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dimanche 23 mars 2008

Homélie du 5ème dimanche de Carême (A) - 9 mars 2008

Après avoir exposé la situation, Jean présente des scènes successives dans lesquelles Jésus rencontre les différents personnages de ce récit : d’abord les disciples, ensuite Marthe, finalement Marie et les Juifs qui l’accompagnent. Dès le début, on entrevoit quel va être le dénouement de l’intrigue, mais l’évangéliste un long suspens et attire l’attention du lecteur sur les paroles de Jésus.

Situation et personnages
Les premiers versets présentent la famille de Béthanie et annoncent la maladie de Lazare. Une autre information est répétée au début du récit : une relation d’amitié unit Jésus avec les deux sœurs et Lazare. Cette insistance sur l’amour de Jésus ne rend que plus étonnante son attitude apparemment indifférente lorsqu’il apprend que Lazare est malade : il attend deux jours avant de se mettre en chemin vers Béthanie. Et Jésus se contente de déclarer : « Cette maladie-là ne débouche pas sur la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle. ». Or ces belles paroles de Jésus sonnent creux, car on apprendra, dans la scène suivante, que Lazare est mort. On aurait envie de dire qu’au lieu de parler, Jésus aurait mieux fait d’agir. C’est d’ailleurs ce que lui suggèreront plus tard, l’une après l’autre, les deux sœurs : « Seigneur, si tu avais été là mon frère ne serait pas mort ».Dialogue entre Jésus et les disciples
Finalement, Jésus décide d’aller en Judée avec ses disciples mais, avant de partir, s’instaure entre eux un dialogue qui n’est pas exempt de malentendus. Tandis que Jésus parle de sommeil à propos de la mort de Lazare, les disciples comprennent qu’il se repose et, en conséquence, qu’il va guérir. Mais Jésus précise que Lazare est bien mort et qu’il se réjouit de cette mort en son absence. L'attitude de Jésus est, une nouvelle fois, pour le moins étonnante ! Seul le fait qu'il traite de « sommeil » la mort de Lazare laisse supposer qu'il a de bonnes raisons de se réjouir.Une autre source de malentendu provient de ce que le retour en Judée représente un réel danger de mort pour Jésus, car on veut le tuer. Les disciples le savent et Thomas prend la parole pour encourager le groupe à s’unir au sort de Jésus : « Allons, nous aussi, pour mourir avec lui ». On passe ainsi de la mort de Lazare à celle qui menace Jésus. Or, si Jésus ne rectifie pas sur le champ les paroles de Thomas, les événements indiqueront clairement que Jésus n’entraîne personne dans la mort avec lui. Au contraire, il mettra en pratique ce qu’il a dit : tel le bon berger, il donnera sa vie pour sauver le troupeau.


Rencontre entre Jésus et Marthe

Jésus n’est pas encore entré dans le village de Béthanie que Marthe va à sa rencontre, tandis que Marie reste assise dans la maison du deuil. Dans son dialogue avec Marthe – le plus long de tout le récit – Jésus évoquera non seulement la résurrection, mais il se présentera lui-même comme la résurrection et la vie, révélant ainsi sa propre identité. Marthe, de son côté, manifestera sa foi en Jésus d’abord par une affirmation : « Je sais que, quoi que tu lui demandes, Dieu te le donnera », qui traduit son espérance que Jésus pourra ramener son frère à la vie. Ensuite, dans une véritable confession de foi, elle reconnaîtra l’identité de Jésus, indépendamment de toute référence à Lazare : « Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le fils de Dieu, celui qui vient dans le monde ».


Jésus, Marie et les Juifs qui l’accompagnaient dans le deuil

Sans en avoir reçu l’ordre, Marthe avertit sa sœur que le Maître l’appelle. Aussitôt, celle qui était restée assise se met debout et part à la rencontre de Jésus. Le groupe des Juifs, venus l’accompagner dans le deuil, la suivent pensant qu’elle va à la tombe. Mais elle va vers Jésus qu’elle rencontre à l’endroit même où Marthe l’avait rencontré, et lui dit la même chose : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort ». Cependant, contrairement à Marthe, Marie en reste là ; elle ne dit rien de plus. C’est le groupe des Juifs présents qui prendra la parole pour répondre à la question de Jésus, constater l’amitié de Jésus pour Lazare et se demander si celui qui avait donné la vue à un aveugle-né n’aurait pas pu éviter la mort de son ami.

Celui qui se réjouissait de « ne pas avoir été là », pleure devant la réalité de la souffrance et du deuil. « Jésus pleura » est le verset le plus court de l’évangile et assurément l’un des plus intenses. Sa joie ne venait donc vraisemblablement ni d’une inconscience, ni d’une impassibilité. En outre, au-delà de la mort de Lazare, le verbe « se troubler » évoque l’affrontement de Jésus avec sa propre mort.Émouvants et bouleversants, ces pleurs de Jésus devant la tombe de son ami ! Il sait qu’il va redonner vie à Lazare, mais il pleure. D’ailleurs, à sa question : « Où l’avez-vous mis ? », ils lui avaient répondu : « Seigneur, viens et vois », l’invitant à « faire l’expérience » du deuil et, au-delà, celle de la mort. Ils l’invitent à faire la démarche pour venir « voir ». Celui qui s’était présenté à Marthe comme étant la "Vie" pleure devant le deuil, et il va faire l'expérience de la mort.


Jésus devant le tombeau de Lazare

Arrivé devant le tombeau, Jésus demande qu’on enlève la pierre. Marthe intervient : « Seigneur, il sent déjà, c’est le quatrième jour ». L’efficacité de la parole de Jésus n’en sera que davantage mise en valeur. Tous les signes de la mort sont là, mais grâce à une parole, le mort va revivre. Jésus appelle Lazare par son nom, mais il le fait d’une voix forte qui n’est pas sans évoquer la voix forte du don de la Torah au Sinaï (Dt 5,22) et touche toute personne qui gît dans un tombeau. Lazare sort libre et vivant du sépulcre, mais muet sur ce qu’il a pu « vivre ». Une chose est certaine : si l’évangéliste ne décrit pas ici la joie de la rencontre entre Lazare et ses sœurs, alors qu’il avait détaillé la peine de Marie et de ceux qui l’accompagnaient, c’est que la perspective du récit n’est pas la joie de la famille de Béthanie, mais l’écoute des paroles de Jésus et l’attention à ses gestes.


Notre regard de ce dimanche doit forer la densité de cette scène. Il doit rejoindre l'intention profonde du Christ : sa peine et sa souffrance alors que son ami repose au tombeau ; sa jubilation et son exultation parce qu'il voit le sens de cette heure, annonciatrice de la sienne. Notre regard doit rejoindre le sien. Puissions-nous accourir vers lui, en découvrant à quel point grande est sa peine devant la mort de son ami et à quel point grande est sa jubilation lorsque la puissance de sa vie se manifeste. Avec ce regard qui est le sien, nous pouvons aller vers la Pâque en confiance !

AMEN.


Michel Steinmetz +












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