Qui de nous n’a pas déjà entendu lors d’un
mariage les magnifiques paroles de l’apôtre saint Paul : Si je n’ai pas la charité… Il est vrai
que les fiancés raffolent de ce texte. C’est un hymne extraordinaire à l’amour-charité !
La charité y est évoquée en termes de forme invincible, de fidélité, de
durabilité, de grandeur, elle surpasse tout dans la vie. C’est en quelque sorte
la clé de voûte de l’existence : celle qui fait tout tenir ensemble et qui
donne le sens ultime de la vie.
Pour une fois aujourd’hui, j’ai donc décidé de
commenter non pas l’évangile que nous entendions, mais la deuxième lecture
tirée de la première lettre aux Corinthiens. Si ce passage est bien connu, il
en devient même un peu galvaudé. Il n’est donc pas inintéressant de prendre
quelques minutes pour le réentendre de manière renouvelée. Dans le chapitre
précédent, saint Paul a parlé des « dons de la grâce », appelés aussi
« charismes ». Nous sommes dotés de différents dons, certains sont
naturels, d’autres nous sont spécialement donnés par Dieu. Les talents sont
attribués de manière très différente. Ils se complètent et s’aident entre eux.
L’un est très doué de ses mains, l’autre a un cerveau très productif. Tout le
monde n’a pas le talent de la musique, tout le monde n’est pas doué pour la
technique. C’est la diversité des dons qui fait la richesse d’une société. Même
les « dons pour la religion » sont très divers. Certains ont une piété
très sentimentale, d’autres une spiritualité plus raisonnée. D’autres
prétendent « qu’ils n’entendent rien à la musique de la religion »,
comme le dit le philosophe allemand Habermas.
L’essentiel est donc de savoir si ces dons
différents se complètent ou s’ils se combattent. Dans tous les domaines de la
vie, ils peuvent conduire à une complémentarité, à un enrichissement réciproque
ou bien à une rivalité, voire une animosité. Alors il y a la droite contre la
gauche, le blanc contre le noir, les progressistes contre les traditionnalistes,
le clergé contre les laïcs, les actifs contre les moins engagés, etc… On peut
décliner la liste à l’envi dans nos sociétés, nos familles, nos paroisses. En classant
les gens, on arrive toujours à les faire se lever les uns contre les autres, à anéantir
la grandeur du don que chacun porte en soi et qui peut contribuer à la
croissance de l’ensemble.
C’est ici que le texte de saint Paul prend
toute sa place, son message est aussi simple que vrai. A quoi bon tous ces
dons, si je n’ai pas compris la charité, si je n’ai pas l’amour ? Cela
vaut pour tous les talents « mondains » (entendez, ceux qui se
tournent vers le monde), comme pour les religieux. Si, par égoïsme, ils ne sont
mis à profit que pour un usage personnel, ou pour une satisfaction
individuelle, ils ne sont plus qu’airain
qui sonne ou cymbale qui retentit. Si on se donne pas à fond pour son prochain,
tout en ne pensant qu’à son propre faire-valoir et sans y mettre de véritable
amour, cela ne sert à rien. Le pire est
la piété sans charité, sans amour. Elle dégoûte.
L’amour ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; […] il ne cherche
pas son intérêt ; […] mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; […] il
espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais. C’est vrai ? On lit cela avec émotion aux mariages, parfois comme si
on croyait aux conte de fée et aux histoires de princesse. Est-ce que cela se
vérifie dans la vie quotidienne ? Ne voit-on pas trop souvent le
contraire, avec l’amour qui se change en haine ? L’amour ne passera jamais. Comme c’est beau et réconfortant d’entendre
cela qui résonne à la fois comme une certitude et une promesse. L’amour ne
passera jamais, même si le feu de l’amour peut s’éteindre en nos cœurs.
Heureusement donc, il y a cet autre aspect :
l’amour-charité est vainqueur. Parce que l’autre nom Dieu est amour. Si l’on
est patient, que l’on se pardonne toujours, que l’on se supporte les uns les
autres, alors on constate à quel point cela est vrai : l’amour, la
charité, c’est ce qu’il y a de plus grand, de plus durable.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire