Ces paroles de saint Paul résonnent avec
force. De manière brève et concise, elles nous introduisent dans le projet que
Dieu a pour nous : que nous vivions comme fils. Toute l’histoire du salut
trouve ici un écho : celui qui n’était pas sujet de la loi décida, par amour,
de perdre tout type de privilège et d’entrer par le lieu le moins attendu pour
nous libérer nous qui, oui, étions sous la loi. Et la nouveauté est qu’il
décida de le faire dans la petitesse et dans la fragilité d’un nouveau-né ;
il décida de s’approcher personnellement et, dans sa chair d’embrasser notre
chair, dans sa faiblesse d’embrasser notre faiblesse, dans sa petitesse de
couvrir la nôtre. Dans le Christ, Dieu ne s’est pas déguisé en homme, il s’est
fait homme et a partagé en tout notre condition. Loin d’être enfermé dans un
état d’idée ou d’essence abstraite, il a voulu être proche de tous ceux qui se
sentent perdus, mortifiés, blessés, découragés, affligés et intimidés. Proche
de tous ceux qui dans leur chair portent le poids de l’éloignement et de la solitude,
afin que le péché, la honte, les blessures, le découragement, l’exclusion
n’aient pas le dernier mot dans la vie de ses enfants. Peut-être nous
reconnaissons-nous dans telle ou telle situation, peut-être l’avons-nous vécue
à tel ou tel moment de l’année qui s’achève. Si c’est le cas, c’est avec un peu
d’anxiété que nous voyons arriver une nouvelle année en nous demandant quel
sera son lot de surprises. Le futur dépendrait-il uniquement du hasard ?
de la conjonction des planètes ? de l’agencement de paramètres devant
lesquels nous ne pourrions rien faire ?
La crèche nous invite bien plus à
faire nôtre la logique divine. Une logique qui n’est pas centrée sur le
privilège, sur les concessions, sur les favoritismes ou le hasard ; il s’agit
de la logique de la rencontre, du voisinage et de la proximité. La crèche nous
invite à abandonner la logique des exceptions pour les uns et des exclusions
pour les autres.
Alors qu’une année de plus arrive à
son terme, arrêtons-nous devant la crèche, pour remercier de tous les signes de
la générosité divine dans notre vie et dans notre histoire, qui s’est
manifestée de mille manières dans le témoignage de nombreux visages que nous
avons croisés. Remerciement qui ne veut pas être nostalgie stérile ou vain
souvenir du passé idéalisé et désincarné, mais bien mémoire vivante qui aide à
susciter la créativité personnelle et communautaire parce que nous savons que
Dieu est avec nous. Voilà pourquoi notre action de grâce ne se résumera pas à
une prière générale mais elle s’incarnera, elle aussi, dans des situations, des
personnes pour lesquelles nous dirons ‘merci’.
Arrêtons-nous devant la crèche pour
contempler comment Dieu s’est fait présent durant toute cette année et nous
rappeler ainsi que chaque époque, chaque moment est porteur de grâce et de
bénédiction. La crèche nous provoque à ne donner rien ni personne pour perdu, à
commencer par nous. Voilà pourquoi aussi, en rendant grâce, nous demanderons pardon :
pour ceux que nous avons pu offenser ou blesser, pour la relation avec Dieu que
nous avons pu abîmer. Regarder la crèche
signifie trouver la force de prendre notre place dans l’histoire sans nous
plaindre et nous attrister, sans nous fermer ou nous évader, sans chercher de
faux-fuyants qui nous privilégient. Regarder la crèche implique de savoir que
le temps qui nous attend demande des initiatives pleines d’audace et
d’espérance.
Nous sommes invités à ne pas être
comme l’aubergiste de Bethléem qui devant le jeune couple disait : ici il n’y a
pas de place. Il n’y avait pas de place pour la vie, il n’y avait pas de place
pour l’avenir. Il nous est demandé de prendre chacun notre engagement, même
s’il semble peu de chose, en vue d’un avenir toujours à construire. Devant
l’année qui finit, comme cela fait du bien de contempler l’Enfant-Dieu ! C’est
une invitation à revenir aux sources et aux racines de notre foi. En Jésus la
foi se fait espérance, elle devient ferment et bénédiction : « Il nous permet
de relever la tête et de recommencer, avec une tendresse qui ne nous déçoit
jamais et qui peut toujours nous rendre la joie » (Pape François, Evangelii
gaudium, n. 3).
AMEN.
Michel
STEINMETZ †
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