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samedi 6 septembre 2008

Homélie du 23ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 7 septembre 2008

« Fils d’homme, je fais de toi un guetteur pour la maison d’Israël ! ». Devenir un guetteur, c’est-à-dire devenir celui qui, du haut des murailles de la cité, remplit cette haute charge de détecter le danger lorsqu’ils survient, de prévenir ses compagnons afin de garantir leur sécurité. Le guetteur accomplit son service avec zèle et attention, sans une once de relâche qui pourrait s’avérer fatale. Il est encore celui qui sait voir au loin, qui scrute et discerne. Cette mission est certes confiée au prophète, mais Jésus, dans l’évangile, nous rappelle que nous en sommes aussi dépositaires. N’avons-nous pas été faits, à notre baptême, « prêtre, prophète et roi », à la suite du Christ ?
Pourtant, j’ai déjà tant de mal avec mon propre péché et voilà que le Seigneur veut que je me mêle de la santé spirituelle de mes frères ! Non, croyez m’en ! Que chacun s’occupe de ses propres oignons, sans quoi ce sera la pagaille, non ? Imaginez si chacun se prenait de réprimander autrui !
Que signifie donc ce précepte de la correction fraternelle ? Si je dois reprendre mon frère qui a péché, c’est pour moi, c’est pour lui, c’est pour l’Eglise.

I.- Pour moi, tout d’abord.

La première lecture nous enseigne que le salut du prophète dépend de l’exercice de son ministère : il ne « sauvera sa vie » que s’il a « averti le méchant d’abandonner sa conduite ». Entendons bien : le Seigneur ne rejette pas le prophète qui aurait failli ; mais l’indifférence de celui-ci trahirait qu’il n’est pas - ou qu’il n’est plus - en communion avec Dieu, « qui fait lever son soleil lui, sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les justes » (Mt 5,45).
"Si ton frère a péché…" Tout d'abord, ne jamais oublier que celui qui a péché, c'est "mon frère". Avant d'être un coupable à punir, il est un frère à aimer. Cela change tout par rapport au regard que nous allons porter sur lui. Ce ne sera plus un regard soupçonneux ou accusateur, mais un regard qui accueille et redonne confiance. Jésus se présente à nous comme le médecin par rapport aux malades spirituels que nous sommes tous.
Si Jésus nous demande d'agir avec patience et délicatesse, c'est parce que lui-même agit ainsi. Et s'il agit ainsi c'est parce que son Père agit ainsi. Jésus avance lentement, s’il le faut, il marche à mon rythme. Il ne se décourage pas devant mes difficultés à me corriger. Là où le péché a abondé, son amour a surabondé. C'est ainsi que chacun de nous doit agir vis-à-vis de ses frères.
Vous l’aurez compris, c’est à notre propre conversion que le Christ nous appelle. Car, comment souhaiter la conversion des autres sans d’abord penser à la sienne propre ? Telle cette grand-mère qui disait : « Vingt ans j’ai prié pour la conversion de mes petits-enfants jusqu’au jour où j’ai entendu : ‘Et la tienne, Madeleine ?’. »

II.- Pour mon frère, ensuite.

Le pécheur est, hélas, toujours sa propre victime. C’est à nous-même d’abord que nous faisons le plus grand mal en succombant au péché, parce que nous nous éloignons de Dieu.
Nous devons faire cependant très attention à ne pas nous tromper sur le sens de cet évangile : vouloir "corriger" son frère, lui faire la morale, lui dire ses quatre vérités, c'est une manière de justifier tous les anathèmes lancés au nom de Dieu, c'est la porte ouverte à tous les fanatismes, tout cela au nom de l'idée que nous nous faisons de Dieu. Nous oublions alors que Jésus en est le centre. Il veut la vie et non la mort du pécheur. C'est autour de lui que doit se construire l'unité de ses disciples.
Lorsque quelqu'un se noie ou est victime d'un accident, la loi nous impose de lui porter secours. Si nous ne le faisions pas, nous serions coupables de non-assistance à personne en danger. Aujourd'hui, l'évangile nous rappelle que ce danger n'est pas que matériel. Il peut aussi atteindre l'esprit, l'âme et le cœur. Il peut compromettre l'équilibre psychologique et affectif d'une personne.

III.- Pour l’Eglise, enfin.

L’Eglise n’est pas un tas de sable, une poussière d’individus insulaires. Elle est ce grand corps dont nous parle l’apôtre Paul. Un membre est-il affecté ? C’est tout le corps qui souffre. Un membre est-il corrompu ou malade ? C’est tout le corps qui en pâtit. Croyez-vous que l’un de nous puisse faire le mal sans que cela nous affecte tous ?
A la question de Caïn « Suis-je le gardien de mon frère »[1], Jésus répond sans hésiter : « Bien sûr, puisque je te l’ai confié ; comment pourrais-tu prétendre m’aimer, sans porter le souci de ceux que j’aime ? » Si le prophète Ezékiel est établi comme guetteur pour la Maison d'Israël, c’est la même mission qui est confiée à l'Eglise d'aujourd'hui. S charité doit être non seulement prévenante, il faut qu’elle soit aussi guérissante. En tout ce qu’elle entreprend, elle doit viser non seulement à la construction de la communauté dans l’unité, mais aussi au maintien de sa paix, en la gardant dans la vérité de l’Evangile. Et il faut nous souvenir que nous ne sommes pas propriétaires, mais « serviteurs » de la Parole de Dieu : « L’Eglise envoie des évangélisateurs … prêcher non leurs idées personnelles, mais un Evangile dont ni eux ni elle ne sont maîtres et propriétaires… mais dont ils sont ministres (serviteurs) pour le transmettre avec une extrême fidélité. », écrivait Paul VI [2]. Et ceci ne vaut pas que pour les communautés paroissiales ou religieuses : nous portons cette responsabilité au cœur de tous les groupes humains que nous fréquentons : familiaux, professionnels, associatifs.

Cet évangile se termine par un appel à la prière. Quand deux ou trois sont réunis en son nom, il est là. Il est présent tout comme au Cénacle parmi les apôtres. Il veut entrer toujours plus dans notre vie personnelle, familiale, professionnelle pour la rendre de plus en plus conforme à son amour. En venant à l'Eucharistie, nous accueillons tout cet amour qui est en lui pour mieux le communiquer aux autres.

AMEN.

Michel Steinmetz †
[1] Gn, 4, 9.
[2] Paul VI, Exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi », 8 décembre 1975.

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