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mercredi 4 janvier 2012

Homélie pour le Saint Jour de Pâques 24 avril 2011

Le premier jour de la semaine. Premier jour que le dimanche, lendemain du sabbat, jour consacré au repos, repos d’un Dieu à l’issue de sept jours de la Création, rappelez-vous. Premier jour et jour d’une aube nouvelle, car « Dieu fait toutes choses nouvelles ». Voilà le tournant de la Pâque de Jésus pour l’histoire de l’humanité et l’histoire de l’univers. Là où tous, depuis toujours, voyaient en la mort la fin ultime de toutes choses, désormais, en Jésus, cette fin devient relative : elle est passage. Elle n’est pas supprimée, elle est transformée, toute habitée de la présence de Dieu, tel que l’écrit Claudel.

Alors qu’il fait encore sombre. Il fait sombre ce matin-là. Le jour tend à se lever. Sans doute pareille obscurité règne dans les cœurs des disciples et des femmes qui se rendent au tombeau. Depuis trois ans, ils avaient placé en leur Maître et Seigneur une espérance folle, chacun avec ses motifs, ses espoirs propres. Tous avaient vu en Jésus celui qui pourrait changer leur vie. Pour les uns, celui qui réaliserait les promesses de Dieu ; pour les autres, celui qui instaurerait le règne de Dieu ; pour d’autres encore, celui qui répondrait à leurs attentes personnelles. Au soir du Vendredi-saint, à la descente de la croix, toutes ces espérances sont déçues. Avec, peut-être, l’amertume de s’être fait duper, en quelque sorte. Finalement, et malgré tous les rêves d’un monde meilleur, rien ne pourra y faire. C’est ainsi. Même Dieu n’est pas assez puissant.

On a enlevé le Seigneur de son tombeau. A la vue de la pierre roulée et du corps disparu, la réaction des femmes est humaine. Il y a une explication rationnelle : si le corps n’est plus là, c’est qu’on l’a enlevé. Malheur de plus qui se rajoute à leur peine. Alors l’agitation gagne le groupe. Pour authentifier les dires, deux disciples, Pierre et Jean, courent au tombeau. L’évangéliste insiste sur le fait que Jean, à cause de son jeune âge ?, arrive le premier ; il laisse cependant la préséance à Pierre, plus âgé et peut-être victime de l’arthrose qui touche les pêcheurs comme lui. Le chef des apôtres entre dans le sépulcre.

Il vit et il crut. L’expérience est radicale pour Jean. Elle est relatée en fort peu de mots. La vision du linceul posé à sa place suffit à susciter la foi. C’est vrai. Tout s’éclaire. Jésus est réveillé du sommeil de la mort, il est ressuscité. La foi dans le Christ ressuscité s’enracine sur une expérience, sur un compagnonnage. Si Jean, entrant dans le tombeau, peut, à la vue du linceul posé là, non seulement voir mais croire, c’est que son cœur et son intelligence ont été disposés à cet acte de foi. Il y a été préparé. Il s’est laissé nourrir, enseigner et aimer par Jésus. Alors la seule vision du tombeau vide suffit, par-delà le désarroi du Vendredi-saint, à raviver son espérance. Le chemin de vie avec Jésus et la grâce de l’Esprit lui valent de témoigner ainsi. Mais malgré les annonces de la Passion, malgré tous les signes réalisés par Jésus, et dont les évangiles de ce carême nous ont fait partager l’expérience, malgré trois ans de compagnonnage quotidien et de proximité spirituelle, rien n’y a fait. Le voile demeure jeté sur le mystère et les disciples n’avaient toujours pas compris ce qui, vraiment, était en jeu. Mais le pouvaient-ils devant l’indicible de Pâques ? Les premières générations chrétiennes elles-mêmes, pour parler de l’évènement pascal, ont dû employer des paraphrases pour désigner la résurrection. Aucun terme n’existait alors comme tel dans le vocabulaire pour dire que quelqu’un est vivant après la mort !

Il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts. La résurrection du Christ agit comme le centre de gravité de l’histoire du monde. Elle est le point qui fait basculer l’histoire dans une ère nouvelle. L’eucharistie est un de ces lieux où cette réalité se vérifie. Si le Christ, en effet, n’est pas ressuscité, alors l’eucharistie est vaine. Le repas eucharistique est vide de sens. Ni la seule insistance sur la communauté rassemblée, ni les symboles repensés ne sauraient la remplir. L’eucharistie est l’expérience de la résurrection, parce que le Ressuscité est devenu comestible ! C’est la nourriture de l’homme que Jésus déifie, c’est l’aliment de cette vie qui dépasse la mort. Un peu de levain, dit l’apôtre Paul (cf. 1 Co 5, 6b), suffit « pour que toute la pâte fermente ». Ce ferment, c’est la résurrection que nous fêtons aujourd’hui, non comme un évènement passé, mais comme un évènement qui ne cesse de bousculer nos manières de voir trop humaines. Le levain est dans la pâte. Il nous faut nous débarrasser des vieux ferments pour accueillir la radicalité de qui se joue avec la Pâque de Jésus.

Il vit et il crut. Puissions-nous, comme Jésus, cheminer avec Jésus, entrer dans son intimité, pour que le voile tombe et que notre foi en soit transfigurée. « Il vit et il crut ». Je vois, dès maintenant, et je veux croire.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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