Mais il est sûr que de telles situations demanderont
aux chrétiens d’être plus engagés et audacieux, moins endormis et léthargiques
qu’aujourd’hui. Si la foi chrétienne n’est pas annoncée de manière joyeuse et
explicite, il est fort à parier que des solutions faciles et populistes
l’emporteront. Dans ce contexte, l’appel de saint Jacques retentit au cœur de
notre assemblée avec force en ce jour :
Imaginons
que, dans votre assemblée, arrivent en même temps
un homme au
vêtement rutilant, portant une bague en or,
et un pauvre
au vêtement sale.
Vous tournez vos regards vers celui qui
porte le vêtement rutilant
et vous lui
dites :
« Assieds-toi
ici, en bonne place » ;
et vous dites
au pauvre : « Toi, reste là debout »,
ou bien : «
Assieds-toi au bas de mon marchepied. »
Cela, n’est-ce pas faire des différences
entre vous,
et juger
selon de faux critères ?
Frères et sœurs, selon quels critères
jugeons-nous ? Nous jugeons-nous les uns les autres ? Quel regard
portons-nous sur des hommes, des femmes, des enfants, des familles entières qui
doivent fuir leur terre ? Quelle sollicitude avons-nous envers nos frères
et sœurs chrétiens persécutés dans ces mêmes terres ? « Dieu, lui,
n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres aux yeux du monde pour en faire des
riches dans la foi, et des héritiers du Royaume promis par lui à ceux qui
l’auront aimé ? »
L'audace missionnaire, celle dont nous manquons,
Jésus en a fait preuve en rejoignant le territoire de la Décapole, une terre
païenne. La foule – des païens donc – amènent à Jésus un sourd qui avait aussi
des difficultés d’élocution. Devant le miracle accompli, ils disaient : « Il a bien fait toutes choses : il fait entendre les sourds et
parler les muets ». Très astucieusement Marc termine son petit récit en plaçant
dans la bouche des païens la phrase d’Isaïe 35 qui évoquait l’allégresse des
Judéens revenant d’exil au VIe siècle avant Jésus-Christ. Plus qu’un
souvenir à rappeler, c’est une promesse pour l’avenir. En Jésus, Dieu aujourd’hui
vient répandre ses bienfaits : enfin les aveugles voient et « les oreilles des
sourds s’ouvrent ». « Effata » ; les captifs de l’incrédulité
s’ouvrent à la lumière de la foi ; la tristesse de la fatalité se mue en joie
folle devant Jésus. Juifs et païens qui suivaient, depuis des siècles, des routes différentes se rejoignent
maintenant sur « la voie sacrée », le chemin de l’Evangile, Bonne Nouvelle de
la libération universelle.
En racontant cette scène, Marc nous invite à
poursuivre aujourd’hui ce travail d’« ouverture ». L’heure est venue de sortir
de notre enfermement et de remarquer les « sourds ». Ne soyons pas scandalisés
par les propos parfois odieux, parfois obscènes, par les affirmations d’athéisme.
Ces gens « parlent mal » parce qu’ils n’ont pas entendu la Bonne Nouvelle. L’ouïe,
bouchée par les décibels déchaînés ou les slogans menteurs d’une société fermée
sur elle-même, ne peut entendre la douce voix de l’Evangile. Nombreux sont ceux
qui attendent que quelqu’un vienne les prendre par la main et les conduise à la
rencontre du Seigneur. Que nos communautés s’ouvrent, elles aussi, qu’elles les
accueillent avec allégresse. Alors le chœur de la louange s’agrandira et
ensemble nous proclamerons tout joyeux : « Il a bien fait toutes choses :
il fait entendre les sourds et parler les muets ! »
AMEN.
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