Pourquoi Jésus guérit-il des malades ? Ce
n’est en tout cas pas pour asséner des « preuves » et contraindre à croire en
lui, ni pour accroître sa célébrité, épater la galerie, s’attirer des fans
puisque Jésus ordonne impérativement aux personnes guéries de se taire et de ne
pas aller clamer ses bienfaits partout. Il ne veut pas être réduit au rôle de
guérisseur, il n’est pas « une potion magique ». S’il soigne les malades, c’est
que les corps ont de la valeur et que le salut ne se confine pas au niveau des
âmes. Le Règne de Dieu concerne l’homme tout entier et Jésus accueille avec
bienveillance tous ceux qui accourent vers lui afin d’obtenir la guérison. Il
reste que, au-delà de la guérison du corps, Jésus ne cesse d’appeler à la
conversion de l’être. Car c’est du cœur que viennent les jalousies, les haines,
les décisions de faire souffrir l’autre, de l’écraser, de lui nuire, de
l’exterminer (7, 21).
En ces temps anciens, le mot lèpre désignait
toute infection purulente, tout suintement malodorant et même toute moisissure
sur les murs des maisons. On était effrayé devant ces phénomènes que la
médecine de l’époque ne parvenait à vaincre que rarement. Et on comparait
souvent la lèpre et le péché : tous les deux commencent de façon subreptice et
insensible, rongent et étendent peu à peu leurs ravages, résistent au
traitement, enlaidissent et défigurent, contaminent l’entourage, brisent la société,
entraînent l’exclusion. Il fallait de toute urgence éloigner les lépreux de la
société : aussi ces malheureux « impurs », excommuniés, étaient condamnés à la
solitude où ils se regroupaient, compagnons d’infortune qui ne pouvaient
circuler qu’en signalant de loin leur présence aux passants. Lorsqu’un de ces
lépreux était guéri, il devait se rendre au temple de Jérusalem pour faire
constater la guérison par un prêtre, offrir un sacrifice de reconnaissance à
Dieu et recevoir une attestation pour pouvoir réintégrer son entourage.
Cette merveille, à la suite des autres,
provoque stupeur et enthousiasme au point que Jésus, assailli par les foules,
n’entre plus dans les villages où on le prend pour une vedette et peut-être
pour un messie qui vient supprimer la maladie, la souffrance et la mort. Il
reste donc au-dehors : lui qui a réintégré l’ancien lépreux dans son milieu
social est à présent exclu des agglomérations. Troublant et mystérieux échange
! Il faut désormais sortir pour le rencontrer. Plus tard la haine se déchaînera
contre Jésus : déshabillé, criblé de coups, fouetté, ensanglanté, il apparaîtra
comme un homme défiguré, aussi horrible à regarder qu’un lépreux. On ne voudra
plus qu’il souille la ville de Jérusalem et on l’en chassera. Au Golgotha, qui
se situe hors ville, abîmé et excommunié comme un lépreux, il s’offrira pour
tous les pécheurs atteints par la lèpre du péché. Mais après Pâques, ses
disciples – souvent rejetés par les autres - constitueront des communautés vers
lesquelles viendront les pécheurs. Il ne leur sera demandé qu’une chose : avoir
totale confiance dans l’amour du Christ vivant. Oui, j’en suis sûr : Tu peux me
purifier de mes souillures.
Nous sommes leurs héritiers, pécheurs purifiés.
AMEN.
Michel Steinmetz †
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