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samedi 18 octobre 2008

Homélie du 29ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 19 octobre 2008

« Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ! ». La réplique est devenue célèbre et demeure toujours aussi frappante. Puisqu’il est question d’argent, on peut dire que les adversaires de Jésus en sont pour leur frais et qu’ils ont reçu la monnaie de leur pièce ! Jésus, en effet, refuse le simplisme de la question et situe le problème au niveau de l'essentiel, qui est la place de Dieu chaque fois que nous sommes devant une question vitale qui demande de chacun et chacune d'entre nous une réponse qui engage notre vie. Jésus sait à qui il a à faire et vers quel terrain glissant on veut l’emmener. Les hypocrites pharisiens savent y faire quand il s’agit de passer de la pommade : ils l’appellent « Maître » et reconnaissent, au moins pour la circonstance, son autorité ; ils évoquent la vérité, la liberté et la justesse de son enseignement. C’est dans ce contexte de mise à l’épreuve qu’il nous faut situer la réponse de Jésus.

I.- Rejoindre le chemin de Dieu.

Ces pharisiens, qui voulaient lui tendre un piège, sont, en fait, enfermés sur eux-mêmes par leur propre question et par la manière dont ils l'ont posée : « Toi qui es toujours vrai..., toi qui enseignes le chemin de Dieu. » Ils se sont placés sur le terrain même où Jésus évolue à l'aise, celui de la relation avec son Père.
« Est-il permis ? » Ils attendaient une réponse au dilemme du « permis-défendu » dans lequel bien souvent d'ailleurs nous nous enfermons nous-mêmes. Or nous vivons dans la foi et nous avons à découvrir et à approfondir la volonté de Dieu, révélée par le Christ, puis à la traduire dans notre comportement personnel, en fonction même de cette foi, et non pas selon une réponse rapide, rigide et par avance schématisée. La volonté divine en nos vies se discerne dans la méditation de la Parole de Dieu, dont le Pape et les évêques du monde entier réunis autour de lui en synode durant ce mois d’octobre nous rappellent l’importance dans la vie et la mission de l’Eglise, dans sa lente sédimentation en nous, dans le cœur-à-cœur de la prière.
Puisque les pharisiens demandent le chemin de Dieu, Jésus les entraîne dans cette direction. Et c'est là toute sa pédagogie. Isaïe envers Cyrus a souligné de la même manière le sens de toute situation humaine : « Je suis le Seigneur, il n'y en a pas d'autre. » (Isaïe 45. 4)

II.- Ne pas mettre César et Dieu sur le même plan.

Une pièce de monnaie, comme un billet de banque, est un programme par ce qui y est représenté, l'annonce d'une politique, l'illustration d'un passé dans lequel on veut enraciner le présent.
Même si c'est de moins en moins perceptible au travers de nos cartes de crédit, par exemple, les rapports d'argent traduisent notre situation. Par les liens sociaux qu'ils établissent, ils traduisent aussi des types de relation entre les hommes. L'argent permet d'acheter un objet, d'occuper un logement, de recevoir le fruit de son travail. Il sert aussi bien à couvrir le nécessaire qu'à accaparer une place et une domination. La crise financière, que traverse le monde entier depuis quelques semaines et qui ébranle tant les milieux financiers et économiques que politiques, en est une malheureuse illustration.
Payer ou non l'impôt, c’était prendre part dans un débat qui mettrait faussement Dieu et César sur un même plan. C’était tomber dans le piège des pharisiens et se positionner dans une affaire politique. C’était pour Jésus rester à la surface des choses. Car Dieu et César ne peuvent être mis en concurrence précisément parce qu’il n’y a aucune commune mesure entre eux. Il nous faut aller plus loin que l'effigie, lire au-delà de l'inscription, découvrir quelle réalité elles expriment, quelle est la hiérarchie des valeurs.

III.- Aller au-delà de l’effigie.

En demandant une pièce d'argent, Jésus rappelle aux Pharisiens qu'ils l'utilisent couramment, sauf dans les offrandes versées au Temple. Sur cette pièce, il y a, gravée, l'effigie de l'empereur. Or un vrai juif refuse la représentation en images, non seulement de Dieu qui est transcendance, mais aussi d'un homme, et spécialement d'un empereur qui se prend pour un dieu. La seule image de Dieu, selon la parole du livre de la Genèse, c'est l'homme vivant : « Faisons l'homme à notre image et à notre ressemblance ». (Gn 1, 26)
Cette pièce doit être rendue à son propriétaire. Jésus ne parle pas de donner mais de rendre : « Rendez à César… » Cela ne signifie pas l'autonomie du domaine politique par rapport au domaine religieux ou son abandon aux mains de quelques-uns, car la politique est un des lieux concrets d'exercice de la charité. La loi morale doit s'y manifester de plein droit : c'est l'un des moyens par lesquels, en aimant ses frères, le chrétien manifeste son amour de Dieu. Il y a un lien entre ces deux domaines, puisqu'on ne peut servir le Dieu-fait-homme en dehors des médiations humaines. La relation ne signifie pas la confusion, et toute sacralisation du pouvoir politique est idolâtre. Ce qui intéresse Jésus, c'est « Dieu seul ». Il faut rendre à Dieu ce qui lui appartient, à savoir l'homme en son identité sacrée.
Jésus nous offre la seule liberté possible, celle de choisir en notre âme et conscience, ce qui va dans le sens d'une plus grande humanisation des rapports sociaux. « César » n'a pas l'exclusivité du domaine humain et matériel et « Dieu » celui du domaine spirituel. La réponse de Jésus ne dissocie pas les deux domaines, César et Dieu, elle les unit en donnant priorité à Dieu.

Rendre à César ce qui est à César, c'est en définitive accepter l'incarnation, c'est accepter la réalité humaine, c'est accepter le chemin qui nous permet, dans un juste comportement vis-à-vis de « César » de pouvoir rendre à Dieu ce qui est à Dieu, c'est-à-dire la totalité de l'homme. Puissions-nous, dans une foi renouvelée et toujours plus intense, être à la fois les témoins et les acteurs du projet de Dieu !

AMEN.

Michel Steinmetz †

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