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samedi 24 novembre 2012

Homélie de la solennité du Christ, roi de l'Univers (B) - dimanche 25 novembre 2012

La fête que nous célébrons aujourd’hui, la fête du Christ, roi de l’univers, a été instituée en 1925. C’était une manière de proclamer l’autorité universelle de Dieu et de son Messie. C’était le début de l’époque des grandes idéologies politiques, le communisme et le fascisme. Staline était au pouvoir dans l’Union Soviétique, le premier état communiste du monde, et Mussolini en Italie, le premier état fasciste. Pour ces régimes totalitaires, l’homme est complètement subordonné à l’état, ou au dictateur qui est censé incarner l’esprit du peuple. Notre fête est en partie une sorte de réponse à ces idéologies, une réponse que dit qu’aucune idéologie politique ne doit dominer sur l’homme, que l’état n’est pas la source de la vie humaine, qu’il n’est non plus la vraie fin de notre vie. L’état n’est pas « l’alpha et l’oméga ». L’alpha et l’oméga, celui qui a le premier mot et le dernier mot, notre origine et notre fin, c’est Dieu, le Dieu qui nous est révélé par et en Jésus Christ, comme le dit la lecture de l’Apocalypse de Jean. Ce n’est donc pas à Staline que devons obéir, ni à Mussolini, ni à d’autres aujourd’hui qui prétendraient imposer leur vision du monde ou de la société, mais au Christ.

Les années 20 du XX siècle n’étaient pas une époque de rois, mais de dictateurs et d’idéologues. L’Église nous présente le Christ comme roi, non pour insister sur le décalage avec les régimes politiques d’alors, ou pour favoriser un type de régime. L’Eglise emploie plutôt ce vocabulaire parce qu’elle le reçoit du langage biblique. C’est évidemment un titre très paradoxal. Si nous appelons Jésus « roi », c’est un roi qui n’assujettit pas son peuple mais qui les libère, qui ne s’impose pas à son autorité mais qui lave les pieds de ses disciples, c’est un roi dont le trône est un gibet. Le terme « roi » n’est pas approprié pour décrire Jésus. La royauté de Jésus, son règne, dépassent de loin tout ce que les systèmes politiques de ce monde pourraient nous en donner comme représentation. Et pourtant, Jésus règne bel et bien. Sa royauté n’est pas de ce monde. Son pouvoir, il le tien de Dieu, son Père ; les finalités de son action se trouvent dans le salut de l’humanité. En fait, quand Pilate lui demande : « Alors, tu es un roi ? », Jésus détourne la question, il change le vocabulaire. « C’est toi qui dit que je suis roi. Je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Tout homme qui appartient à la vérité écoute ma voix ».

Les gouvernements totalitaires, tous les idéologues, tous les dictateurs, essaient, comme tout le monde, de se justifier ; ce faisant, ils essaient de supprimer la vérité. Ils doivent essayer de la supprimer, parce que la vérité est trop grande et trop diverse pour eux. Elle est trop riche pour être conforme à une idéologie. Ils doivent déformer la vérité, mentir, faire taire ceux qui essayent de dire la vérité. Il y avait un historien maoïste en Chine qui a écrit une histoire de son pays. Un de ses lecteurs a remarqué que certaines choses rapportées par cet historien n’étaient pas conformes aux faits historiques, et il lui a reproché ce manque de vérité. L’historien lui a répondu : « Si les faits historiques ne s’accordent pas avec la théorie marxiste, il faut changer les faits. » C’était au moins un idéologue honnête. Pour lui, l’important n’était pas de proclamer la vérité, mais de suivre la ligne du parti.

Le Christ, par contre, n’est pas venu imposer une idéologie, mais apporter de la lumière, rendre témoignage à la vérité. Suivre le Christ, être obéissant au Christ, c’est être fidèle à la vérité, c’est toujours chercher la vérité. Cette vérité n’est pas la production d’un tel ou d’un tel, le résultat de son désir de puissance et de domination. Cette vérité, vérité de l’Evangile, dépasse tous les courants de pensées, toutes les idéologies. Elle s’impose comme l’évidence de la vérité de Dieu. Vérité qui n’écrase pas mais qui rend libre, vérité qui ne fait pas souffrir mais remet debout. L’adhésion au Christ n’a rien à voir avec le fait de suivre la ligne du parti. L’Eglise elle-même reçoit cette vérité comme le don le plus précieux qui lui est fait. Elle est en dépositaire au milieu des hommes. Toujours à réformer, toujours à convertir, sa mission est de préserver cette vérité dans sa pureté et la transmettre pour le salut de tous. Les chrétiens, ceux qui suivent Celui qui est venu rendre témoignage à la vérité, ont toujours le devoir de chercher la vérité et de ne pas se laisser séduire par ce qui est moins que la vérité, par ce qui est partiel et partial. Si nous cherchons la vérité, nous pouvons nous tromper, bien sûr - nous pouvons tomber, même sur le bon chemin - et en la cherchant il faut profiter de la sagesse et de l’expérience des autres, mais c’est finalement notre responsabilité de rester fidèle à la vérité elle-même.

Si la vérité était le fruit d’une majorité, la résultante d’un consensus, nous pourrions en changer au gré des modes ou des revirements de pensée. Or, la vérité, celle que le Christ nous révèle, ne souffre aucune dictature, ni celles d’hier, ni celle du relativisme aujourd’hui, qui voudrait nous faire croire que tout se vaut. Y compris sur des questions morales, éthiques ou sociétales. Nous ne pouvons pas rester fidèles au Christ en ne restant pas fidèles à la vérité ; mais si, par contre, nous insistons pour suivre le chemin de la vérité, nous restons forcément fidèles au Christ, même sans le savoir, car le Christ est la vérité. Et cette vérité est notre vie.

AMEN.

Michel STEINMETZ †

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