C'est maintenant le
moment favorable, c’est maintenant le jour du Salut. C’est le moment favorable
pour vous, chère catéchumène : ce Carême est le dernier avant votre renaissance dans
le Christ. C’est le moment favorable pour vous tous, frères et sœurs : le
moment de revenir nous-mêmes à la vie de Dieu que vous avez laissé affadir en
vous, recouvrir par vos soucis, étioler par le cortège de vos préoccupations. Le
Seigneur a exaucé la prière de son peuple en envoyant son Fils dans le monde
pour qu’il prenne sur lui notre péché et qu’il extermine le mal du péché par le
don qu’il fait de sa vie et par sa résurrection.
C'est pourquoi, comme
saint Paul le dit aux Corinthiens, nous sommes invités au nom du Christ, à nous
laisser réconcilier avec Dieu. Ce temps de la réconciliation n’est pas un temps
de tristesse, mais c’est un temps d’espérance et de joie. Depuis la mort et la
résurrection de Jésus, nous sommes entrés dans le temps favorable, dans le jour
du Salut. Nous savons que le renouvellement de notre vie baptismale et la
restauration de la plénitude de la grâce dans notre vie ne sont pas l’œuvre de
nos mains, c’est l’œuvre de Dieu qui se réconcilie le monde avec lui dans la
mort et la résurrection de son fils. C’est pourquoi nous entendons, avec
beaucoup d’espérance, l’appel à la conversion qui nous est adressé par les
prophètes comme ils l’ont adressé au peuple d’Israël, promesse que Dieu ne
reste pas sourd et indifférent quand il voit l’homme pécheur supplier pour sa
conversion. Nous le savons, l’une des ruses les plus profondes du péché, c’est
de se dissimuler à nos propres yeux, c’est de nous donner le sentiment que,
finalement, nous ne sommes pas si pécheurs que cela, que finalement nous sommes
à peu près dans les conditions que Dieu attend de nous. Or ce que les prophètes
ont rappelé, et ce que nous entendons aujourd’hui, c’est que nous avons besoin
de revenir à la source baptismale, nous avons besoin de revenir à
l’authenticité de la vie chrétienne, nous avons besoin de revenir au sermon sur
la montagne dans l’évangile de saint Matthieu et dont nous venons d’entendre
encore un passage aujourd’hui. Revenir à Dieu de tout notre cœur, ce n’est pas
simplement prendre des postures, des attitudes de conversion, faire des gestes
de pénitence, c’est vraiment ouvrir notre cœur au renouvellement que Dieu nous
propose. Vivre ce Carême en vérité, c’est d’abord laisser travailler Dieu en
nous, plutôt que de nous agiter pour savoir ce qu’il convient de faire.
Mais ce chemin de
conversion s’exprimera évidemment par des gestes extérieurs, comme nous allons
le faire tout à l’heure en recevant les cendres en signe de deuil et de
pénitence, mais nous devons être bien attentifs à ce que ces signes extérieurs
expriment une réalité intérieure. Le Christ nous invite à faire dans le secret
ce que seul notre Père voit : « ton Père qui voit au plus secret te le rendra »
(Mt 6, 18). La prière intérieure s’exprime par des gestes extérieurs, mais les
gestes extérieurs de la prière ne sont rien, s’il n’y a pas la prière
intérieure. L’aumône se manifeste par des gestes de partage, mais l’aumône ne
serait rien si elle se réduisait qu’à une offrande économique. Elle doit
exprimer aussi l’ouverture de notre cœur dans la relation aux autres.
L’exercice concret et réel de la charité ainsi que le jeûne ne doivent pas
devenir un spectacle que nous donnons aux hommes mais l’expression de la
contrition que nous vivons en nous-mêmes en pensant à toutes nos dépendances, à
toutes les manières dont nous sommes asservis à la consommation.
Chère catéchumène, vous allez
recevoir tout à l’heure de la communauté chrétienne deux trésors de sa
foi : le Credo et le Pater. Par ces deux prières, reprises
jour après jour, méditées, toujours mieux comprises, vous permettrez à Dieu de
vous transformer. Frères et sœurs, ce que nous allons transmettre à notre catéchumène, il
nous faut le tenir en très haute estime. Il vous faut l’apprendre à vos enfants
et petits-enfants dès leur plus jeune âge. Ces mots, simples et si exigeants,
nous permettront de vivre un
retournement intérieur qui correspond à la réconciliation qui nous est promise
et à laquelle nous aspirons, et qui exprime par le changement de notre cœur, la
volonté d’être un peuple de rachetés.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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