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dimanche 18 septembre 2011

Homélie du mercredi des Cendres (A) - 9 mars 2011

Et si Dieu venait ce soir nous susurrer dans l’oreille : « au fait, j’ai une mauvaise nouvelle pour toi, il te reste juste quarante jours à vivre sur cette terre. Dans quarante jours exactement, tu viendras vers moi pour l’éternité ». Malgré le fait que nous nous définissions comme chrétiens et chrétiennes, je ne suis pas du tout sûr que ce genre de nouvelle nous fera bondir de joie. Et si c’était tout simplement cela le carême.
I.- Les manques du monde

Dans un monde où les indicateurs de croissance sont revus à la baisse, où la précarité tend à s’installer jusque dans nos foyers dont le fameux « pouvoir d’achat » ne progresse pas, voici que nous, chrétiens, nous entrons en Carême. Nous sommes nous-mêmes de ce monde, de cette société. Nous sommes touchés par cette angoisse latente. L’avenir des peuples du bassin méditerranéen ne nous laisse pas indifférents : nous nous réjouissions d’une liberté retrouvée, d’un progrès en marche pour plus de dignité, de droits et de respects. Mais, aussi, nous nous interrogeons sur un nouvel ordre mondial : fera-t-il place à un obscurantisme ravageur ? Alors donc que l’actualité pointe les manques et leurs peurs, nous, chrétiens, nous mettons le manque en honneur. Nous avons commencé notre itinéraire pascal par une journée de jeûne, pour nous rappeler que les satisfactions et les plaisirs de ce monde ne sauraient nous rassasier.
II.- La grâce du manque

Et si tout simplement le manque devenait une grâce ? Non qu’on s’en satisfasse ou qu’on le justifie. Le manque comme une chance. Oser nous rappeler que nous sommes toutes et tous des êtres mortels, qu’il y a une limite au bout de notre vie terrestre, une échéance par laquelle nous passerons. La vie nous a été donnée. Notre vie s’inscrit dans un temps, nous le croyons immortel mais ce temps donné est court, bien trop court. Il n’y a pas de temps à perdre pour vivre, mais vivre intensément. Le Christ, ce soir, nous fait le cadeau de 40 jours pour redécouvrir ce qui est essentiel, pour nous désencombrer de ce qui nous alourdit, de ce qui nous empêche de devenir ce à quoi nous sommes appelés, c’est-à-dire nous-mêmes. 40 jours pour retrouver le sens de vivre notre vie, pour nous recentrer sur notre condition mortelle : « souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière ». Au-delà du caractère tragique de ces mots, les cendres que nous recevrons dans un instant sont là pour nous rappeler que sous nos cendres, il y a des braises qui ne demandent qu’à être attisées pour devenir à nouveau feu pour soi, feu pour l’autre. Mais cela n’est possible que si nous prenons véritablement conscience que nous ne sommes pas Dieu et donc bien des êtres mortels désireux de réaliser leur vie.
III.- L’audace du manque

Il est possible de renaître, il est possible de commencer à vivre pour de vrai, pour de bon, il est possible d’entrer pleinement dans l’amitié et d’inscrire ta vie dans le grand projet du Dieu vivant. Rien n’est perdu, rien n’est désespéré. Il n’est jamais trop tard pour Dieu, rien n’est impossible pour lui. Pour cela Jésus est clair. Il nous appelle à prier, dans le secret, dans le fond de notre cœur, à exprimer notre désir, à souhaiter la rencontre avec Dieu qui nous connaît au plus intime de nous-mêmes. Ensuite Jésus nous appelle à jeûner, un jeûne qui n’a pas pour objet de limiter la surcharge pondérale ni le taux de cholestérol, un jeûne qui n’a rien à voir avec l’esthétique mais tout avec le désir. Il s’agit de reconnaître ce désir comme essentiel, d’accepter de ne pas être rassasié, de nous libérer de l’illusion qu’en consommant ceci ou cela nous pourrions en avoir assez. Il s’agit de prendre conscience du manque fondamental que rien ne peut combler, de ce désir profond qui nous fait avancer, nous fait espérer. Oui, ce manque-là est richesse, il est l’inscription dans notre programme personnel, de notre ouverture à l’absolu, à l’infini de l’autre, c’est-à-dire à la rencontre de Dieu. Dans cette triple décentration, nous nous libérons des illusions qui nous empêchent de respirer librement : dans le secret de notre cœur, notre Père nous attend pour une rencontre en vérité, au creux de notre faim se trouve un manque qui nous ouvre à l’infini, et dans l’aumône nous entrons en solidarité avec l’ensemble de l’humanité.

 
Le cadeau de Dieu : 40 jours. 40 petits jours pour revenir à ce qui fait notre essence. La finalité de ces 40 jours, c’est la conversion : conversion des cœurs, conversion de vie. A chacune et chacun, dans le secret de son être à trouver les moyens qui lui permettront d’atteindre une telle fin. 40 jours, c’est peu ; une vie aussi c’est peu. N’attendons pas demain pour nous convertir. La conversion, c’est ici et maintenant. Alors et alors seulement, nous vivrons pleinement. Si le carême, c’est vraiment cela, c’est joyeusement que je vous le souhaite extraordinaire.

AMEN.

Michel STEINMETZ †



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