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vendredi 31 décembre 2021

Homélie pour la solennité de l'Epiphanie - dimanche 2 janvier 2022

Devant un certain raidissement des positions, digne parfois d’une guerre des tranchées, et d’un repli identitaire assez typique du catholicisme français, certains donneraient l’impression d’avoir mis Dieu sous cloche. L’Eglise serait une citadelle assiégée et le devoir des bons soldats que nous devrions être serait alors d’enfermer Dieu au donjon en attendant des jours meilleurs. Ce jour la visite des mages vient faire tomber les murs de la forteresse. Car ce jour, celui où nous célébrons l’épiphanie, c’est-à-dire la manifestation du mystère de Dieu en son Fils Jésus, nous redécouvrons que c’est Dieu qui demeure à la manœuvre, toujours et de toutes les manières.


De fait, alors qu’on peut supposer à bon droit que les bergers de la nuit de Noël étaient des croyants juifs, on peut imaginer que le message des anges n’était pas tombé dans des oreilles incultes. L’espérance d’Israël devait leur dire quelque chose. Peut-être la partageaient même-t-ils avec ardeur ? Aujourd’hui l’évangile prend bien soin de préciser, par contre, que les visiteurs sont « des mages venus d’Orient ». La manière dont ils posent leur question à Hérode traduit leur inculture : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? ». Ils ne sont pas mus par leur grande connaissance des Ecritures et des prophéties qu’elles contiennent. Peut-être ne les ont-ils jamais lues ? Ils se fient à une étoile qu’ils ont vu apparaitre dans leur contrée lointaine. De toute évidence ce sont des hommes de science. La rationalité les a mis en route. C’est à la fois leur langage et leur méthode. Nous pourrions penser qu’ils n’ont pas les codes pour aller au Messie de Dieu, et donc qu’ils ne pourront le trouver. Ils ne partagent rien avec Israël, ni la nationalité ni la foi. Ce sont des étrangers et des païens. 


Pourtant Dieu a décidé de parler leur langue et d’utiliser leur méthodologie propre. Par une ingénierie, dont Dieu seul a le secret, il va les guider à Lui. Ils arrivent à l’endroit où l’astre semble s’immobiliser, marquant la demeure de l’enfant recherché. Leur quête n’est donc pas dû au hasard. Là ils comprennent enfin que leur quête dépasse leur entendement à la joie profonde qu’ils ressentent. « Tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. » Leur geste – se mettre à genoux – manifeste leur révérence devant le mystère à eux manifesté. Là encore sans doute n’ont-ils pas les clés pour comprendre précisément et rationnellement ce qui est en jeu. Une fois encore Dieu les précède : par les présents qu’ils offrent à l’Enfant, ils disent, telle une prophétie, qu’il est roi, mais un roi bien différent de ceux du monde ; qu’il est véritablement Dieu car l’encens est le propre de l’offrande au divin ; qu’il sera appelé à être mis au sépulcre car la myrrhe sert à l’ensevelissement des morts. 


Par un effet de singulier retournement, ces hommes, à la poursuite d’un phénomène pour eux inexpliqué, découvrent par l’effet de la grâce Celui qui est à l’origine de tout, la Parole créatrice, le Verbe de Dieu. Et comme pour montrer ce retournement, les mages-scientifiques s’en retournèrent par un autre chemin, car ils comprirent que leur attente a été dépassée par cette rencontre et qu’il y a ici bien plus que le roi des Juifs. L’expérience des mages rejoint celle qu’évoquait Paul de la deuxième lecture ; lui qui expérimenté ce « en quoi consiste la grâce que Dieu m’a donnée pour vous : par révélation, il m’a fait connaître le mystère. »


Alors que par un noble effet de peur, de préservation, de mise en sécurité, nous pourrions être tentés de garder Dieu pour nous, de n’en livrer le mystère qu’à celles et ceux que nous jugerions capables et dignes de le recevoir, les mages venus d’Orient nous rappellent avec force combien l’épiphanie de Dieu ne connaît pas de limites. Contemplons ce mystère dans l’humilité et dans la gratitude d’en être nous aussi illuminés. « Ce mystère, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile », sans exclusion.


AMEN.


Michel STEINMETZ †


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