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mardi 6 avril 2021

Homélie pour le dimanche des Rameaux et de la Passion (B) - 28 mars 2021

 Le temps impatient de la foule


Voici trois ans que Jésus annonce que le Règne de Dieu est désormais tout proche, et même qu’il est déjà là. Au gré de ses pérégrinations en Galilée et ailleurs, des disciples l’ont rejoint. Sans doute des personnes qui ont ouvert leur cœur et se sont laissées toucher. Avaient-elles particulièrement souffert dans leur vie ? Portaient-elles en elles des blessures encore vives ? Nous ne le savons pas. Par contre ce que nous savons, parce que l’Evangile nous le dit, c’est que toutes ces personnes ont été touchées tant par les paroles de Jésus que par ses actes. Parce qu’en Jésus, les paroles et les actes coïncident : ils ne font qu’un. Alors ils cheminent dans cette certitude que, lui, contrairement à tous les puissants qui les gouvernent, fussent-ils juifs ou romains, tous vautrés dans l’hypocrisie, est différent. Les apôtres constituent le premier cercle rapproché avec les femmes qui suivaient le groupe : ils sont introduits dans les mystères divins et Jésus les prépare à ce qui va, à partir d’aujourd’hui, se passer. D’autres ont été intermittents, c’est vrai : les hommes et les femmes d’un moment, mais là encore l’évangile reste discret sur la manière dont la rencontre avec le Christ a changé leur existence. Tous, de cette foule bigarrée, ont ceci en commun : ils attendent avec foi que Dieu instaure son temps.


On comprend que l’impatience aille grandissant. Toute la foi d’Israël est sous-entendue par cette espérance latente que Dieu va tenir promesse. Malgré les infidélités du peuple, les prophètes exhortent à la conversion car, de la part de Dieu, ils l’annoncent : Dieu n’oubliera pas les siens. Mais le temps du salut et de la délivrance est un temps long. On s’impatiente. On aimerait tout, tout de suite. On rêve les yeux ouverts à un monde différent, à un monde « d’après », celui dans lequel les choses changeraient comme par miracle. Ce monde serait débarrassé des vieilles ornières dans lesquels on s’embourbait à l’envi. Enfin : plus de justice, de fraternité, d’amour. 


Le temps long du salut, le temps connu de Dieu seul, se heurte à l’impatience des impatients. Aujourd’hui l’impatience est à son paroxysme. Pourtant Dieu, en Jésus, a dit sa présence. Rien n’y fait. L’hostilité envers lui a grandi jusqu’au point de rupture. Jésus en a conscience : il pourrait se sauver en reniant qui Il est. Mais il sait aussi que le chemin qu’Il doit parcourir exige de lui la fidélité. « Abba... Père, tout est possible pour toi. Éloigne de moi cette coupe. Cependant, non pas ce que moi, je veux, mais ce que toi, tu veux ! ». Il comprend que le geste mystérieux, et pour une part largement provocateur, de cette femme dans la maison de Simon à Béthanie, annonce son ensevelissement futur. Une fois encore, pas de partition en lui : ce qu’il a dit du Royaume de Dieu, il le vivra. Devant le Sanhédrin, autant que devant Pilate, il ne revendiquera aucun titre mondain. Il n’est pas venu pour cela. « Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. » Il consent à l’abaissement du serviteur, de celui dont Isaïe disait que l’oreille est en éveil pour mieux entendre. Il ne va ni se dérober, ni se révolter.


En lui, le temps du salut va tenir tête au temps impatient des hommes. Sa mort, dans l’obéissance de la croix, va réconcilier notre humanité avec l’éternité de Dieu. Nous aussi, nous sommes les femmes et les hommes d’un moment, nous avons du mal à tenir le temps long, nous n’en pouvons plus d’attendre le temps d’après, qu’il soit celui d’après la pandémie, ou celui qui viendra changer quelque chose dans nos vies que nous jugeons parfois trop monotones. L’impatience de la foule l’a fait basculer dans la haine sordide du : « Crucifie-le ! Crucifie-le ! », cinq jours seulement après les hourras de l’entrée à Jérusalem. Frères et sœurs, n’allez pas trop vite en besogne, et laissez Dieu vous conduire à son rythme. C’est là que sa vie grandira dans la vôtre. 



AMEN.


Michel STEINMETZ †


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