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lundi 18 juillet 2022

Départ de la communauté de paroisses St-Maurice et St-Bernard de STRASBOURG

Après quatre années de présence comme curé de la communauté de paroisses St-Maurice et St-Bernard, Michel STEINMETZ rejoint à la rentrée la faculté de théologie catholique de l’université de Fribourg (Suisse). Il y a été élu professeur ordinaire de Sciences liturgiques / Liturgiewissenschaft et directeur de l’institut éponyme.

Il tient à remercier chacune et chacun pour les mots, pensées, prières, attentions reçus à l’occasion de son départ !



Dimanche 26 juin 2022

REMERCIEMENTS à l’issue de la célébration


Sois remercié, cher Benoît, pour tes paroles que, j’imagine, tu exprimes au nom d’autres… Aimables et délicates, un tantinet laudatives… onctueusement taquines ! Il faut bien confesser que j’aime l’action, et même – osons le tout pour le tout, la conduire ! Mais j’aime moins en être le centre. Alors que venons-nous de faire ? Il n’était nullement question d’un « au-revoir » car la liturgie n’en connaît qu’un (et encore…) : celui des funérailles. Nous avons rendu grâce pour une année pastorale qui s’achève, et plus largement – il est vrai - pour quatre années passées ensemble sous le double patronage des saints Maurice et Bernard. Finalement quatre courtes années, plus courtes que je ne l’imaginais, et marquées pour nous tous par une pandémie qui fera date dans l’Histoire avec ses épisodes déconfinements et déconfinements. Bien des choses ont ainsi été rendues difficiles voire impossibles, notamment en termes de rencontres fraternelles. Il a fallu être imaginatifs, inventer des pis-aller pour que la mission demeure et se poursuive. La pastorale n’était pas équipée pour faire face à cela, mais, paradoxalement, cela aura suscité des enthousiasmes et des collaborations nouvelles. Cela aura peut-même fortifié plus rapidement encore un apprivoisement réciproque.

En premier lieu, j’aimerais remercier chacune et chacun, personnellement, pour ce qu’il a pu m’apporter comme trace de la présence et de la bonté de Dieu. J’aimerais demander pardon à celles et ceux que j’aurais pu blesser ou offenser, celles et ceux à qui je n’ai pu accorder le temps qu’ils auraient souhaité.
Ensuite, je souhaite porter encore dans ma prière vos familles, avec les joies que vous m’avez partagées, parfois aussi vos tristesses et vos interrogations ; porter dans la prière les jeunes et tout particulièrement nos servants d’autel, les enfants et les jeunes de l’institution Sainte-Clotilde dont j’ai eu la joie d’être l’aumônier, mais aussi nos aînés et nos malades. 
Je veux aussi rendre grâce pour les collaborations heureuses vécues au milieu de vous, votre enthousiasme d’annoncer le Christ vivant, votre volonté de témoigner de sa charité prévenante, votre désir de faire monter vers le Seigneur une louange digne et fervente !

Enfin, vous me permettrez de vous dire que j’ai essayé de faire au mieux ce que je sais faire, pour vous et avec vous. Tenter d’avoir une vision pour notre pastorale en l’inscrivant dans la durée, en essayant de discerner les mutations profondes et les besoins nouveaux qui dessinent imperceptiblement l’avenir. Ensuite donner à la communauté les moyens dont elle a et aura besoin pour tenir son rôle au cœur du quartier : sa visibilité, sa proximité, son rayonnement. Je songe ici évidemment aux récents travaux entrepris à Saint-Maurice, mais aussi à l’ouverture chaque jour de nos églises et au soin particulier apporté leur entretien. Nos édifices disent quelque chose de notre foi ; ils en sont même en-dehors de nos célébrations les témoins silencieux. Que celui qui ne croit pas et entre ici découvre en ce lieu un peu de la paix de l’Evangile ! Mais comment ne pas citer aussi l’aménagement des locaux à St-Bernard pour l’Equipe Saint-Vincent, si précieuse et nécessaire à la crédibilité de notre foi ? Avec elle, la foi ne se paye pas de mots. Elle se vit dans l’accueil et le don.

Je vous invite à accueillir mon successeur avec bienveillance et patience. Je souhaite pour lui un début de ministère plus paisible que n’a été le mien mais je sais pouvoir compter sur vous. Ne soyez pas prompts dans le jugement ou la critique ! Prenez le temps de vous découvrir et de vous apprécier !

Je formule le vœu pour la communauté paroissiale : qu’elle reste attachée au cœur de notre ville à un catholicisme joyeux et positif, pas celui qui enferme ou qui exclut, mais celui qui accueille, propose et accompagne, pas celui des replis identitaires mais celui qui ose aller vers l’autre en étant fier du message que nous portons. Le Christ est venu nous aimer et nous sauver, et si c’est l’Evangile est une bonne nouvelle, ce n’est pas pour rien. Je termine avec la phrase que j’avais choisie pour mon ordination sacerdotale, il y a dix-neuf ans : « Cherchez le Royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par surcroît » (Mt 6, 33). 


