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lundi 30 décembre 2013

Homélie de la solennité de Sainte Marie, Mère de Dieu - 1er janvier 2014

Les unes après les autres, selon les fuseaux horaires, les télévisions retransmettent les scènes habituelles des foules rassemblées, cette nuit, au cœur des capitales du monde pour égrener le compte à rebours. Et sous les feux d’artifice, le champagne coule à flot tandis que les gens hilares s’embrassent, en répétant les souhaits traditionnels : « Bonne année et surtout bonne santé ! ». Joie d’une race humaine si angoissée devant l’avenir et dont les vœux parfois superficiels, souvent sincères, restent toujours pathétiques : comment conjurer la fatalité avec des mots ? D’ailleurs pourquoi le faire à une date arbitraire : pourquoi le 1er janvier et non le 20 mars avec le printemps ou le 1er septembre avec la rentrée ? L’année civile n’est qu’un nouveau tour de piste, après et avant des millions d’autres.

En décalage avec elle, l’année liturgique est (ou devrait être) la grande lumière de signification, l’école d’humanisation du monde, la façon de nous faire vivre le temps en profondeur. L’Avent nous a rappelé que l’histoire a un sens, que les époques passées étaient des étapes vers un accomplissement, qu’il fallait vivre sans nostalgie du passé en ne cessant de préparer les voies du Seigneur. Noël a fait scintiller une petite lumière dans la nuit : nous ne sommes plus seuls, Dieu s’est glissé dans notre humanité pour mener, avec nous, la grande lutte contre le mal et l’absurde. Aujourd’hui, dans l’octave de Noël, au seuil de l’année civile nouvelle, la liturgie nous donne les mots qui nous serviront à dépasser les souhaits impuissants afin de nous communiquer la bénédiction, la force de Dieu pour poursuivre le rude chemin d’être homme. Elle nous place aussi sous la garde de Celle que l’on ose appeler « Mère de Dieu ».

Dans le vocabulaire chrétien, la bénédiction n’a plus qu’un sens dévalué : le prêtre, d’un geste furtif, trace une petite croix sur une statuette ou une médaille ; parfois on lui demande de bénir une maison ; et, dans la hâte de quitter l’église, on ne prête guère attention à la bénédiction que le célébrant trace sur l’assemblée pour conclure la célébration eucharistique. Or, dans la Bible, la bénédiction tient une place essentielle. Bénir ne se réduit pas à un « bien-dire » (latin : bene-dicere) : lorsque Dieu bénit ses créatures, il ne dit pas seulement une belle phrase mais Il leur communique sa puissance de Vie pour les rendre actives, fécondes. La bénédiction biblique joue dans les deux sens : de haut en bas Dieu répand sa grâce et, en retour, de bas en haut, l’homme « bénit » son Dieu, il lui exprime sa reconnaissance, sa gratitude, sa joie d’être connu et sauvé. En somme, la bénédiction, dans son « aller-retour », est révélation d’un Dieu bon et exultation de l’homme à sa juste place. Avec le Christ, la bénédiction est finalement le rappel que ce qui vient de Dieu peut rejoindre l’homme et ce qui vient de l’homme est digne de Dieu.

L’évangile de ce jour nous montre Marie, jeune maman d’emblée plongée dans une situation bouleversante : « Marie cependant retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur ». Marie ne ne prononce pas un grand sermon pour expliquer la situation. Bouleversée, comme à l’Annonciation, jetée dans une aventure imprévisible, elle fait silence. Le voyage, la nuit, la pauvreté, le berceau en paille, la stupeur de Joseph, l’arrivée de ces petits pauvres… : elle enregistre tous ces événements et, dit exactement St Luc, elle « les symbolise » dans son cœur. Au sens antique, un symbole est une pièce brisée en deux et dont les morceaux doivent être réunis pour que l’on reconnaisse leur unité. Ainsi Marie subit un enchaînement de circonstances inouïes et elle tente de les joindre avec des pages des Ecritures. Le révélé et le vécu doivent « se cor-respondre » : en les joignant, en les « symbolisant », en les « méditant », ils doivent s’éclairer, manifester le dessein de Dieu donc donner confiance et ancrer dans la foi.

La bénédiction de Dieu n’a rien de magique, elle ne protège pas de tout par miracle. Avec Marie, la Bénie de Dieu, nous – les bénis – pouvons entrer dans cette année pleins de confiance. En méditant paroles de Dieu et événements, en les mettant sans cesse en relation, nous devinerons le doux Visage de notre Seigneur.

Michel STEINMETZ †



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