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dimanche 23 mars 2008

Homélie de la Vigile pascale - samedi 22 mars 2008

La Vigile pascale est, entre toutes les veillées, celle qui nous ouvre au vrai bonheur, celle qui met nos pas dans ceux du Ressuscité pour avancer vers le Royaume. Entre le chant de l’Exultet, qui annonce la grande joie de Pâques, et la bénédiction finale de cette messe, qui envoie les fidèles renouvelés porter au monde « la joie que nul ne saurait leur ravir », la liturgie nous invite à traverser ensemble une nuit qui reprend en elle d’autres nuits pour les porter à leur achèvement. La nuit de Pâques fait paradoxalement de la nuit une lumière et fait passer toutes les nuits qui la précèdent dans la lumière du salut. Ainsi, tout au long de cette célébration, nous vivons des « passages » : passage de la nuit à la lumière quand jaillit la flamme du cierge pascal, lumière communiquée par les cierges, église qui peu à peu s’illumine de tous ses feux, passage de l’Ancien au Nouveau Testament, passage de la mort à la vie en Dieu.
L’Exultet fait le lien entre la nuit où Dieu « a tiré d’Egypte les enfants d’Israël » et « la nuit où le Christ, brisant les liens de la mort, s’est relevé, victorieux, des enfers ». Mais une tradition ancienne élargit cette lecture à d’autres nuits où se jouent l’histoire de notre salut : la nuit de la Création, de l’Exode, de l’Incarnation, nuit de Jésus à Géthsémani, nuit bien évidemment pascale et enfin notre propre nuit.

I.- La nuit de la Création

La lecture du Livre de la Genèse nous en faisait le récit symboliquement au tout début de cette veillée pascale quelques instants seulement après que le feu ait été allumé, béni et acclamé comme lumière du Christ. La première nuit du monde est celle où Dieu frappe le chaos des ténèbres pour que jaillisse la lumière et qu’ainsi apparaisse le monde. Dieu place alors en face de lui un partenaire capable de recevoir la surabondance de son amour parce que sa volonté ne consiste en rien d’autre que de rejoindre sa création pour la combler de son amour. Dès l’origine la nuit est illuminée de cette perspective qui s’accomplit pleinement dans la nuit où le Christ passe de la mort à la vie.

II.- La nuit de l’Exode.

Cette fois, c’est la deuxième lecture que nous entendions au cours de cette veillée qui nous l’a relatée. Alors que Moïse et le peuple fuient devant Pharaon et ses armées, ils se trouvent acculés. Devant eux s’étend la mer. Ils ne peuvent rebrousser chemin. Leur perte est donc assurée. Pourtant Dieu vient à leur secours et ordonne à Moïse d’étendre le bras contre la mer. Elle s’ouvre pour les laisser passer et la colonne de nuée les précède pour leur ouvrir la route. Cette expérience de libération deviendra fondamentale pour la foi d’Israël qui ne cessera au long des temps de se transmettre le souvenir des hauts-faits de Dieu cette nuit-là.

III.- La nuit de l’Incarnation.


Quelques instants après la lecture de l’Exode, nous chantions le Gloire à Dieu, chant solennel rehaussée par la sonnerie des cloches à toute volée, chant des anges dans la nuit de Noël, hymne antique de l’Eglise louant l’incarnation du Christ. Car malgré les vicissitudes de l’Alliance, Dieu reste fidèle à son projet initial. Il veut rejoindre l’homme ; voici qu’au temps voulu, il vient donner ce qu’il manquait à l’homme : sa gloire. Cette nuit-là, en Palestine, Dieu nous donne son Fils. C’est une nuit de promesse d’immortels printemps, promesse réalisée dans l’abandon confiant de l’enfant à la volonté de son Père.

IV.- La nuit de Géthésémani et du Calvaire.

Au cœur de la nuit, au Mont des Oliviers, Jésus prie. Malgré son angoisse face à la mort, il décide de remettre son sort entre les mains du Père, confiant qu’il pourra la sauver. Il va jusqu’au bout. Désormais la croix se profile. Et étrange nuit que celle du Calvaire, nuit qui, au cœur de l’après-midi, s’abat sur la terre alors que meurt le Christ sur le gibet et où le dessein du Père semble mis en déroute. L’amour est crucifié et rien n’existe que ce corps décharné. Aucune lumière ne vient plus illuminer les yeux de celui qui a rendu la vue à l’aveugle-né. Rien. Le corps mort rejoint la terre et s’enfonce dans la nuit. Le grain meurt, comme dit saint Jean, et se laisse briser pour qu’une autre vie jaillisse. Dans la nuit du Calvaire, le dessein de Dieu prend corps.

V.- La nuit de la résurrection.

Là au profond du silence, au tombeau, « le ciel s’unit à la terre » (Exultet). Tout prend sens dans cette nuit. C’est là que Dieu nous révèle la plénitude de son amour. Non seulement il avait libéré Israël de la main des Egyptiens, mais, maintenant, il arrache le monde au pouvoir des ténèbres. L’admirable lumière surgit du tombeau et brise la nuit de tous les tombeaux des hommes. Quand s’éteignent, une à une, les lumières du grand shabbat ce soir-là se lève la lumière qui n’aura pas de fin. Jésus est vivant : il est ressuscité ! Nuit de vrai bonheur où l’homme rencontre Dieu !

VI. – La nuit de notre existence

La rencontre du Dieu vivant n’arrache pas au quotidien ; c’est au cœur de notre vie que doit se réaliser la volonté de Dieu. C’est dans ce lieu, souvent d’espoirs en ruines, parfois de vives blessures, c’est dans ce lieu qu’on appelle « ma vie », que nous avons à nous tenir prêts pour recevoir l’Esprit de Dieu, celui que Jésus remit à son Père sur la Croix, celui encore qui l’a réveillé du sommeil de la mort. La lumière qui resplendit depuis la nuit où Jésus s’est levé du tombeau, qui nous est transmise par le baptême et ravivée en chaque nuit pascale, nous la portons dans des vases fragiles, au creux de nos mains, mais nous voulons la porter joyeusement pour qu’elle ne cesse de briller.

Voilà les passages dont la liturgie nous invite à faire l’expérience ! En les vivant, nous ferons peut-être de notre vie une Pâque à la suite de Jésus : de passage en passage, nous marcherons, comme Lui, dans la confiance vers l’ultime passage, celui de la mort à la vie, sûrs que nous ne serons pas déçus par Celui qui, déjà, a réveillé sont Fils du sommeil de la mort.

AMEN.

Michel Steinmetz +

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