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samedi 15 juin 2013

Homélie du 11ème dimanche du Temps ordinaire (C) - 16 juin 2013

Les évangélistes ont tracé un portrait tellement noir des Pharisiens que ce mot a pris un sens péjoratif, synonyme d’hypocrite. Or le mouvement pharisien partait d’une excellente volonté. En terre d’Israël piétinée par les armées païennes et où la ferveur religieuse de beaucoup se relâchait, les Pharisiens se voulaient de vrais fidèles, décidés à appliquer la Loi de Dieu dans toute sa minutie et avec la plus extrême rigueur. Pour eux, ce n’était pas l’usage de la violence, préconisée par le mouvement zélote, qui apporterait la libération du pays mais au contraire l’obéissance la plus exacte possible à toutes les obligations de la Loi, donc à la volonté de Dieu. Acharnés à pratiquer les plus menus détails des observances, certains pharisiens en oubliaient l’essentiel ; les actes pieux et ascétiques se substituaient à l’amour et au partage ; la mentalité juridique durcissait les cœurs ; on se targuait d’être de meilleurs croyants que les autres, et on méprisait les pécheurs. On voulait faire son salut ! Pour cela, on se mettait « à part » (pharisien voudrait dire « séparé »).

Selon saint Luc, Jésus, à trois reprises, a accepté une invitation dans une maison pharisienne. Mais, à chaque fois, il ne se gênait pas pour démasquer l’hypocrisie. Ne faut-il pas alerter celui qui se croit en bonne santé alors qu’il est atteint d’une grave maladie ? Avec virulence, Jésus secouait ses hôtes pour leur ouvrir les yeux avant qu’il ne soit trop tard. Ce jour-là, Jésus est invité chez un Pharisien nommé Simon. Soudain, une femme se glisse subrepticement dans l’assemblée et s’agenouille derrière le divan où Jésus est allongé (on avait alors adopté les mœurs grecques des repas solennels).

Le texte suggère que, dans une circonstance non racontée, cette femme a rencontré Jésus, elle lui a avoué son état de péché et Jésus lui a offert gracieusement le pardon. D’où son effervescence, son allégresse qu’elle ne peut contenir, sa gratitude qu’elle exprime par ses gestes un peu fous accomplis ici devant tout le monde. Sa vénération, sa façon d’honorer Jésus montre de quelle immense miséricorde elle a bénéficié. Enfermée dans sa faute, réputée « impure » par l’entourage pharisien, condamnée sans appel, elle venait d’être libérée par le pardon. Comment ne pas faire mille folies lorsqu’on reçoit pareille libération, lorsqu’on se voit restituée dans sa pureté ?

« Mais celui à qui on pardonne peu montre peu d’amour » dit Jésus à Simon. Toi, tu es un honnête homme, tu n’as pas connu de grosses défaillances, tu te crois irréprochable, tu n’aurais même pas l’idée d’implorer pitié - en tout cas pas à moi, Jésus. Tu m’as reçu par curiosité, de façon très froide, polie mais sans plus. Tu désirais sans doute avoir avec moi une conversation intéressante sur des questions de théologie, de morale, de liturgie mais sans jamais te remettre en question. Elle, parce qu’elle était tombée très bas, désirait être sauvée et elle a cru dans la parole de pardon que je lui adressais. Et Jésus de dire à la femme : " Ta foi t’a sauvée. Va en paix ". Evidemment ce mot provoque l’effarement, le scandale.

Nos assemblées réunissent des bons pratiquants honnêtes, appliqués à faire leurs devoirs, persuadés qu’ils sont « des gens bien » et se tenant quitte en chantant distraitement « Seigneur prends pitié ». Aujourd’hui en des temps difficiles, quand tout autour de nous semble se déliter de la foi chrétienne, au moins de la manière dont nous l’avons vécu et pratiqué jusqu’ici, certains sont tentés par le repli dans un cercle des « convaincus, des engagés ». Sans doute, même en notre Alsace, nous ne pourrons plus être chrétiens sans nous laisser remettre en question, sans nous engager, sans payer de notre personne pour suivre le Christ. Si le christianisme doit donner l’impression d’être une religion d’un doux confort, alors il faut se méfier : un tel christianisme n’est pas l’école de l’évangile à la suite de la croix de Jésus. Restons-nous des pauvres, acceptons-nous de le devenir, suspendus à l’Infinie Miséricorde ?

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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