Michel STEINMETZ +

Homélie pour le 13ème dimanche du Temps ordinaire (C) - 26 juin 2022

Messe d'action de grâce au terme du ministère de curé


On pourrait croire qu’un esprit rusé, rempli d’à-propos, a choisi le passage de l’évangile de Luc que nous venons d’entendre. Car il semblerait qu’il soit question aujourd’hui, aussi, d’un au-revoir. En fait, cet évangile, ces lectures, sont les mêmes partout, en chaque église, en ce jour. Si ce ne sont pas des paroles de circonstance, il f
aut bien avouer qu’elles tombent à point nommé, notamment au moment où une année pastorale, scolaire, universitaire touche à sa fin. Regarder en arrière, faire des bilans, évaluer son action. Mais est-ce là une bonne manière de faire ? N’est-ce pas une manière de centrer notre action sur notre personne, notre capacité à agir ou à entreprendre, notre prétention à la réussite ?


A entendre l’évangile, la méthode serait plus à aller de l’avant, inexorablement. Jésus lui-même, précise Luc, tout en marchant vers sa passion, prend la route de Jérusalem avec un « visage déterminé ». Le moteur de la marche de Jésus est d’accomplir la volonté du Père, sans délai, d’être fidèle à la mission qui est la sienne. La mission ne saurait s’exercer de n’importe quelle manière. Jésus en rappelle ici les conditions et la radicalité au travers les trois rencontres qu’il fait et que Luc nous rapporte. Car, suivre le Christ n’est pas une affaire comme une autre qui puisse se concilier avec des exigences parallèles ou contraires. Tout ce qui s’oppose à cette mission est appelé à être par nous abandonné et rejeté. Jésus précise dans sa première réponse qu’un certain inconfort va de pair avec le service de l’Evangile ; nous parlerions volontiers de ces tiraillements entre discours tenu et témoignage réel, entre attitude d’accueil inconditionné et exigences nécessaires, entre sentiment personnel et sens de l’Eglise. Dans les deux dernières rencontres, Jésus insiste sur le fait que la mission ne suppose pas de délai. Et plus particulièrement dans la troisième : « Je te suivrai, Seigneur; mais laisse-moi d’abord faire mes adieux aux gens de ma maison. - Celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n’est pas fait pour le Royaume de Dieu ». Ces paroles évoquent l’appel d’Elisée par Elie ; Jésus se montre plus exigeant encore que le prophète qui laissait son disciple prendre congé des siens. Qui marche à la suite du Christ doit savoir qu’il est le disciple d’un homme qui, une fois engagé dans sa mission, n’a pas à regarder en arrière.


L’engagement à la suite de notre vie n’est pas une option de notre vie. Il n’est pas de l’ordre d’un loisir salutaire que nous consentirions à pratiquer parmi d’autres. Autrement dit, il n’est pas négociable. Tu prends tout, ou tu ne prends rien. Dire cela aujourd’hui pourrait paraître dangereusement fondamentaliste. Pourtant ! Le Royaume de Dieu ne se négocie pas. Tout simplement parce que Dieu ne peut se résoudre à nous sauver « à moitié », « à demi ». Ou bien nous acceptons qu’il nous prenne tout entier dans son amour qui nous brûlera et nous purifiera, ou bien nous restons en-dehors. Pour avancer sur ce chemin, il faut développer une profonde liberté intérieure capable de discerner et de poser des choix. Le Christ lui-même est profondément libre quand il prend la route vers Jérusalem et ce qu’Il va y vivre consiste précisément à pouvoir Le suivre dans cet acte prodigieux de liberté. Déjà par notre baptême nous goûtons à cette « sainte liberté des enfants de Dieu ». La vie se charge volontiers de nous enchainer à nouveau par bien des manières ; Paul, lui, nous exhortait à ne pas retomber sous le « joug de l’esclavage », c’est-à-dire à ne pas revenir en arrière, et à purifier notre liberté en la confrontant au service des autres. Et Augustin d’affirmer : « Aime et fais ce que tu veux ! ». Dans la Bible, la femme de Loth, qui se retournant vers Sodome, est pétrifiée (Gn 19, 26) : transformée en statue de sel. Regarder en arrière, vivre dans des souvenirs, ou regretter un passé qui ne reviendra plus par définition pétrifie en empêchant de suivre le Christ. 

Alors que convient-il de faire ? J’en appelle à la perspicacité de ce bon vieux et sage Juif, Gamaliel, dans les Actes alors que les apôtres comparaissent devant le Conseil suprême : « Si leur résolution ou leur entreprise vient des hommes, elle tombera. Mais si elle vient de Dieu, vous ne pourrez pas les faire tomber. » (Ac 5, 38-39) Rendons grâce pour ce que Dieu fait ! Le reste tombera et s’évanouira dans l’oubli.


AMEN.


Michel STEINMETZ †