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dimanche 13 décembre 2009

Homélie du 2ème dimanche de l'Avent (C) - 6 décembre 2009

Saint Luc, dès le début de son Évangile met en présence, d'une part les puissants de ce monde et d'autre part les faibles et les petits. La longue liste de personnages au début du texte que nous venons de lire, n'est pas simple démonstration d'érudition. Elle situe Jésus face aux puissances : celle de l'empire romain, représenté par l'empereur Tibère et son gouverneur en Judée, Ponce Pilate ; celle du prince fantoche de Galilée, Hérode et son frère Philippe, et celle des chefs religieux du peuple juif, Anne et Caïphe.
Du côté des petits, il y a Jean le Baptiste, qui ne vit pas dans des palais royaux, mais au désert. Ce désert symbolise les quarante ans du Peuple choisi au désert ; et pour décrire la mission de Jean, Luc utilise la prophétie d'Isaïe annonçant la fin de l'exil à Babylone.
Au milieu de ces puissants, Jean-Baptiste a l’audace d’annoncer une ère nouvelle. Reprenant à son compte les prophéties de l’ancien temps, il montre l’imminence du Royaume de Dieu.
Des personnages, un lieu, un message : voici les jalons que nous suivront aujourd’hui pour mieux comprendre la Parole de Dieu.

I.- Des personnages

Les interventions de la Parole de Dieu sont toujours comme une glaive qui sépare, qui établit une rupture dans le temps et dans l’espace. Le vieillard Siméon avait annoncé à Marie que le glaive qui transpercerait son coeur ferait aussi la séparation entre les hommes en révélant ce qui était dans le coeur de chacun. Dans le passage que nous venons d’entendre, Luc prend plaisir à préciser dans quel contexte historique précis intervient cette Parole. Les Juifs sont alors sous la domination romaine ; Tibère César est l’Empereur romain et Ponce Pilate est son gouverneur en Judée. La Galilée est soumise au roi fantoche Hérode et à son frère Philippe. Les chefs religieux Anne et Caïphe sont totalement compromis avec ces pouvoirs. Et si Caïphe est le grand-prêtre en titre, l’influence politique de son beau-père Anne est encore manifeste. Luc place ainsi en finale dans sa liste le chef du peuple de Dieu en antithèse au César païen. Ce sont ces mêmes trois puissances d’hostilité à la Parole de Dieu qui interviendront au procès de Jésus et obtiendront sa condamnation.

II. – Un lieu.

Jean, quant à lui, prêchait dans le désert de Juda, près de Jéricho, pas très loin de Qumrân. Aller de Jérusalem à Jéricho par avion se ferait aujourd'hui en quelques minutes. Mais y aller par la route, du temps de Jésus, était toute une entreprise. Il fallait descendre plusieurs centaines de mètres, depuis l'altitude de Jérusalem jusqu'au niveau de la Mère morte, utilisant des sentiers sinueux à travers les montagnes majestueuses du désert de Juda, impressionnantes par leur nudité, et dangereuses puisque chaque courbe constituait un endroit idéal pour une embuscade. Il n'est donc pas surprenant que lorsque Jean veut appeler le peuple à la conversion, les mots qui lui viennent à la mémoire sont ceux du prophète Isaïe : « Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route. Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées ; les passages tortueux deviendront droits, les routes déformées seront aplanies ; et tout homme verra le salut de Dieu. » Ce langage imagé parlait sans doute à ses auditeurs plus qu'à nous.
Or la parole de Dieu ne se fait pas entendre dans le contexte politique et religieux de Jérusalem mais bien au désert.
La rupture est désormais réalisée. C’est là, au désert, lieu du cœur à cœur avec Dieu, lieu où toute route est toujours recouverte par le sable et toujours à retracer, que Jésus viendra se faire baptiser par Jean, c’est là que l’Esprit descendra sur Lui et que la voix du Père se fera entendre : « Celui-ci est mon fils bien-aimé ». Et c’est là dans ce désert qu’il commencera sa propre mission.

III. – Un message.

Lorsque nous lisons aujourd'hui les paroles de Jean, nous leur donnons facilement un sens moral, à savoir, que nous devons redresser nos chemins, que nous devons corriger notre conduite, que nous devons cesser de faire le mal et nous mettre à faire le bien… Tout cela est évidemment bon ; mais je ne crois pas que ce soit ce que Jean voulait dire. Jean utilisait certainement ce texte dans le sens qu'il avait dans son contexte original, qui était la description de l'époux courant à travers les collines, pour venir rejoindre sa bien-aimée, volant en quelque sorte au dessus des vallées et des collines. Pour décrire cette mission, Luc cite donc la prophétie d’Isaïe. On peut y voir l’annonce d’un monde où les fossés entre les hommes, et les classes sociales et religieuses et entre les peuples seront comblés – un monde où l’égalité de tous devant Dieu sera respectée. Un monde tout autre que celui des Tibère, Pilate, Hérode, Philippe, Lysanias, Anne et Caïphe. Ce dernier monde, basé sur les inégalités, sur les conquêtes et l’oppression est voué à la disparition.
Dans le monde nouveau, la seule distinction maintenue est celle du service. Les fossés ne sont pas comblés par la révolution violente des opprimés mais par l’abaissement volontaire des privilégiés pour se mettre au service de tous, tout comme le Christ lui-même s’est fait le serviteur de tous, les invitant à se mettre à table pour qu’il puisse les servir.

Jean-Baptiste annonce une ère nouvelle comme l’avait fait le prophète Baruc, deux cents plus tôt. Il reste tant à faire, me direz-vous, pour que ce monde nouveau éclose enfin, pour que le bonheur de l’humanité soit à la mesure du projet de Dieu. A quoi Baruc vous répondra : c’est précisément le moment de capitaliser nos raisons d’espérer ! Comme le peuple élu, il nous faut puiser dans le souvenir des merveilles de Dieu pour continuer à espérer son œuvre en l’à-venir. Plus la réalité est morose, plus le croyant se répète les merveilles du passé ! Voilà une belle leçon de foi et d’espérance pour nous. Que les difficultés, les malheurs, les drames du monde n’aient pas raison de nous, mais qu’ils décuplent nos énergies !
Puissions-nous abaisser les collines de notre orgueil, combler les ravins de notre pauvreté intérieure pour faciliter la route au bien-aimé de Dieu, le Christ, qui vient à note rencontre !

AMEN.

Michel Steinmetz †

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