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samedi 6 janvier 2007

Homélie de la solennité de l'Epiphanie - 7 janvier 2007


« Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ».

Voilà la fin de l’histoire et, un peu au moins, sa morale. En effet, tout commence ici quand se lève l’astre nouveau. Phénomène étonnant et fascinant qui retiendra l’attention des mages. Ils se mettront alors en route, organisant, à n’en pas douter, une véritable expédition scientifique. Ils parcourront des centaines, des milliers de kilomètres à la suite de cette mystérieuse étoile. Peut-être, mais nous ne pouvons en être pleinement assurés, connaissent-ils la promesse qui est liée à son apparition ? Plusieurs prophéties de l’Ancien Testament convergent en ce sens et parmi elles celle de Balaam dans le Livre des Nombres. Je vous la rappelle : au moment où les tribus d'Israël s'approchaient de la terre promise sous la conduite de Moïse, et traversaient les plaines de Moab (aujourd'hui en Jordanie), le roi de Moab, Balaq, avait convoqué Balaam pour qu'il maudisse ces importuns ; mais, au lieu de maudire, Balaam, inspiré par Dieu avait prononcé des prophéties de bonheur et de gloire pour Israël ; et, en particulier, il avait dit « je le vois, je l'observe, de Jacob monte une étoile, d'Israël jaillit un sceptre ... » (Nb 24, 17). Le roi de Moab avait été furieux, bien sûr, mais en Israël, on se répétait soigneusement cette belle promesse ; et peu à peu on en était venu à penser que le règne du Messie serait signalé par l'apparition d'une étoile.
Ainsi les mages peuvent avoir l’assurance que non seulement le phénomène qu’ils ont découvert est grand, mais qu’il est aussi l’annonce d’une formidable nouvelle. Après bien des surprises et des péripéties, après avoir découvert et salué l’Enfant, « ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ».

I.- "Ils"… qui sont-ils ?

Ce sont bien évidemment les mages de l’évangile, ceux dont l’histoire a affirmé qu’ils étaient trois, sans doute à cause des trois présents dont Matthieu fait mention, ceux dont la tradition populaire encore a situé l’origine à trois continents différents pour montrer l’universalité du salut apportée par le Christ. Ceux dans lesquels on a vu des rois, par référence au texte d’Isaïe « les rois marcheront vers la clarté de ton aurore » et au psaume 71 « les rois de Tarsis et des Iles apporteront des présents, les rois de Saba et de Seba feront leur offrande ».
Mais ces mages sont aussi la figure de tous qui marchent à la lumière du Seigneur, tous ceux qui acceptent de reconnaître avec humilité dans leur vie l’apparition d’un signe et qui le reconnaissant comme étant de Dieu. Ce sont ceux qui, ne connaissant pas Dieu, se laissent mettre en route, en leur âme et conscience, ceux qui recherchent avec droiture la vérité, comme nous le disons à peu de choses près dans une des prières eucharistiques (cf. PE IV). Ceux-là savent bien, comme les mages et avec eux, qu’il est profondément déroutant de s’engager dans l’aventure de la foi mais qu’il est véritablement réconfortant de savoir que la lumière qui nous guide n’est pas quelconque. A travers cette étoile, signe posé là, phénomène astrologique parmi d’autres, ils suivent déjà la « Lumière qui luit dans les ténèbres », celle du Fils de Dieu.

II.- « Ils regagnèrent leur pays »

Si la curiosité, la soif de connaître, la volonté de percer le mystère les met en route, les mages n’ont aucune intention de ne pas revenir : revenir à ce qui fait leur vie, revenir à leur recherche, revenir aux leurs proches. « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? demandent-ils à Hérode. Nous avons son étoile se lever et nous sommes venus nous prosterner devant lui ». Tel est le but avoué de leur voyage. L’hommage rendu n’appelle en fait rien de plus et ne les engage à rien d’autre.
« Et responso accepto in somnis, ne redirent ad Herodem, per aliam viam reversi sunt in regionem suam », dit le texte de la Vulgate. « Revertere » : un verbe composé comme « convertere ». L’un désigne un chemin fait dorénavant avec quelqu’un, en somme le fruit d’une conversion, l’autre un retour sans conséquence. Les mages reviennent sur leur pas.

III.- « Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ».

La peur face à Hérode, le despote sanguinaire, la volonté couarde de rentrer sans encombre pousse les mages à emprunter une route différente. La rencontre qu’ils viennent de vivre, dans son surréalisme, sa profondeur et sa vérité, les a bouleversés. Eux, de riches savants venant de contrées aux cultures éblouissantes, « tombant à genoux, ils se prosternent devant l’Enfant ». On n’a pas grand mal à imaginer le contraste qui jaillit de la scène : les riches parures de ces visiteurs côtoient la simplicité de cette famille unique. Dans un endroit vraisemblablement à l’opposé des fastes d’un palais, sont déposés aux pieds de l’Enfant-roi les présent ô combien symboliques : or, encens et myrrhe. Ils sont en eux-mêmes une splendide confession de foi.
Alors, s’ils regagnèrent leur pays par un autre chemin, ils le firent aussi parce qu’illuminés de cette rencontre. Ils sont repartis différents, changés et d’une certaine manière convertis. Et s’ils retournent dans leur pays, si nous ne savons rien de leur vie par la suite, l’évangile, par la seule mention d’un autre chemin, nous autorise à penser que toute rencontre avec le Christ, quelle qu’elle soit, ne reste jamais sans effet. On ne peut en vérité rencontrer Dieu sans se prosterner en hommes libres devant lui.

Aujourd’hui cependant, des chrétiens rencontrent le Christ de manière régulière, des sacrements sont célébrés, signes efficaces de sa présence à son peuple, et nous nous demandons quels effets ils produisent. Dans le monde, le Christ est annoncé – bien sûr il pourrait l’être encore mieux et davantage, mais nous devons tristement constater que ne cessent pas les guerres, que sévit toujours l’injustice, que blesse encore la calomnie. Si le Christ nous est donné, n’est-ce pas nous qui restons fermés, voire hostiles, à sa présence ? Revenons-nous à chaque fois sur nos pas comme si de rien n’était ?
Que la lumière de la foi nous aide à conserver l’espérance fondamentale qui s’impose au croyant, que cette même lumière nous habite pour en rayonner à notre tour, alors, nous aussi, dans un instant, nous regagnerons notre pays par un autre chemin.


AMEN.

+ Michel Steinmetz.

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