Peu à peu, au fil des
siècles, les croyants ont saisi que Dieu, leur Dieu, est un dieu unique et un.
La Bible témoigne de cette longue aventure croyante. Même la puissance romaine
ne parvint pas plus que d’autres avant elle à éradiquer le judaïsme et elle dut
se résoudre à tolérer sa singularité de sorte que, au milieu des plus grandes
nations adorant leurs multiples dieux, Israël continua à être fidèle à sa foi.
Chaque père de famille apprenait à ses enfants à réciter, matin et soir, le shemah, confession centrale de la foi vétéro-testamentaire
: « Ecoute Israël : YHWH notre Dieu est YHWH unique. Tu aimeras YHWH ton Dieu
de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta force ». YHWH : IL EST : le
mystérieux tétragramme (c.à.d. 4 lettres) ne peut même pas être prononcé. On
disait Adonaï : Seigneur.
En Jésus de Nazareth, ce
Dieu se révèle dans tout son mystère. Il est Un en trois personnes : Père,
Fils et Esprit-Saint. La Trinité que nous fêtons aujourd’hui n’est pas un
concept figé, fermé, hermétique. Et de grâce ne la réduisez pas à cela !
Elle est même plus qu’un dogme à croire : elle est l’identité de notre
Dieu. Ce Dieu se veut ouvert. Parce qu’il est Un en trois personnes, il veut nous
introduire à la relation. Son Esprit fait la communion. C’est bien le souhait
trinitaire, emprunté à saint Paul, qui ouvre nos eucharisties : « La
grâce de Jésus notre Seigneur, l’amour de Dieu le Père et la communion de l’Esprit-Saint
soient toujours avec vous ! » (2 Cor 13, 13).
Cependant, dans les
premières communautés chrétiennes, cette foi trinitaire a fait l’objet de
nombreux et houleux débats. Quand bien même Jésus ressuscité avait-il envoyé
ses disciples en mission en leur demandant de « baptiser au nom du Père et
du Fils et du Saint-Esprit » ! Si Dieu est unique, Jésus n’est-il pas
qu’un saint homme « adopté par Dieu » lors du baptême ? L’Esprit
n’était-il pas qu’une force surnaturelle ? En 325, le premier concile de Nicée
énonça le credo : « Je crois en un seul Dieu le Père….Je crois en un seul
Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, Dieu né de Dieu…Je crois en
l’Esprit-Saint qui est Seigneur et qui donne la vie… ».
Dieu n’est pas une
Transcendance lointaine, un Juge impassible : nous pouvons en vérité le nommer
« Abba – Père ». Jésus est son Fils qui a donné sa vie pour que nous soyons
pardonnés de nos péchés. L’Esprit n’est pas qu’un secours dans les épreuves, un
envol dans l’idéal : il est Présence divine qui nous introduit dans la
communion avec le Père, le Fils et entre nous. Si les premiers apôtres ont
voulu proclamer d’urgence cette Bonne Nouvelle à toutes les nations, si tant de
simples fidèles ont été torturés et ont donné leur vie pour cette foi, si tant de penseurs ont
confessé ce credo, c’est bien parce qu’ils étaient convaincus que là était la
Vérité qui éclaire enfin le mystère de Dieu et le mystère de l’homme. La foi en
un Dieu Père, Fils et Esprit leur donnait l’expérience de la grandeur et de la
liberté de l’homme, les entraînait à lutter pour la communion et la paix et à
espérer dans la victoire de l’Amour. C’est là ce qui nous distingue comme
chrétiens au cœur du monde. C’est aussi là souvent et pour beaucoup l’objet d’un
scandale. Ce témoignage de la foi est pourtant capitale parce qu’il révèle aux
hommes l’identité du Dieu qui nous fait vivre.
Le Pape François, l’an
dernier, s’exprimait ainsi : « Nous pouvons faire toutes les œuvres
sociales, on dira : ‘Qu’elle est bonne l’Eglise !’. Mais si nous disons
que nous faisons cela parce que ces personnes sont la chair du Christ, alors
vient le scandale ! Or sans l’Incarnation du Verbe, le fondement de notre foi
vient à manquer. L’Eglise n’est pas une organisation de culture, de religion,
ni même sociale : elle n’est rien de cela. Elle est la famille de Jésus…Jésus
est le Fils de Dieu qui s’est fait chair : c’est ça le scandale ! On nous dit :
‘Chrétiens soyez un peu plus normaux, ne soyez pas aussi rigides’. Derrière
cette invitation se trouve la demande de ne pas annoncer que Dieu s’est fait
homme, parce que l’Incarnation est un scandale ! ». Le Pape invitait
encore : « à ne pas avoir honte de vivre avec ce scandale de la
croix, à ne pas nous laisser prendre par l’esprit du monde qui fera toujours
des propositions courtoises, civilisées. … » (Homélie 1.6.13)
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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