En général les prophètes comme Jean Baptiste annoncent
des personnes plus importantes qu’eux! Et dans l’évangile que nous venons d’entendre,
la foule se demande si Jean n’est pas la personne la plus importante. Elle se
méprend sur son identité ! Elle l’appelle son maître, et lui demande ce qu’elle
doit faire. Mais finalement, Jean leur annonce qu’il y a encore plus grand que
lui, et qu’il est là simplement pour nous conduire au Christ. C’est cela le
baptême que Jean amène : annoncer en nous, qu’il y a plus grand que nous.
Cependant la méprise première de la foule est
avant tout de croire que ce qu’elle doit faire est une question simplement d’éducation.
Sa méprise est de croire que si elle savait vraiment ce qu’elle devait faire,
elle le ferait ! Et sur ce point, la réponse de Jean Baptiste est
extraordinaire. Il dit à ceux qui se font baptiser ce qu’ils savent déjà ! Il
ne leur apprend rien. Il demande aux soldats et aux collecteurs d’impôt ce qui
est à leur portée, ce qui est à leur mesure.
« Ne faites ni violence ni tort à personne ; et contentez-vous de votre
solde. » Rien de bien extraordinaire là-dedans.
Alors, sur quoi la foule se
méprend-t-elle ? Elle pense que la
source de ce qu’ils doivent faire et du changement est dans l’enseignement de Jean,
et pas dans la joie qui leur est promise ; cette joie de la Bonne Nouvelle qui
doit maintenant devenir le principe de leurs actions. Le discours du Baptiste
n’est pas premier. Ce qui est premier c’est Celui qu’il désigne. C’est un peu
comme ceux qui, dans nos paroisses, s’attachent tellement à tel ou tel prêtre
ou même ne vont plus du tout à la messe lorsqu’un prêtre part d’un endroit.
C’est à se demander si le Christ, tel qu’il est annoncé ou reçu, demeure encore
au cœur de l’annonce. Je dis cela sans jugement de valeur car, évidemment, cela
fait toujours du bien de se sentir reconnu et utile dans notre ministère au
milieu de vous !
Aujourd'hui, nous sommes invités à découvrir
que la source de notre agir est dans la joie, et non dans le commandement. « Réjouissez vous », nous dit Paul. « Soyez
toujours dans la joie du Seigneur ». Et le livre de Sophonie insistait déjà sur
cette joie : « Le Seigneur est en toi... Il aura en toi sa joie et son
allégresse ». Alors, la question « que devons-nous faire ? » ne doit plus
prendre simplement sa source dans un enseignement, dans ce qui nous est demandé
de faire, mais dans notre espérance et notre joie ! Attendre la venue du Christ
à Noël, c’est attendre plus qu’une réponse à la question « que devons-nous
faire ? » Jean nous donne plus qu’un
message de repentance et d’action. Il annonce Celui qui nous amène sa joie, qui
doit devenir la source de nos actions.
La mère de notre conduite doit être la joie,
pas le commandement de ce que nous devons faire. Alors, réjouissons-nous ! Ce
que nous devons combattre, c’est donc cette absence de joie et ce désespoir
radical, qui n’arrive pas à voir Dieu dans son lieu natal, en l’homme et en sa
capacité à se transcender et à aimer ! Porter l’Evangile, ce n’est donc pas transmettre
un contenu, mais permettre un relèvement, capable de transfigurer la tristesse
en joie, permettre à chacun une nouvelle naissance qui conduit à l’espérance d’une
joie qui ne passera pas. A l’approche de Noël, nous sommes invités à nous
réjouir ensemble. Car Noël est là pour nous faire découvrir en l’autre, dans la
surprise de son être, la vraie clé de notre bonheur. Comme le dit Bernanos, le
secret du bonheur, « c’est être capable de trouver sa joie dans la joie de l’autre.
» La joie partagée conduit à ce bonheur qui ne finit pas.
Par conséquent, aujourd’hui nous est offert
quelque chose de plus profond pour nous distinguer qu’un commandement : c’est
notre joie capable de transfigurer la tristesse, une espérance en cette joie qui ne finira pas ! C’est
à cela que nous devons désormais conduire nos frères et sœurs. Frères et sœurs,
avez-vous la joie de l’Evangile inscrite dans votre cœur ?Pas une joie
mielleuse qui ne prend pas en compte ce que nous sommes et nos fragilités. Mais
une joie à notre mesure, et qui paradoxalement dépasse tout ce que nous pouvons
imaginer et traverser.
AMEN.
Michel
Steinmetz †
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