Ce soir, dans notre église, la crèche attire
nos regards. Elle a été préparée avec beaucoup d’énergie et de labeur. Nous
venons d’y déposer solennellement la statue de l’Enfant-Jésus après avoir
entendu dans l’évangile l’annonce de sa naissance par les anges de Dieu. Il a reçu
l’hommage de l’encens qui rappelle que nous voyons en Lui le Fils de Dieu, venu
dans notre monde.
En 1223, dans une petite église rurale
d’Italie, à Greccio, un prêtre a l’idée de faire jouer aux habitants de son
village le rôle des personnages présentés par l’évangile. Les animaux étaient
tout aussi réels. Ce fut la première crèche, la première crèche vivante. Le nom
de ce prêtre de génie n’était autre que François, saint François d’Assise. Son
désir était de faire grandir, de manière simple et « participative »,
dirions-nous aujourd’hui, la foi. Cette « crèche vivante » a donné naissance à
une tradition qui s’est perpétuée, mais les « acteurs » ont été très largement
remplacés par des personnages en bois, en cire, en plâtre ou que sais-je
d’autres encore. Les crèches ressemblant à ce que nous connaissons font leur
apparition dans les églises au XVIe siècle. L’histoire de la crèche
de Noël s’est poursuivie par l’apparition des crèches dans les familles,
particulièrement à Naples, au XVIIIe siècle, dans les demeures aristocratiques.
En France, pendant la révolution, les représentations publiques étant
interdites, la crèche de Noël apparaît dans les maisons. Cela nous fait penser
à une époque obscurantiste plus récente où, sous couvert de modernité et de
laïcité – il faudrait bien plutôt dire de laïcisme – la crèche n’aurait plus
droit de cité. C’est le résultat de la pression exercée par certains, les
francs-maçons, au nom de leur idéologie tout aussi religieuse que celle qu’il
semble combattre, mais dépourvue de Dieu.
Dans cette affaire récente, beaucoup s’en sont pris aux juges qui,
faisant leur métier, ont interprété la loi, se prononçant tantôt pour le
maintien, tantôt pour l’interdiction de crèches dans l’espace public. Le plus
stupéfiant réside sans doute dans la justification employée par beaucoup,
notamment des politiques, pour le maintien : la crèche serait un objet
culturel. Cela voudrait donc dire que, y compris pour défendre des
« racines chrétiennes » on serait prêt à accepter de réduire le Christ,
le Sauveur du monde, Celui qui nous rassemble ce soir et que les peuples
adorent, comme un fait culturel, folklorique et anecdotique. N’aurions-nous
donc plus la foi nécessaire pour confesser avec fierté et joie que notre
relèvement vient du Christ seul et non de nous-mêmes, de nos réflexions
philosophiques ou tactiques économiques ?
Il est inutile de tergiverser, on nous le
rabâche assez, tout est en crise : les finances, l’environnement,
l’économie, la nation, le couple, la famille, l’Eglise, l’Islam, la foi…
Paradoxalement, que la situation soit grave nous met en position favorable pour
recevoir positivement le message de Noël. Ce n’est pas un peuple chez qui tout
allait bien, allègre et éclairé, mais bien un peuple ténébreux et tâtonnant qui
a vu se lever « une grande lumière » (Is. 9, 1). Ce n’est pas parce
que nous connaissons des crises que nous ne pouvons pas vivre pleinement de la
joie de Noël. C’est parce que nous prétendons qu’il y a d’autres solutions que
la joie de Noël pour sortir de nos crises. Le problème, c’est que chacun a son
petit éclairage sur la situation. A force de se prendre pour une lumière,
chacun en oublie la « vraie Lumière ». Chacun a sa
« loupiotte » qu’il refuse de lâcher et qu’il veut substituer absurdement
à la lumière de Dieu. Pour les chrétiens catholiques, la crèche est alors un
moyen de vivre le sens de la naissance de Jésus. Elle montre que Dieu a pris
notre condition humaine : comment le Fils de Dieu est né, pauvre parmi les
pauvres.
Le Christ que nous fêtons ce soir, le petit
Enfant de la crèche, vient nous rappeler qu’il est venu au milieu de nous pour
nous relever. Dieu nous donne son Fils pour nous remettre debout ; Il ne
se résout pas à nous voir courber l’échine, à ployer sous un fardeau trop lourd
à porter. Il vient à nos côtés. Ce Dieu a droit de cité dans nos villes et nos
villages ! Il n’enferme pas l’homme sur lui-même, il le libère.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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