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dimanche 13 décembre 2009

Homélie de la solennité du Christ, Roi de l'Univers - 22 novembre 2009

Le Christ, roi de l’univers. Qu’est-ce donc encore que cette fête-là ? Certains seraient sans doute tentés de me dire qu’elle sent le soufre, qu’elle n’a rien à voir avec notre monde moderne et avec les attentes de nos contemporains, qu’elle nous renvoie à un passé révolu. Proposer à notre foi un Christ-Roi alors que depuis plus de deux siècles, en France, tout du moins, la royauté n’existe plus et que certaines royautés terrestres ne valent pas qu’on les érige en modèle ; une fois encore, l’Eglise aurait un train de retard.
Au travers de cette fête, l’Eglise ne fait pas l’apologie d’un système politique ; elle nous invite au contraire à contempler le Christ-Seigneur dans sa gloire à la fin des temps, lorsque, enfin, toutes choses pourront être fondées et établies à jamais en Dieu. Alors ce jour-là, le plus beau jour de l’Histoire, qui sera aussi le dernier, tout sera récapitulé dans le Christ, c’est-à-dire que tout sera placé et inféodé à l’unique tête qui est précisément le Christ, alors ce Christ pourra remettre tout le corps que nous formons avec lui au Père « pour un règne de vie et de vérité, de grâce et de sainteté, de justice, d’amour et de paix » (préface). Ce jour, « Dieu sera tout en tous ».
Loin d’être une nouveauté dans le donné même de la foi, la venue du Règne de Dieu est déjà une constante dans l’attente d’Israël. Jésus, quant à lui, donne un sens nouveau à cette royauté qu’il inaugure lui-même sur terre : en Lui, le Règne de Dieu est déjà parmi nous. Ce Règne, vous l’aurez compris, commence ici et nous sommes appelés à en être les fidèles intendants en même temps que les bâtisseurs pour qu’il s’accomplisse pleinement.

I.- La venue du Règne : une constante dans la foi d’Israël

Depuis les débuts de l’Alliance, Israël chante la royauté de Dieu. On sait que lui seul est roi depuis l’aube du monde et que sa domination sur les êtres est éternelle. « Dès l’origine, ton trône tient bon, depuis toujours tu es », chantions-nous avec le psalmiste. C’est une royauté de droit, mais non de fait. Nous ne le savons que trop bien, à regarder autour de nous. Il n’en demeure pas moins que l’attente de cette royauté est au cœur de la foi d’Israël qui ne désespère jamais et continue, quoi qu’il arrive, d’attendre avec impatience et ferveur celui qui instaurera sur terre ce royaume et que l’on appelle Messie. Jésus, lui-même sera à maintes reprises presser de procéder à cette instauration : il sera en proie à l’incompréhension de plusieurs de ses disciples qui voyaient en lui un messie politique, un révolutionnaire qui bouterait hors des frontières de la Palestine l’occupant romain. La vision de Daniel nous présente ce Messie comme un homme, un « Fils d’homme » à qui Dieu confiera tous pouvoirs et pour toujours. Le symbolisme de l’homme s’oppose ici à celui des monstres des visions précédentes : sa venue avec ou sur les nuées le met en relation avec le monde divin, tandis que les Bêtes montaient de la mer, symbole du domaine du Mal. Le Fils de l’Homme, remarquons-le bien, ne va pas de Dieu vers les hommes ; au contraire, il va bien des hommes vers Dieu pour se présenter à lui avec « le peuple des saints du Très-Haut » et lui remettre, au terme de sa mission, son pouvoir.

II.- Jésus, par sa personne, donne un sens nouveau à cette royauté.

Jésus de Nazareth est bien un « Fils d’homme », mais est-il le roi attendu ? Aux yeux des hommes précisément, Jésus n’a rien d’un roi : il n’a ni palais, ni armée, ni même couronne. Il aura bien pour palais son tombeau, parce que c’est là que se manifeste sa gloire et sa puissance ; il aura bien pour armée ses disciples qui portent au monde sa Bonne Nouvelle avec pour seules armes celles de la charité ; il aura bien un couronne, une seule et unique, celle d’épines ! La gloire de notre Messie est inséparable de sa Croix : c’est dans sa Passion que se manifeste la gloire sans fin de sa Victoire ! Sur la Croix, s’affirme la royauté de Jésus, et c’est là qu’elle perd, du même coup, toute ambiguïté. La royauté que Jésus revendique indirectement se distingue profondément de celle dont les visées et les moyens sont du ressort du monde ; sa royauté à lui n’a pas besoin de la force et des procédés habituels de l’action politique, il la tient de Dieu. Jésus répond à Pilate : « C’est toi qui dis que je suis Roi. Je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité ». Selon la volonté du Père, cette royauté-là n’utilisera pas la violence, elle se réalisera par l’accueil de la vérité de Dieu qui se manifeste en Lui, le Verbe incarné. On sait qu’alors Pilate demande : « Qu’est-ce que la vérité ? », et qu’il ne reçoit pas de réponse. Il revient à l’Apocalypse de jeter le voile, de nous le dévoiler (en grec, apokaluptein) : « [Jésus-Christ] a fait de nous le royaume et les prêtres de Dieu son Père ».

III.- Ce Règne commence ici et nous sommes appelés à en être les fidèles intendants et les bâtisseurs.

Tous les disciples de Jésus, n’en sommes-nous pas ?, sont appelés à partager sa royauté, s’ils « écoutent sa voix ». Car est vraiment roi celui que la vérité a rendu libre (Jn 8, 32). Il me semble que lorsque Pie XI a instauré la fête du Christ-Roi, il a voulu souligné un aspect spécial du rayonnement du Seigneur sur le monde : celui qu’il exerce sur les sociétés humaines. En face d’une religion qui risquerait de sa cantonner à la sphère du privé, la solennité de ce jour affirme une religion qui a sa place dans tous les domaines de l’existence du chrétien. Pour faire régner le Christ sur la terre, au sens où l’entend l’Evangile et non certains intégrismes, bien des méthodes sont possibles. Si autrefois la société était majoritairement empreinte de christianisme, elle ne l’est plus aujourd’hui. S’il est évident et indiscutable qu’une religion, quelle qu’elle soit, ne saurait porter atteinte au vivre-ensemble par ses prétentions hégémoniques, il n’en demeure pas moins qu’il est urgent que des chrétiens se lèvent de plus en plus nombreux dans notre monde pour témoigner simplement et de manière cohérente qu’ils agissent non au nom d’idées purement humanistes ou philanthropiques, mais au nom de leur foi un Jésus, Messie glorieux parce que souffrant.

« Notre Père, qui es aux cieux, que ton Nom soit sanctifié, que ton Règne vienne, que ta volonté soit faite sur toute la terre ! »

AMEN.

Michel Steinmetz †

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