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vendredi 5 juin 2015

Homélie de la solennité du Corpus Domini - 7 juin 2015

Aujourd'hui nous sommes rassemblés pour célébrer ensemble, et de manière solennelle, l’eucharistie. L’Eglise fait le Corps et le Sang du Seigneur, qui nous sont donnés en nourriture non comme une récompense pour les forts que nous penserions être, mais bien plus comme une aide sur notre chemin de foi. L’eucharistie vient refaire nos forces pour que nous puissions poursuivre notre existence dans la vérité de l’Evangile. Elle nous fait grandir sans cesse dans la communion avec le Christ, mort et ressuscité, comme pour faire diminuer la distance que le péché met entre lui et nous. L’eucharistie fait de nous des hommes et des femmes meilleures, si nous la célébrons avec foi et respect.
Aujourd’hui, cependant, nous ne faisons pas que de célébrer l’eucharistie, nous allons adorer la présence réelle du Seigneur au milieu de nous par des gestes concrets de vénération. C’est le sens de la procession que conclura cette messe.
 
Pour bien comprendre le sacrement de l’eucharistie, nous ne pouvons séparer ces deux éléments : la célébration et l’adoration. On a eu tendance ces dernières décennies, à privilégier l’une – la célébration – au détriment de l’autre – l’adoration. Il était heureux que nos communautés redécouvrent l’importance vitale de célébrer l’eucharistie, comme un acte de toute l’Eglise, et non du prêtre seul. On n’assiste pas à la messe, on y participe : c’est fort différent. Car l’eucharistie nous oblige. Elle nous provoque à la vie chrétienne. Elle nous stimule. Pourtant nous ne pouvons en rester à ce stade et nous en satisfaire. Voilà pourquoi, nous ne devons pas perdre de vue l’autre aspect de l’eucharistie : l’adoration qu’elle suscite et entretient en nous. Au risque de quoi se développerait en nos vies un réel déséquilibre spirituel. On risquerait en effet de moins percevoir la présence réelle de Jésus non seulement dans la célébration de son eucharistie, mais aussi le sens de sa présence constante au milieu de nous et avec nous, une présence concrète, proche, au milieu de nos paroisses et dans nos familles, dans nos villages et dans notre pays.
 
Célébration et adoration sont inséparables. Le culte du Saint-Sacrement repose sur un « milieu », une stimmung, un être-chrétien. Nous ne pouvons saisir la portée de l’eucharistie si sa célébration juste et vraie n’est pas accompagnée, précédée et suivie d’une attitude de foi intérieure. Comment reconnaitre cette présence réelle du Seigneur à notre côté, si elle ne s’accompagne pas de signes qui traduisent notre foi et notre dévotion ? Entrer dans une église sans s’incliner ou faire la génuflexion vers le tabernacle ? S’avancer pour la communion en ayant une attitude indigne ? Recevoir le pain consacré sans mesurer ce qui nous est donné ? Tout à l’heure, je vous invite, je vous demande, je vous exhorte à vous mettre à genoux – pour ceux que la santé n’en empêche pas – durant la prière eucharistique au moment du récit de l’institution (la consécration). Montrez par votre attitude que vous croyez. Demandez à votre corps de manifester ce qui habite votre cœur. Que la posture que vous nous imposerez provoque en retour la foi. A la fin de la messe, nous serons tous encore à genoux devant le Saint-Sacrement, tous, quel que soit notre rang, notre fonction, notre origine. Nous formerons l’Eglise unie à son Seigneur dans la même foi. Nous ferons l’expérience d’un authentique sacré. Le sacré n’est pas pour nous chrétiens ce que le monde décide, par goût, par mode, envie ou conviction, de « sanctuariser ». Il est communion avec le Christ, Dieu fait chair, Tout-Autre et pourtant tout proche.
 
Cette expérience du sacré a une fonction éducative et sa disparition appauvrit inévitablement la culture, en particulier la formation des nouvelles générations. Pensons à une mère et à un père qui, au nom de la foi désacralisée, priveraient leurs enfants de tout rituel religieux : ils finiraient en réalité par laisser le champ libre aux innombrables succédanés présents dans la société de consommation, à d’autres rites et à d’autres signes, qui pourraient devenir plus facilement des idoles. Il en est malheureusement ainsi de nos jours. Notre propre désertion, notre lâche abandon des valeurs chrétiennes et des signes de la foi, laissent le terrain à d’autres signes d’expressions idéologiques et religieux. Il est symptomatique de constater combien la République, par exemple, se plaît à reproduire des signes religieux qu’elle présente comme l’aboutissement d’une pensée laïque qui libérerait l’homme des contraintes et des obscurités de la foi. Baptême républicain, ou plus récemment encore une nouvelle « panthéonisation » qui n’est rien d’autre qu’une canonisation laïque. Bref, autant de signes religieux vidés de la présence réelle du Christ.
 
Nous-mêmes, par notre comportement, par notre relativisme, ne vidons-nous pas le contenu et le sens des signes de la foi ? Comment peuvent-ils être encore un témoignage authentique et crédible ? L’affirmation de ce qui nous faire vivre ? Que cette célébration et la procession que nous vivrons en soient l’occasion joyeuse, paisible et renouvelée.
 
 
AMEN.
 
Michel Steinmetz

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