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vendredi 7 juin 2013

Homélie du 10ème dimanche du Temps ordinaire (C) - 9 juin 2013

Si l’événement de la résurrection d’un garçon à Naïn, petit village au sud-est de Nazareth, avait été raconté sur le champ par un journaliste présent, quel tintamarre, gros titre, accumulation de détails, appel à l’émotion, cris, larmes. Mais Luc raconte le fait cinquante ans plus tard, de façon très sobre, comme s’il s’agissait d’un incident somme toute ordinaire : rien de sensationnel, nul effort pour convaincre de la réalité du fait. Jésus se rendait dans une ville appelée Naïn. Ses disciples faisaient route avec lui, ainsi qu’une grande foule. Il arriva près de la porte de la ville au moment où l’on transportait un mort pour l’enterrer : c’était un fils unique et sa mère était veuve. Une foule considérable accompagnait cette femme.
Deux foules se rencontrent inopinément : Jésus suivi par ses disciples, émerveillés par ses guérisons miraculeuses, et un cortège funèbre où les gens pleurent autour d’une maman effondrée, avec des pleureuses qui crient des lamentations. La joie et la tristesse. La vie et la mort. L’espérance et la tragédie.

Jésus voit cette mère écrasée de chagrin, il est touché, il agit.
Le mot « pitié » est bien trop faible pour traduire Luc qui écrit : « Jésus est bouleversé aux entrailles », un verbe qui n’est utilisé par les évangélistes que pour Jésus. Il est touché au plus profond de son être devant les hommes perdus, devant les foules affamées, devant les pauvres…
Nous, trop souvent hélas, nous essayons de ne pas voir les faits qui nous dérangent, ou nous ressentons une vague pitié qui nous serre le cœur un instant et, la larme à l’œil, nous sentant impuissants, nous retournons à nos affaires en tentant d’oublier au plus vite. Jésus, lui, ose regarder vraiment l’autre souffrant, il entre dans son affreux malheur, il en est retourné comme une mère qui perd « le fruit de ses entrailles » ; ce drame l’interpelle, il se sent « responsable » (tenu de répondre) ; il s’approche au lieu de fuir ; il passe à l’action.
« Je te l’ordonne : lève-toi » : ce verbe tout simple est un des deux que les apôtres emploieront pour désigner la Résurrection de Jésus à Pâques : « Son Père l’a relevé…Il s’est réveillé ». Mais tandis que le jeune homme bénéficie d’un sursis qui lui permet de retrouver sa mère, de vivre encore quelques années sur cette terre avant de connaître une mort définitive, Jésus, lui, vivra de la Vie éternelle. C’est pourquoi il conviendrait mieux de parler ici de la « réanimation » de ce jeune plutôt que de sa « résurrection ».

Là où l’homme fait l’expérience de sa faiblesse et de la précarité de son existence, il fait aussi l’expérience de la puissance de Dieu, plus forte que la mort. Nos lamentations et nos interrogations sont vaines face à la mort, vaines aussi nos paroles de réconfort et de compassion. Les deux mères de la première lecture de l’évangile ont perdu leur plus cher trésor en la personne de leur enfant, et nul ne peut rien pour elles, sauf Dieu. La prière d’Elie sera vaine également, si elle ne suscitait pas cette merveilleuse réponse divine du souffle vivant et vivifiant. Elie s’efface devant le prodige, et la femme a compris quelle en est la source : « Maintenant je sais que tu es un homme de Dieu ».
Bien plus qu’un homme de Dieu et bien plus grand qu’un prophète, Jésus, le propre Fils de Dieu, dit : « Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi et marche ! ». Qui aurait l’audace de commander la mort, sinon Dieu ? Sa compassion pour la mère anéantie n’a pas été une simple sympathie humaine, comme celle de la foule. C’est un amour puissant et agissant qui annonce déjà la vraie résurrection, au matin de Pâques.

Notre société moderne est très fière de s’être débarrassée des vieilles superstitions religieuses et des légendes de la Bible : la seule chose qui vaille, c’est de goûter le bonheur, profiter de la vie, aménager un nid douillet, jouir des loisirs inédits, donc gagner plus d’argent et se divertir. Pourtant la mort demeure. Mais en osant, malgré tout, chanter la victoire de Pâques, la communauté chrétienne compatissante célèbre le retour du Fils unique et, à sa suite, des fils « se lèveront » pour ne plus jamais mourir.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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