’eux-mêmes rencontreront sur leur chemin. La parabole de ce dimanche est donc bien autre chose qu’une exhortation à la modestie se concluant par des mots dont nous avons fait un dicton : « Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé… ».
Il faudra nous demander tout d’abord de quoi il s’agit au juste : quel est ce pharisien, quel est ce publicain. Ceci étant considéré, on pourra alors parler de la vérité de tout homme, vérité qui demande d’être en cohérence avec ce que nous sommes et vérité d’un Dieu qui regarde le cœur sans faire de différence entre les hommes.

I.- De quoi s’agit-il au juste ?

De deux hommes religieux qui font route ensemble vers le Temple de Jérusalem pour y aller prier le Dieu qui y réside. Il s’agit non pas d’un riche pharisien imbu de lui-même face à un pauvre publicain, modèle de discrétion et de modestie comme pourrait le faire croire la lecture conjointe du livre de Ben Sirac : « Le Seigneur ne défavorise pas le pauvre. […] La prière du pauvre traverse les nuées ». Car matériellement, notons-le, c’est tout l’inverse. C’est le pharisien qui est l’honnête et pauvre travailleur généreux, tandis que le publicain est, comme Zachée, le riche collecteur d’impôts. La parabole met en scène ce publicain qui vit dans le confort, sur le dos des autres, face à un pharisien, qui entend vivre avec rigueur dans la fidélité à la Loi et à Dieu. C’est à partir de là qu’il nous faut considérer la prière de chacun et le jugement que Jésus porte sur leur « justice » respective. C’est à partir de là qu’il nous faut éviter tout contresens d’interprétation. Car le pharisien force le respect, mais le publicain force la miséricorde.

II.- La vérité de tout homme.

Le pharisien prie en parlant de lui. Il fait défiler les bonnes actions qui font de lui un observant, un « pratiquant » fidèle de la Loi de Dieu : il prie « la tête haute », et non seulement debout comme c’était habituellement le cas, (on croirait qu’il défie Dieu du regard) ; il rend grâce parce qu’il n’est pas comme tous les autres ; il jeûne deux fois par semaine – pratique surérogatoire que s’imposaient les Juifs fervents –, et donne un dixième de tous ses revenus. En somme, tout cela fait de lui un modèle de vertu et de fidélité aux exigences de la Loi. Si ce n’est que cette fidélité devient pour lui source d’un profond orgueil : « je fais ceci, je fais cela, je suis ceci, je suis cela ». Et encore, s’il s’en contentait ! Mais non, il va plus loin encore : en rendant grâce à Dieu pour ce qu’il est, il dénigre les autres et les épingle, les enfermant dans leurs fautes ou leurs vices : voleurs, injustes, adultères ou, plus précisément même, son voisin publicain. Sa prière commence par une longue dénonciation des autres. Sa « justice » engendre en lui le mépris des pécheurs. Fort de ses œuvres et de sa différence, tel est cet homme.
La prière du publicain a la sobriété de qui sait reconnaître, face à la sainteté de Dieu, qu’il n’y a vraiment aucun droit à faire valoir. Cet homme « se tient à distance et n’ose même pas lever les yeux vers le ciel ». Il ne dit pas : « Vois ma vie : j’ai bien mérité le paradis… cette récompense, je ne l’ai pas volée… j’ai bien droit à la vie éternelle… je me suis décarcassé pour le Seigneur, alors, quand même, Dieu m’est redevable, non ? ». Non, rien de tout cela dans sa prière. Juste cette phrase qui vient du cœur : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ! ». Il sait que sa vie demande à être purifiée dans l’amour de Dieu, il connaît sa faiblesse. L’image avantageuse qu’il aurait pu se faire de lui-même a été brisée par sa faute passée, par toutes ses fautes, et il est devenu à ses propres yeux un pauvre, un humilié. Mais en disant : « Mon Dieu, prends pitié du pécheur que je suis ! », il a en même temps reconnu que le vrai Dieu ne résiste jamais à la prière des pauvres, des humiliés, comme s’il savait déjà que Dieu, en la personne de son Fils, est apparu comme le Pauvre et l’Humilié, « jusqu’à la mort de la croix » (Ph 2, 8). Le cœur du publicain est donc si bien à l’unisson du cœur de Dieu, sans idée de comparaison avec d’autres, ni volonté de les dominer, qu’il est nécessairement en droite relation avec Dieu, établi dans la justice.
Vérité de tout homme, en fait, mais qui se heurte à notre résistance. Y compris en qui veut être disciple fidèle. Jusqu’à cette subtilité qui fait qu’on peut se glorifier de son humilité, oubliant que celle-ci consiste justement à se reconnaître orgueilleux…

Un critère donc : ne pas mépriser. Et nous souvenir que Dieu n’oublie jamais la prière de ceux qui se tournent vers Lui.
Le Christ montant à Jérusalem, dans l’obéissance parfaite au Père, ne méprise pas les pécheurs. Il les aime au contraire, au point de donner sa vie pour eux. A condition que ceux-ci reconnaissent qu’ils ont besoin d’être sauvés ! Telle est la justice de Dieu. Telle est sa justice pour nous.

AMEN.

Michel Steinmetz +

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