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samedi 20 septembre 2014

Homélie du 25ème dimanche du Temps ordinaire (A) - 21 septembre 2014

Spontanément, nous pouvons trouver enviable la situation des ouvriers de la dernière heure. Après tout, ils y gagnent ! Convertissons-nous au dernier moment : cela suffira et le salaire sera le même. On se prélasse au soleil toute la journée et on rentre sur le soir au paradis, bien dispos et bien bronzé. Eh bien non ! On n’assure pas son salut par des calculs. On le reçoit. Ce serait une manière de vivre en montrant que, pour nous, notre intérêt bien pesé était de nous décharger autant que faire se peut de l’importun fardeau du salut. Comme si cela était ennuyeux, dérangeant de se savoir déjà appelé à la vigne du Seigneur. La pointe de la parabole est là : le maître appelle et envoie à sa vigne. C’est lui qui sort au petit matin pour embaucher, et non les ouvriers qui le tirent hors du lit.  Y a-t-il pire tristesse que de n’être pas appelé ?...Y a-t-il plus grand honneur que de servir Dieu ? Qui peut prétendre se dispenser d’aimer Dieu pour entrer au paradis ?
 
Les paraboles de Jésus sont merveilleuses parce qu’elles nous concernent, nous dévoilent, débusquent nos refus secrets et nous pressent de nous convertir. Car bien sûr c’est nous, les bons ouvriers : dès le départ, issus d’une bonne famille chrétienne, nous avons suivi la filière des sacrements, enregistré tous les enseignements nécessaires ; nous nous sommes donnés pour obéir aux lois de Dieu, nous avons fait des sacrifices afin de participer à la mission de l’Eglise. Tant d’années de dévouement, de fatigue, de sueurs…et voilà que nous apprenons que tel infidèle, tel débauché, tel ennemi de l’Eglise, à la fin de son existence, peut recevoir la même récompense que nous. Scandaleuse injustice, pensons-nous. « Mes pensées ne sont pas vos pensées, et mes chemins ne sont pas vos chemins, déclare le Seigneur ». Nous réagissons alors en enfants gâtés : nous possédons tout et nous refusons à d’autres de bénéficier de même don. Mais le bonheur éternel est par définition insécable : Dieu ne peut en offrir des tranches plus ou moins comblantes selon nos efforts et nos résultats. Vous ne pouvez avoir un peu plus ou peu moins de vie éternelle. Par définition, cette vie offerte par Dieu, par lui donnée en partage et proposée à chacun, est éternelle ou elle n’est pas. Et puis surtout Dieu est bon (« ton regard est-il mauvais parce que je suis bon ? »). Une pièce d’argent était le salaire d’une journée, la somme nécessaire pour entretenir une famille : le maître savait que chacun de ces hommes avait besoin au moins de cette pièce pour rentrer à la maison.
 
La petite sainte Thérèse de Lisieux aurait-elle été jalouse de voir une prostituée la rejoindre pour partager la Béatitude ? Les Apôtres ont dû accepter qu’ils étaient précédés au ciel par un « bon larron », un homme violent qui, à l’ultime minute, jetait son âme dans les bras ouverts du Crucifié. Saint Paul acceptait d’être anathème (rejeté, maudit) pour que ses frères juifs soient sauvés (Rom 9, 3). Saint Dominique passait des nuits en prière devant l’autel de l’église en sanglotant : « Que vont devenir les pécheurs ? ». Dans le Royaume de Dieu, il n’y a plus de répartition au prorata des exploits ni de grades selon les vertus ni de mérites selon les prouesses ascétiques ou les ravissements mystiques ; les auréoles ne diffèrent pas par l’intensité lumineuse ; nul ne peut voir un autre plus heureux que lui. Il n’y a plus qu’une communion sans vanité ni jalousie, une joie donnée toute entière à chacun, une douce ivresse de ceux et celles qui auront (plus ou moins longtemps) œuvré dans la Vigne.
 
Nos eucharisties doivent être les moments prophétiques de cette plénitude, des assemblées où cessent les commérages, les regards en coin, les jalousies mesquines, où on ne demande à personne combien de temps il a travaillé pour l’Eglise. Où tous se réjouissent d’accueillir une telle Marie-Madeleine, un tel Zachée, un tel larron, un tel fils prodigue, afin de boire avec eux la Coupe de celui qui a travaillé jusqu’à la mort pour faire à tous miséricorde.
 
 
AMEN.
 
Michel Steinmetz

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