« Alors Jésus paraît. ». Ces trois courts
mots claquent, comme on dit un peu familièrement. On a l’impression d’un avant
et d’un après. Pourtant voilà à peu près trente ans que Jésus est né et que le Fils
de Dieu a revêtu la nature humaine. Nous le savons, nous qui fêtons
aujourd’hui le troisième volet du beau tryptique de ce temps de Noël. Au jour
de la Nativité, nous avons célébré la venue dans la chair du Fils de Dieu,
venue manifestée à toutes les nations dans la visite des mages. Sur les rives
du Jourdain, Dieu continue de se manifester : il révèle à tous que Jésus
est son Fils, son bien-aimé. Ce que Dieu avait réservé pour certains, il
consent à le manifester à tous, comme si, en bon père, il avait préservé et
choyé son enfant jusqu’à ce qu’il soit prêt. A certains moments dans l’histoire
de l’Eglise, on a affirmé que Dieu avait adopté Jésus lors de son baptême en
Galilée. Jésus ne serait qu’un homme comme tous les autres ayant été choisi par
Dieu pour accomplir une mission.
Si Jésus est Fils de Dieu dès le commencement, cela
signifie qu’Il est pleinement Fils de Dieu avant le jour du baptême. Dans le
Jourdain, Jésus se laisse baptiser par Jean le Baptiste pour manifester le fait
qu’il accepte de vivre sa mission. A cette occasion, « les cieux s’ouvrirent ».
En effet, le baptême est la manifestation à tous de la communication qui existe
entre le Père et son Fils. Cette communication est assurée par l’Esprit,
symbolisé par la colombe. Le sens profond du baptême, qui est d’abord un acte,
est éclairé par une parole : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ;
en lui j’ai mis tout mon amour ». Non seulement, Jésus est aimé, mais il
est aimé d’un amour complet. Le baptême dans le Jourdain est le lieu du
dévoilement du secret de Jésus. Nous apprenons au Jourdain que Jésus est un
fils aimé par Dieu.
Nous aussi, nous avons été baptisés. Pour la plupart,
nous étions enfants et nos parents ont pris la responsabilité de choisir pour
nous, comme ils l’on fait pour plein d’autres choses : notre nom, notre
école. A la différence de Jésus, nous sommes des fils et des filles de Dieu par
adoption. Nous avons un père et une mère et aussi un Père des cieux. Nos
parents nous ont donné la vie pour que nous vivions en enfants de Dieu. Notre
Père du ciel, qui est d’abord le Père de Jésus, nous aime comme ses enfants. En
scellant son alliance avec nous, et en nous plongeant dans son amour, celui de
sa mort-résurrection, notre propre baptême est le rappel de l’initiative d’un
Dieu qui nous choisit par avance. Avec le baptême de Jésus, « la source est
purifiée pour que, dorénavant, la grâce du baptême soit administrée aux peuples
à venir. Le Christ a donc reçu le baptême par avance, pour que les peuples
chrétiens prennent sa suite avec confiance » (Sermon de saint Maxime de
Turin pour l’Épiphanie). Il est donné à tous les baptisés que nous sommes,
non de contempler comme des spectateurs ébahis cette vie de Dieu, mais de la
désirer en sachant qu’elle leur est offerte.
A notre
baptême, une voix a aussi dit : « Voici mon enfant, en lui j’ai mis
tout mon amour ». Bien sûr, ce n’était pas une voix céleste venant du haut
des cieux, et les voûtes de nos églises ne se sont pas fissurées pour permettre
à une colombe de descendre en piqué sur nous, mais une polyphonie des voix de
nos parents, parrain et marraine, ainsi que du prêtre. Par leurs paroles, ils
ont attesté que Dieu est un Père aimant. Il nous restait à le découvrir par
nous-mêmes tout au long de notre existence. C’est cela qui nous est remis en
mémoire aujourd’hui et que, tout à l’heure, le geste de l’aspersion a voulu
nous rappeler.
Finalement, nous pouvons nous dire fils et filles
bien-aimés de Dieu parce que Dieu s’est manifesté en se mettant à notre portée.
Il est venu prendre chair ; Il s’est révélé aux nations ; Il a été
manifesté comme le Fils du Dieu au Jourdain. Les paroles du prophète Isaïe ont
permis aux chrétiens de reconnaître en Jésus Celui que le peuple élu attendait.
Sommes-nous capables d’en faire autant ? Demandons-nous comment nous
manifestons nous-mêmes la vie de Dieu en nous. Sommes-nous réfléchissants de la
vie de Dieu ou bien, au contraire, l’étouffons-nous ?
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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